samedi, décembre 29, 2007

Fascinantes


que sont les infinies possibilités génétiques que j'aie pu engendrer (avec un tantinet d'aide masculine): une paire de yeux d'un vert magnifiquement pur, une paire de yeux bleus sans équivoque et quatre paires de yeux bruns aux nuances différentes selon les mousquetaires qui les portent.

Je suis on ne peut plus fière de "ma" diversité, autant dans les formes que dans les couleurs!

Aux grands maux...

Grand-Charme (10 ans) vient me retrouver à la cuisine. Apercevant sur la tablette un petit contenant de pilules rouges, il demande ce que c'est.

Moi -C'est du fer.

Grand-Charme, candide (quoiqu'il affirme que ce fut plutôt sarcastique): "C'est parce que tu n'es pas assez fertile?"

vendredi, décembre 28, 2007

En quête d'une solution

Problématique domestique: une fois installés, les nouveaux rideaux traînent sur le plancher.

Solution proposée par l'homme: la femme pourrait raccourcir le rideau.

Solution proposée par la femme: l'homme pourrait installer le pôle plus haut.

Encore une question de perspective.

dimanche, décembre 23, 2007

Ironie des Fêtes

Quelle ironie les Fêtes, quand même! Congé des Fêtes devrait équivaloir à repos, réjouissances, moment présent, coeur léger. Difficilement possible une fois dans l’engrenage de Noël, à moins d’avoir réussi à relever le défi que tout le monde échoue : celui d’avoir terminé toutes ses emplettes avant décembre. Le prix à payer en stress pour arriver aux réjouissances est élevé.

Courir pour le magasinage, la préparation de la bouffe, les spectacles des enfants et les différentes activités organisées par l’école, penser aux délicates attentions pour les professeurs, à l’organisation chez une famille et l’autre (bonjour les familles séparées ou recomposées!), prévoir laver les vêtements chics des enfants entre les partys, paqueter la voiture, ne rien oublier et espérer qu’il y reste de la place pour les enfants.

Cette année, bien que mon état végétatif mental et mes deuils récents me ramènent à l’essentiel, je réussis hélas à courir quand même. Moi qui me croyais imperméable, pfff!

N’empêche, je suis fière. Fière d’avoir été rigoureuse avec mon principe d’éviter d’acheter des cadeaux uniquement pour la forme. Ainsi, mes trois derniers mousquetaires ne recevront aucun cadeau ludique pour Noël, mais uniquement le genre de chose qu’ils détestent, c’est-à-dire des choses utiles. Un peu d’argent garnira aussi leur compte d’épargne. Point.

Je suis fière d’avoir tenu parole envers Tout-Doux et Coco, qui ne savent pas prendre pas soin de leurs jouets : quand on ne sait pas faire attention à ce que l’on possède, inutile de s’attendre à en recevoir davantage uniquement parce que c’est Noël. Ce serait là une bien mauvaise raison.

Quand on a quelques enfants, notre marmaille possède déjà une quantité inimaginable de jouets qui devrait être amplement suffisante pour tous les enfants éventuels à venir. Le trip malsain de la possession, non merci.

Je suis dégoûtée de me promener dans les centres d’achats. Dégoûtée par la course aux rares stationnements disponibles, par les innombrables Père Noël, les bousculades et les mille stratégies marketing tentant d’être originales à partir des sempiternels « Ho! Ho! Ho! », des tuques de Noël trop communes, des promesses de paiements différés, des Boxing Day avant le temps, de l’innocente invitation au
« partage, à la joie, à la générosité envers ses proches » qui ne sont que manipulation pour vendre plus. L’invitation à la surconsommation me donne des hauts-le-coeur. Envie de m’en dissocier complètement, d’en éloigner ma marmaille. Honte de cet aspect de ma société.

J’ai fait plusieurs cadeaux maison et j’en suis extrêmement fière. Les cadeaux faits maison me font plaisir, me séduisent, me vont droit au coeur. Ils sont empreints de la plus précieuse denrée qui soit : le temps.

Jamais je n’oublierai l’émotion de mon frère le Noël où je lui ai offert sa superbe courtepointe (ma première!) dans laquelle j’avais investi plus d’une centaine d’heures. Idem pour celle offerte à mon autre frère ou aux bébés de mes amies.

Les jolis colliers faits par ma belle-sœur, les touchantes pages de scrapbooking reçues de mes amies à la mort de Thomas, le coussin d’allaitement et les couvertures de bébé faites par ma marraine, les bonnes soupes faites par ma mère, la magnifique douillette de bébé confectionnée par ma grande amie Isabelle, la grenouille en jeans de ma mère, voilà des présents chers à mon coeur.

L’an dernier, c’était notre premier Noël sans Thomas. Un moment particulièrement difficile où la joie du moment présent avec ses proches côtoyait intimement la douleur de l’absent tant regretté. Cette année, la glace est brisée pour lui, mais je sais que je ne pourrai m’empêcher de l’imaginer courir et rire aux éclats avec ses frères.

Une autre glace devra être brisée. Celle de l'apprivoisement du vide laissé par mon père qui ne sera pas là pour nous faire sourire, en entendant Happy Christmas, avec ses sempiternelles éloges au "génie de la musique" qu'était John Lennon.

Joyeuses Fêtes, mes très chères lectrices et lecteurs et n’oubliez pas l’essentiel : la présence de ceux que vous aimez et le droit de vous reposer.

vendredi, décembre 21, 2007

Un vendredi soir

Que faire un vendredi soir quand on a couru comme une FOLLE toute la semaine, qu'il nous reste une TONNE de trucs à préparer pour Noël, qu'on en a marre d'être stressée, qu'on est enfin rentrée des courses et de la pièce de théâtre d'un de ses fils avec la gang complète, la blonde de son ex et son nouveau collier?

On laisse les enfants à ladite blonde, on rentre chez soi dans une maison plus nette que lors de notre départ, on met au four un succulent rôti de filet mignon, on ouvre une bouteille de rouge et on décompresse en attendant qu'il soit à point avant d'aller se coller contre son homme devant la troisième saison de Lost.

Une trève que je n'appelle même pas du luxe.

Générateurs d'embouteillages

Je sais pas si vos enfants sont semblables aux miens, mais pour notre part, entrer avec eux dans un magasin dont les tuiles du plancher ne sont pas homogènes est pour eux une source intarissable de jeux.

-Ceux qui touchent aux tuiles grises sont morts;

-Si on saute sur une tuile rouge, ça donne une vie supplémentaire;

-Interdiction formelle de toucher aux craques sous peine de perdre une vie (idem pour les craques de trottoir l'été);

-Les tuiles vertes sont des îles et si on touche aux beiges (qui sont l'eau, évidemment), on est morts dévorés par les requins;

-Et ainsi de suite (vous comprenez le principe!).

En pressant ma progéniture sautillante jouant à la marelle sur les tuiles du supermarché, j'ignore toujours si, en osant regarder les embouteillages de clients qu'ils créent, je recevrai des yeux attendris devant ces jeux naïfs ou de gros yeux impatients.

Hésitation

Plantée devant le miroir, j'hésite entre deux colliers pour accompagner ma tunique.

Tout-Doux passe par là. Je l'interpelle et lui demande son avis.

Attentivement, il considère les deux bijoux: "Les deux ensemble sont jolis... Si tu mets juste lui (il le tâte délicatement), ça fait plus "douceur". (Il poursuit son évaluation) L'autre est plus spécial...je dirais que c'est lui que tu devrais porter ce soir."

Il s'éloigne, puis considérant mon air toujours perplexe, il revient et affirme doucement du haut de ses huit ans d'expérience: "Tu sais maman, tu peux bien me demander mon avis, mais c'est ton collier; c'est ton goût à toi qui compte. C'est toi qui vas le porter. Tant pis si tes amies n'aiment pas ça. Moi, jamais Francis ou Helaman n'ont jugé ce que je portais."

Petit sourire encourageant, puis il me laisse mûrir ma réflexion.

Mes "amies" n'ont qu'à bien se tenir: je sors avec la blonde de mon ex ce soir.

Le répertoire

Depuis le départ de mon père, dans ma tête défile musicalement le répertoire qui lui fut propre. Je le revois, mon cher papa, désinvolte saisir la guitare et se mettre à chanter. Aussitôt, toute activité autour ralentissait (pour ne pas dire s’arrêtait) et sa musique se mettait à régir l’ambiance telle une joyeuse dictature involontaire. Il était un réverbère et nous, moustiques émotifs, gravitions autour naturellement, complètement subjugués par la source d’énergie qu’il était.

Depuis onze jours, j’entends sa musique, je la fredonne, je tente de la garder en moi, de l’étirer, de la fondre en chacune de mes cellules. Comme je craignais, à la mort de Thomas, de ne plus entendre sa voix dans ma tête (ce qui finit tristement par arriver), je crains maintenant que la musique de mon père ne s’éteigne doucement avec lui.

Mon père a déjà tenté, sous mon insistance, de m’apprendre la guitare. Il était hélas très impatient pédagogue et comme je n’ai pas hérité de son oreille, il s’énervait du fait que ses leçons ne soient pas intégrées rapidement. Il m’apprit finalement une seule pièce, que je répétai tant de fois avec tant de fierté que mon frère finit par me supplier de ne plus m’approcher de l'instrument.

Mon père jouait avec son coeur. Issus d’une famille de musiciens, la musique fut toujours naturelle pour lui et ne nécessitait aucun effort. Lorsqu’il saisissait l’accordéon, il savait naturellement. J’ai toujours eu de l’admiration pour cette intuition musicale, que plusieurs de mes proches possèdent également.

Je ne pourrais accepter que sa musique ne meure avec lui. L’idée de prendre des cours d’accordéon germe, germe, germe. J'ai trouvé une association d'accordéonnistes au Québec. Cool. Prendre des cours d'accordéon... Ainsi, je serais toujours liée à sa musique. Je pourrais me l’approprier, la partager, l’habiter et la diffuser avec lui.

mercredi, décembre 19, 2007

J'ai succombé (ajout de photos)




Amateure de colliers originaux et colorés, je me suis laissée séduire par quelques trésors de ce site, que j'ai reçus aujourd'hui. De toute beauté! Classe, fantaisie et raffinement.



C'est la faute à la mère des demoiselles, vraisemblablement décidée à me faire faire de douces folies...que je ne regrette même pas!

La mort...après

La mort m’amène dans un monde irréel. On pourrait dire que j’ai l’air insensible, mais en réalité, je suis implosée. La mort m’avale, me rend silencieuse, absente.

Durant la dernière semaine, alors que tout le monde autour éprouvait une peine explosive, moi, j’éprouvais la plus majestueuse de toutes les fiertés : celle d’avoir été la fille de mon père.

Ce fut pour moi un honneur, un immense privilège d’avoir pu l’appeler
« papa », d’avoir reçu de ses yeux et de ses bras son amour paternel, d’avoir goûté son humour exquis, de m’être imprégnée de sa musique, d’avoir connu ses leitmotivs, d’avoir pu me moquer tendrement de sa prévisibilité, de sa susceptibilité et d’en rire avec lui, d’avoir joué au pool dans le MESS des caporaux parmi les Grands, de m’être bercée près de « son » feu avec lui, de l’avoir offert comme grand-père à mes enfants, d’avoir bu l’Amarula qu’il envoyait sa femme acheter pour moi chaque fois que je leur rendais visite, d’avoir décoré son dernier sapin de Noël avec mes enfants deux jours avant sa mort, de l’avoir écouté me parler de ses préoccupations, d’avoir reçu sa bienveillance par rapport à mon avenir ou à ma relation avec les hommes, d’avoir partagé la naissance de mon quatrième fils avec lui, qu’il soit venu me voir moi pour recoudre les poches de son veston car il trouvait que je les réparais solidement. Surtout, il fallait garder le secret car sa femme aurait pu être insultée que je sois sa couturière privilégiée. Fièrement, je gardais le secret et m’assurais que mon travail soit impeccable et à la hauteur de ses attentes. Et lui, le grand charmeur, il n'était pas sans connaître le sérieux et la dignité que j'y mettais.

À présent, je sens possibles tous les horizons qu’offre la mort : la solidarité, l’entraide, la chaleur, la fraternité, les doux souvenirs, mais aussi la douleur de l’irréversibilité, l’incrédulité, le règlement de non-dit, la colère, l’amertume, la rancœur. Ces avenues éventuelles plus grises me figent. Je les crains.

Je suis la plus privilégiée d'entre toutes d’avoir été la fille de mon père. Je me sens incroyablement privilégiée d’être la seule fille au monde à pouvoir dire :
« Je suis la fille de cet homme exceptionnel. » Homme combien imparfait, mais combien exceptionnel également. Jamais je ne l’aurais échangé pour un autre plus vertueux, même si parfois j’eus souhaité qu’il soit plus ci ou moins ça.

Mon père éprouvait une très grande fierté à l'égard de ses enfants (au moins autant que ma douce maman ). Nombre de fois, il s’est retiré discrètement d’une discussion joyeusement animée à table simplement pour se détacher de la scène et nous envelopper du regard tendrement mon frère et moi.

De son observatoire, il nous écoutait, savourait notre humour, nos obstinations, le développement et l’articulation de nos idées, nos moqueries, notre répartie, nous, ses précieux enfants.

Parfois, il souriait amoureusement, mais la plupart du temps, au moment où je surprenais ses traits émus et son regard baignant dans une fierté humide, je prenais et reprenais conscience de l’immensité de son amour pour nous. Un amour si grand que l'intensité dans ses yeux aurait pu s'appeler "douleur".

Cet amour, il savait le dire avec des mots, aussi. Bien que son cancer eût grandement abîmé sa bouche, sa langue et sa gorge cette dernière année, à plusieurs reprises, il s’efforça d’articuler pour me dire chaque fois avec une émotion renouvelée que mon frère et moi étions sa plus importante et sa plus belle réussite. Parfois, parler était trop ardu et la force avec laquelle il serrait ma main agissait à titre de mots.

Parce que plusieurs de ses lacunes de père m’ont parfois blessée, j’aurais pu lui faire mille reproches. Il y a quelques mois, ces reproches me consumaient de l’intérieur; j’avais besoin de régler certaines choses avec lui. J'étais persuadée que la seule façon de me libérer l'esprit était de réussir à l'absoudre par les explications qu'il me donnerait.

Je me demandais s’il était égoïste de parler de ses propres blessures avec une personne dont les jours sont comptés. Puis, une personne m'a fait réfléchir sur le pardon. Même si je ne suis pas très catho, je connais le concept du pardon. J’y ai tout de même longuement réfléchi. Je crois avoir fait la paix avec moi-même au sujet des reproches que j’avais besoin d’adresser à mon père car doucement, presque imperceptiblement, ils se sont dissipés et ont cessé de me torturer.

Je ne crois pas être subitement guérie des conséquences des lacunes de mon père, mais les traces d'amertume ont disparu. Je crois avoir réussi à lui pardonner ses faiblesses car jamais mon père n’aurait fait intentionnellement quoi que ce soit pour me nuire ou me blesser. Ses faiblesses étaient donc des maladresses pour lesquelles j’éprouve à présent de la compassion.

Même si je fais de mon mieux comme mère, je demeure très imparfaite. Mes garçons auront tout le loisir de sélectionner mon travers de leur choix pour me faire à leur tour des reproches plus tard.

J’espère toutefois qu’ils garderont de moi le souvenir béton que je garde de mon père : la fierté que j’éprouve d’être la maman privilégiée des jeunes hommes qu’ils deviennent et mon amour incommensurable pour eux. Au fond, c’est vraiment tout ce qui compte.

jeudi, décembre 13, 2007

Enfin...


Il est rentré au pays! Quel soulagement de le retrouver, de le serrer dans mes bras, d'avoir l'impression que nous porterons ensemble les jours à venir et que la suite de l'organisation des au revoirs repose aussi sur ses fraternelles épaules!

mardi, décembre 11, 2007

Le repassage

J'ai toujours trouvé que pour une femme, repasser les chemises de son mari était un symbole de servilité. Vous comprendrez donc que je me refuse à repasser les chemises de mon amoureux, aussi expansif mon amour pour lui soit-il.

Devant ma perception de la chose, une copine toujours zen là où je ne le suis pas s'étonnait et m'expliquait qu'elle, en repassant les chemises de son homme, mettait dans chacun des plis le soin que son amour pour lui exigeait.

Je suis partie de cette idée pour repasser ce matin la chemise que mon père portera pour ses funérailles.

"C'est pas grave, Jenny, si la chemise n'est pas parfaite; il portera un veston par-dessus", me faisait remarquer la femme de mon père.

Non, que je lui répondis. Il faut que je mette de l'amour dans ses plis.

Il faut bien parfois élargir l'horizon de nos perceptions.

PS. J'ai dû téléphoner à la moitié de la ville ici et à une dizaine d'hôtels cubains, mais j'ai réussi à retrouver mon frère.

Veiller

Il y a quelque chose de très spirituel, de très beau dans la mort.

Autrefois, on se relayait pour veiller les défunts. Je suis de cette pensée, de cette approche. Je n'occulte pas la mort. Je l'apprivoise. Je touche, je parle, je questionne, je la respire. Je réagis après. Longtemps après.

Cette nuit, j'ai veillé mon père. Tendrement, amoureusement, entièrement, sans pleurer. Juste m'allonger près de son corps enfin libre de ses chaînes, me coller contre lui au milieu de toutes ces bougies, le caresser, l'embrasser, lui dire tout ce qu'il représentait pour moi, combien je l'aime, combien je suis soulagée qu'il soit enfin libre, lui demander de ne pas oublier de prendre Thomas dans ses bras pour moi et de bien veiller sur lui, de veiller sur ma route et sur celle de ceux que j'aime.

La mort est douloureuse, certes (même si je ne le réalise pas encore pour mon papa...je suis d'une froideur antipathique), mais elle offre aussi de grandes possibilités: celle de parler, d'étreindre, de s'entraider, de se souvenir, d'apprécier.

J'aimais énormément mon bel accordéoniste de papa. J'aurais aimé hériter de son oreille musicale, de son charisme, de son charme.

A présent, tenter de rejoindre mon frère qui se prélasse à Cayo Largo. Pas facile. Je ne connais même pas le nom de son hôtel.

lundi, décembre 10, 2007

Un début de bonne nouvelle

Voilà une bonne nouvelle!

Il y a quelques semaines, j'écoutais à la radio un reportage sur un couple de l'ouest canadien ayant décidé de relever le défi de ne consommer que des produits locaux durant toute une année. Ils expliquaient les problématiques rencontrées et les démarches entreprises pour s'approvisionner en aliments particuliers (le sel, par exemple) et tout ce qu'ils ont tiré de cette expérience.

Celle-ci fut marquante pour eux (je n'ai hélas pas réussi à retracer le reportage) et fort inspirante pour moi (quoique je ne suis pas certaine que je réussirais à me priver à très long terme de clémentines du Maroc, de fleur de sel de Camargue, du bain mousse aux amandes du Petit Marseillais, du bon vin australien, italien ou français, d'Amarula d'Afrique du Sud, de pamplemousses roses de Floride, d'avocats du Mexique, d'olives, de jambon de Bayonne ou de Caprice des Dieux). Je fais de grands efforts pour acheter local, mais je m'octroie tout de même le droit à certains divins plaisirs!

Je suis heureuse qu'enfin on se décide à légiférer sur l'étiquettage! Bon d'accord, ce ne sera que sur les produits frais (donc très limité), mais c'est tout de même un début (Le Devoir écrivait justement un article fort intéressant sur l'étiquettage et les produits locaux dans son édition du 1er décembre.)

Je n'ose toutefois encore rêver du jour où le gouvernement osera braver les lobbys alimentaires pour enfin obliger l'identification des produits issus des OGM. Les médias conscientisent de plus en plus la population sur les bienfaits environnementaux (et éventuellement, économiques) de la consommation locale. Mes enfants connaîtront peut-être le jour où un étiquettage pertinent permettra aux consommateurs de faire des choix éclairés sur les produits consommés.

Mystère

Y a-t-il un réparateur Maytag dans la salle? Je tente de résoudre un mystère qui sollicite beaucoup de moi-même depuis une semaine.

Voilà trois fois que la sécheuse se met en marche toute seule. La première fois, j'ai cru que c'était Fils Aîné qui faisait un séchage à 5h du matin (il est très matinal), mais le soir venu, il m'a assuré qu'il avait été lui aussi mystifié par le bruit de la sécheuse si tôt.

La deuxième fois, elle s'est mise en marche tard en fin de soirée, semant chez moi une grande angoisse (je croyais à un étranger tapi dans la maison) et j'ai dû envoyer Grand-Homme fouiller le sous-sol à la recherche de l'intrus.

Enfin, je suis revenue à la maison après une visite chez le pédiatre cet après-midi. Évidemment, personne n'y était. La sécheuse fonctionnait d'elle-même et je fus encore une fois très inquiète.

J'ai tenté de trouver une explication électrique au phénomène, mais puisqu'il faut actionner deux boutons pour démarrer la sécheuse, je demeure sans réponse.

Devant l'absence d'explication, je ne peux que déduire que c'est l'esprit de ma grand-mère (une femme très efficace) qui a entendu mon désespoir face au sempiternel lavage et qui a décidé de profiter de mon absence pour venir me prêter main forte.

samedi, décembre 08, 2007

Un modèle d'intégrité

Il y avait longtemps que je ne vous avais pas servi une citation de ma George Sand adorée, alors en voici une qui me rejoins particulièrement (remarquez que je pourrais dire ça de son oeuvre entière): "Le faux, le guindé, l'affecté me sont antipathiques, et je les devine, même quand l'habileté les a couverts du vernis d'une fause simplicité. Je ne puis voir le beau et le bon que dans le vrai et le simple, et plus je vieillis, plus je crois avoir raison de vouloir cette condition, avant toutes les autres, dans les caractères humains, dans les oeuvres de l'esprit et dans les actes de la vie sociale.

Et puis je voyais fort bien que cette prétendue grâce, eût-elle été vraiment jolie et séduisante, était un brevet de maladresse et de débilité physique. Toutes ces belles dames et tous ces beaux messieurs,qui savaient si bien marcher sur des tapis et faire la révérence, ne savaient pas faire trois pas sur la terre du bon Dieu sans être accablés de fatigue. Ils ne savaient même pas ouvrir et fermer une porte, et ils n'et ils n'avaient pas la force de soulever une bûche pour la mettre dans le feu. Il leur fallait des domestiques pour leur avancer un fauteuil. Ils ne pouvaient pas entrer et sortir tout seuls. Qu'eussent-ils fait de leur grâce sans leurs valets pour leur tenir lieu de bras, de mains et de jambes? Je pensais à ma mère qui, avec des mains et des pieds plus mignons que les leurs, faisait deux ou trois lieues le matin dans la campagne avant son déjeuner, et qui remuait de grosses pierres ou poussait la brouette aussi facilement qu'elle maniait une aiguille ou un crayon. J'aurais mieux aimé être une laveuse de vaisselle qu'une vieille marquise comme celles que j'étudiais chaque jour en bâillant dans une atmosphère de vieux musc
!"*

George Sand est fascinante par son extrême conscience d'elle-même. Ayant vécu à cheval sur deux classes sociales (du côté de sa grand-mère paternelle hautaine, très possessive de sa petite-fille et très axée sur l'éducation, le maniérisme, l'élégance mais toutefois très aimante et sa mère douce, travaillante, enjouée, chaleureuse, impressionnée par les exigences de sa puissante belle-mère et souffrant de la possession de cette dernière à l'égard de son enfant, de qui elle la sépara à plusieurs reprises au grand désespoir de la petite), l'héritage hétéroclite qu'elle en tira malgré la grande rivalité de sa mère et de sa grand-mère fit d'elle une femme élégante mais vraie, travaillante, vive d'esprit, humaine, considérant le prolétariat (qu'elle associait à sa mère adorée) malgré son propre statut social, très intelligente et respectée, même de la gent masculine de l'époque en dépit de sa marginalité.

George Sand est une inspiration, un modèle parfait d'intégrité et d'authenticité.


*Sand, Histoire de ma vie I, p. 305

vendredi, décembre 07, 2007

Superficiel, mais efficace

Dépassée par les soucis? Changez de tête! Ça ne règle pas les problèmes, mais ça donne parfois l'illusion de laisser les tracas dans l'ancienne tête et de s'apprécier sous un angle nouveau. Qui plus est, c'est moins cher qu'un psy.

Je ne sais pas si c'est typiquement féminin, mais ça fait du bien.

J'aime bien ma nouvelle tête. C'est stylé, dark, un brin arrogant et ça traduit bien l'insolence et les décisions pleines d'aplomb qui m'animent depuis quelques jours.

mercredi, décembre 05, 2007

Fragment de bonheur

Début de l'été, fin d'après-midi. Très forte humidité. J'essaie désespérément de me faire plus intéressante que l'ordi de mon homme depuis un long moment déjà. Urgent besoin de bouger pour briser l'air figé.

Je me fais insistante. Vite, sortir marcher avant que le ciel densément gris ne se mette à tomber.

Enfin, un mouvement. Oui, il a bougé -l'homme, pas le ciel! Il se lève et m'accompagne. Je suis ravie.

Comme toujours, Frédéric est heureux de prendre place dans sa poussette. L'humidité est suffocante. Nous marchons, nous parlons. Je suis bien.

Les nuages bougent rapidement, il fait soudainement sombre. Nous accélérons le pas.

Un pas de plus et le ciel nous tombe dessus comme s'il s'était retenu durant des mois. Pluie diluvienne. En quelques secondes, nous sommes complètement trempés. Ma robe étroite me colle à la peau, flic-a-floc font mes sandales.

Frédéric, paniqué par cette douche impromptue et violente, se met à hurler. Un homme nous invite gentiment à entrer chez lui nous mettre à l'abri. Nous refusons, courons de plus bel.

À chaque pas, je dois tirer ma robe collante qui remonte sur mes cuisses. Je ris, nous courons, Bébé pleure à fendre l'âme, nous sommes pliés de rire de cet intense moment présent. Pas facile de courir et de respirer en riant autant.

Mon homme tente maladroitement de protéger son fils de la pluie tout en maintenant un pas rapide. Je ris de le voir se donner tant de mal, je ris de mon fils qui est trop jeune pour apprécier ce moment unique, je ris de mon homme qui regrette sans doute de s'être laissé convaincre de quitter son ordinateur pour aller se faire mouiller de la sorte, je ris du constant flic-a-floc de mes sandales, je ris de l'indécence de ma robe qui a sa volonté propre de dévoiler mon corps.

Nous courons, nous courons toujours. Je m'étenderais sur la rue inondée qui a l'odeur particulièrement poussiéreuse des pluies folles, je me roulerais dans l'herbe mouillée, je courerais pieds nus pour le simple bonheur d'exister et d'être joyeusement prise dans les filets libres de la nature.

Nous approchons de la maison. Merde.

Pourquoi donc me suis-je résignée à entrer?

Soir d'automne


Genre de soir de novembre dans lequel j'aimerais me faire osmose.

lundi, décembre 03, 2007

Méta

Il y a des vérités que l'on connaît intuitivement, ou simplement par la force des choses. On doute, on redoute, on attend une confirmation. Puis, on finit par l'obtenir.

On ferme alors les yeux longuement. On encaisse et parce qu'on n'a plus la force de se battre contre l'adversité, on tend docilement l'autre joue.

Parfois, il n'y a plus de joues à tendre. Parfois, même une greffe de joues ne suffirait pas.

Métastases.

J'ai cherché ce mot dans le dictionnaire lorsque j'ai entendu aux nouvelles que Robert Bourrassa avait des métastases.

Métastases, ce mot qui rime tant avec impuissance, avec fin, avec au revoir, avec plus de papa.

Je le savais. Depuis que je le vois se prendre la tête à deux mains durant des heures et se recroqueviller pour conserver la chaleur que le peu de gras sous sa peau lui permet, je le sais. Il s'en doutait lui aussi. Mais personne ne prononçait le mot maudit.

Une grossesse: une unité de mesure temporelle bien tangible pour moi. Si je devenais enceinte maintenant, les chances seraient très minces pour que mon enfant puisse rencontrer son grand-père maternel.

Pourtant, en cet instant où je me sens en plein Festival de la Grande Faucheuse, j'aimerais sentir un brin de vie, une lueur, un espoir de réjouissance en moi. Cette pensée n'est pas rationnelle, mais je n'ai en ce moment nullement envie d'être une fille rationnelle. L'émotif pèse trop lourd dans la balance.

Quelques questions (modifié)

Pourquoi le pelletage n'est-il pas encore admis comme discipline olympique? Mes muscles endoloris et mon coeur qui bat la chamade prouvent que c'est bel et bien un sport d'hiver très exigeant!

Pourquoi les producteurs automobiles mettent-ils en marché des voitures blanches au Québec? N'est-ce pas suicidaire une journée comme aujourd'hui?

Pourquoi ressens-je une si douce fierté d'entendre mon fils de huit ans me confier tout bonnement: "Tu sais pourquoi je suis content de ne pas être un enfant gâté? C'est parce que si j'étais un enfant gâté, je me mettrais à pleurnicher "Mamaaan, mamaaan, pourquoi tu ne veux pas m'acheter tel truc et qu'ensuite, si tu ne me l'achetais pas, je me mettrais à faire des crises et que moi, j'aime pas ça faire des crises".

Bonne blanche journée!

Ajout à-propos pour nos amis européens. ;)

dimanche, décembre 02, 2007

L'identité (seconde partie)

La prise de conscience de la partie nominale de l'identité peut se révéler douloureuse pour quiconque se croyant à tort unique à ce niveau.

L'expérience fût vécue ici il y a quelques jours.

Un jeune Coco pas du tout prêt à souffrir savourait sa soupe aux légumes et posa soudainement sur moi des yeux graves: "Tu as entendu? Qu'est-ce qu'ils ont dit à la radio?"

Moi -Je ne sais pas, je n'étais pas attentive.

Coco, se sentant personnellement interpellé -Ils ont dit Jérôme!

Moi -Ah bon...

Tout-Doux, berçant le chat avec désinvolture, corrige -Ils ont dit ST-JÉRÔME.

Coco, tournant des yeux pétillants vers moi -Ils ont dit mon nom à la radio!

Moi -Ils ont surtout prononcé le nom d'une ville..

Coco, désemparé -Mais c'est MON nom!

Moi -C'est aussi le nom d'une ville et le prénom d'un tas d'autres personnes (Tombe le cruel couperet). Tu n'es pas le seul Jérôme.

Coco, se refusant d'admettre la dure vérité -OUI. OUI, je suis le seul Jérôme! Il n'y en a pas d'autres comme moi!

Moi -C'est vrai, tu es un garçon unique et tout à fait spécial, mais ton prénom, tu le partages avec d'autres.

Coco, dérouté, attristé, venant de perdre douloureusement son sentiment d'exclusivité, en déni total -C'est PAS VRAI! Je suis LE SEUL, je n'ai jamais vu un autre Jérôme! Tu vois, je suis le seul!

Tout-Doux, un brin baveux, mais toujours désinvolte -C'est pas parce que tu n'en a jamais rencontrés qu'ils n'existent pas. Maman a raison, tu n'es pas le seul Jérôme.

Coco, mains sur les hanches, TRÈS insulté, s'agenouilla sur sa chaise. Il y avait tout le défi du monde dans ce petit visage lorsqu'il s'adressa à son insolent de frère : "Ah oui? Ok d'abord, Jérôme QUI?"

Déjà, il affichait un air de triomphe.

Du tac au tac, Tout-Doux lui répondit un "Jérôme Picard" tout ce qu'il y a de plus bidon. Je validai tout de même discrètement avec lui avant de me faire confirmer l'arnaque par un sourire complice.

Déstabilisation totale et absolue. Vaincu, Coco se laissa retomber sur sa chaise, solidement ébranlé. J'aurais pu lui annoncer que je n'étais pas sa mère, il n'aurait pas été moins déçu.

Dure, dure la vie quand elle nous oblige à redéfinir notre identité.

vendredi, novembre 30, 2007

L'identité

L'identité. La nôtre, celle qui réside dans le prénom que nous habitons, celle qui fait office du sceau sacré qui scelle le produit humain personnalisé que nous sommes. J'aime connaître les prénoms des gens, cela ajoute une teinte à la perception que j'ai des autres.

Savoir se distinguer par son prénom. Pas par son originalité, mais par sa façon de nous être propre même si nous le partageons avec des milliers d'autres personnes.

La conscience de soi arrive autour de l'âge d'un an, mais les enfants reconnaissent bien avant leur prénom.

J'ai décidé récemment qu'il était temps que je reçoive une certaine rétroaction lorsque je demande à mon p'tit dernier de deux ans de me valider son identité.

J'y travaille ardemment. Depuis deux semaines, cependant, je me bute au même dialogue carbone:

Moi, enthousiaste -Comment tu t'appelles?

Frédéric, souriant du tenace leitmotiv - (...)

Moi, m'imaginant compétente pédagogue -Tu t'appelles Frédéric. Tu le sais bien que tu t'appelles Frédéric!

Frédéric, baissant les yeux et camouflant son sourire ou regardant droit dans les yeux la mère acharnée que je suis -(...)

Moi, patiente, mais insistante -Comment tu t'appelles? Vas-tu me dire ton nom?

Fred, dégelant toujours à cette étape -MON NOM!!

Moi, ton enjoué -Ton nom, c'est Frrrédéric!

Fred, grand sourire baveux -(...)

Moi, encourageante -Dis-le: F-r-é-d-é-r-i-c.

Lui, piton collé -Mon nom. MON NOM! MAMAN MON NOM, MON NOM...

Moi, tentant de modifier l'issue habituelle du discours sans trop y croire -Ton nom est Frédéric.

"Mon nom", grand sourire baveux -Mon NOM!

Moi, devenue désespérée, plus convainquante (l'ai-je déjà été?) du tout -Comment tu t'appelles?

Frédéric, plus arrêtable -MON NOM, MON NOM, MAMAN MON NOM! MAMAAAAAN, MON NOM!

-Pfff! Il est où le gros bébé gâté de maman?

Se pointant fièrement du doigt -Il est là!

Peut-être préfère-t-il se conforter dans cette identité affective?

jeudi, novembre 29, 2007

Je veux tout

Ce ne sont pas des blagues lorsque je dis que je veux tout.

Je veux le beurre, l’argent du beurre, la chèvre, le chou, le loup dans la bergerie et les moutons intacts. Je veux l’ours éternel et sa peau avant de l’avoir tué, je veux l’œuf et le bœuf, je veux l’aiguille et la botte de foin, je veux le chat parti pas trop loin et les souris qui savent danser dans le bonheur de l’insouciance sans être dupes pour autant.

Je sais, on ne peut pas tout avoir et cette idée me révolte. Il y a trop de beau, de grandiose et d’inspirant. Je déteste devoir prendre des décisions. Je ne suis pas une fille raisonnable.

Je veux jouir de mes enfants, m’imprégner de leur fraîcheur, de leur vitalité, de leur essence (le Doc Maillet se régalerait de ma perversion). Je veux le travail et sa gratification, je veux réapprendre à apprécier de l’extérieur la valeur de ce que je possède ici, maintenant. Je veux la latitude nécessaire pour terminer mon livre sans les contraintes qui viennent avec.

Je veux me défouler au judo, prendre des cours de tango et grimper régulièrement. Je veux avoir la motivation de courir plus souvent, le temps et le plaisir de profiter de mon amoureux, la créativité nécessaire pour remplir toutes les pochettes de mon calendrier de l’Avent (et la patience d’assumer leur contenu).

Je veux faire des duos piano-violon avec mon homme, je veux me familiariser avec la désespérante clé de Fa à l’accordéon (et varier mon pénible répertoire, me supplieraient les autres), je veux prendre le temps de faire une charmante petite courtepointe pour envelopper douillettement l’urne de Thomas. Je veux trouver le temps d’imprimer des tonnes de photos pour lui faire un album de scrapbooking (m’initier à cet art du même coup).

Je veux peut-être concevoir un autre enfant, mais sans la multitude de contraintes intrinsèques à une grossesse. Je veux la folie et la fantaisie, mais pas au détriment du peu de sécurité qui m’habite. Je veux éliminer le matériel superflu et être comblée de cette sensation de dégagement.

Je veux trouver ma voie, je veux apprendre à lâcher prise, je veux accéder à la sérénité. Je veux aider les autres, je veux que ce que je suis fasse une différence pour quelqu’un.

Je veux des montagnes, des falaises, des hauteurs, du vert, du gris, du orange, du bleu. Je veux me gaver des secousses intérieures que procure l’immensité et m’émouvoir devant la simplicité des gestes de fraternité.

Je veux des sushis au thon rouge, des éclats de rire, de l’écoute, de la spontanéité, de la verve. Je veux de la douceur, des attentions, des amitiés verdoyantes, de la crème brûlée, de la dérision, auto ou pas.

Je suis idéaliste, j’aime les idées inspirantes et confortables. Je suis exigeante, aussi. J’ai hélas conscience que c’est souvent lorsqu’on lâche prise sur les luttes intérieures qu’engendrent tant d’exigences que les choses se placent naturellement pour nous faire converger vers la sérénité. Le jour où je saurai lâcher prise, renoncer, abdiquer en souriant, je serai auréolée de sagesse et je serai enfin devenue une grande dame.

mercredi, novembre 28, 2007

Générosité

L'apprentissage du rapport des enfants à l'argent me charme. Ils questionnent, évaluent, relativisent. Combien coûte une maison? Une voiture? Une pizza? Un rendez-vous chez le dentiste? Un portable? Combien d'argent avons-nous? À combien s'élèvent nos dettes? Combien d'argent gagne Grand-Homme? Combien d'argent mon livre pourrait rapporter, allez, allez, dis un chiffre, juste pour nous donner une idée.

Depuis deux semaines, les garçons élaborent leur liste de cadeaux de Noël, découpent dans leurs magazines les cadeaux espérés, font des recherches sur Internet. Devant les innombrables items des listes, je leur répète quotidiennement qu'il ne faut pas entretenir trop d'attentes car les cadeaux seront très très petits cette année. Qui plus est, nous avons une dépense imprévue qui constitue la priorité.

Ils savent encore me surprendre. Coco trouva sous mon lit il y a quelques jours trois sous (mon amoureux et ses fuites!). Il alla s'informer à Grand-Homme s'il pouvait les garder.

Devant l'affirmative, sourire élastique aux lèvres, il vint me les offrir en espérant faire lui aussi sa part et m'apporter de ce fait un grand soulagement. Offerts avec tant de générosité, comment les refuser? Il fallut voir le pétillement dans le bleu clair de ses yeux pour comprendre sa fierté d'avoir contribué à éponger le déficit.

En plongeant la main dans la poche de mon jeans ce matin, je souris en tâtant mon nouveau porte-bonheur en pièces détachées.

Hier soir, ce fut Tout-Doux (fier d'être le plus riche de la gang) qui m'annonça avec désinvolture que je pouvais prendre le contenu de son compte en banque pour acheter des cadeaux à la fratrie en spécifiant que ce n'était pas grave si je ne le remboursais pas.

On a beau dire que les enfants sont exigeants, je les trouve surtout magnifiques dans leurs gestes et leurs intentions.

mardi, novembre 27, 2007

Exercices d'humilité

-Recevoir de nouvelles gens à la maison lorsque cette dernière n'est pas nickel comme vous le souhaiteriez;

-Se faire dire subtilement par votre irréprochable voisin retraité que votre haie commence à être haute;

-Défaire par abstinence la ligne parfaite du même modèle de lumières de Noël qui constitue la décoration majeure et continue de toutes les maisons du voisinage;

-Être la seule maison de la rue à n'avoir pas préparé son terrain pour l'hiver;

-Avoir en permanence la voiture la plus sale du voisinage et se faire passer des commentaires admiratifs par les voisins les rares fois où celle-ci rentre au stationnement étincelante de propreté;

-Confier à son si gentil médecin des sentiments durs à s'admettre à soi-même;

-Se permettre, en rencontrant une connaissance bien intentionnée, d'être froide et distante parce que vous n'avez pas envie de vous affubler d'un lourd sourire artificiel dans ce moment où vous n'avez que l'urgent besoin d'avoir la paix;

-Affirmer ouvertement n'être pas tant au-dessus de vos affaires que vous le laissez parfois paraître et soupirer de la légèreté de l'honnêteté.

Exercices d'humilité, désinvolture, insouciance, négligence, gestion de priorités?

jeudi, novembre 22, 2007

Publicité et éducation sexuelle

Pour la charnelle, l'indécente et la lubrique Gooba.

Chaque matin, de mon lit, j'entends la lutte entre Tout-Doux et Coco pour atteindre en premier la trappe du chauffage de la salle à manger. Le premier arrivé s'y installe, souvent enveloppé dans une grande couverture et monopolise la zone de confort.

Un matin cette semaine, de mon lit, je n'entendis pas la lutte désespérée, mais le tintement des cuillères sur les bols entre deux confidences. Les deux habituels belligérants se partageaient l'espace en mangeant leurs céréales.

Tout-Doux, huit ans, confia à son jeune frère: "Moi, quand je vais être grand, je vais faire l'amour avec Alisha".

Coco, étonné -Est-ce que tu vas mettre un condom?

Tout-Doux, responsable -Oui, je vais mettre un condom Trojan.

Coco, vigilant -Les condoms Trojan, ça protège de tout, sauf des enfants.

Tout-Doux, rectifiant -Non, c'est pas ça. Les condoms Trojan, ça protège de tout, sauf du plaisir.

Coco, candide -Ah.

Tout-Doux, haussant les épaules -De toute façon, on n'est pas obligé de mettre un condom. On peut mettre un ballon, aussi.

Coco, gêné -Un ballon sur notre....?? Hihihihi!

Tout-Doux, pédagogue -Oui, ça fait la même chose.

Naïfs, mais conséquents. Voilà l'effet de la pub chez mes enfants.

Mon totem

J'ai bien tenté de me présenter au rendez-vous de Grand-Charme ce matin, mais après une dizaine de kilomètres, la tempête est venue à bout de ma confiance: jamais nous ne réussirions à atteindre l'hôpital sans avoir d'accident.

Routes glacées, grésil, visibilité mauvaise, mauvais pneus. Je déclare que si nous réussissons à monter la côte de l'église, nous serons peut-être en mesure de nous rendre à bon port.

Je réalise après plusieurs pertes de contrôle de la voiture que se rendre à ce rendez-vous est carrément suicidaire. Il faut annuler.

Depuis le début du trajet, Grand-Charme est mon bras droit. Il est responsable du cellulaire. C'est lui qui, à ma demande, téléphone à la garderie pour annoncer que Frédéric restera avec nous aujourd'hui. C'est aussi lui qui, gêné, doit rappeler à la garderie pour annoncer que finalement, nous n'allons plus à l'hôpital et que Fred ira plutôt retrouver ses amis.

Je suis littéralement paniquée des mauvaises conditions et m'arrête plusieurs fois pour briser la glace sur les essui-glaces en manifestant à haute voix ma peur et mon angoisse.

La route est tellement mauvaise que je décrète que re-finalement, Bébé n'ira pas à la garderie. Je retourne à la maison avec lui et n'en sors plus.

Grand-Charme soupire et me baptise officiellement: "Maman, si tu étais scout, ton nom de totem serait girouette insécure."

Il a dit.

mercredi, novembre 21, 2007

L'amour aux temps du choléra

Le chef-d'oeuvre de Gabriel Garcìa Marquez, un de mes auteurs préférés, sortira bientôt en film, si ce n'est déjà fait. Je suis remuée qu'on ait pu espérer produire un film à la hauteur de cette oeuvre magistrale, de ses subtilités infinies et de son humour si succulent. Rarement suis-je tombée amoureuse aussi éperdument de l'âme d'une histoire, du riche imaginaire d'un écrivain véhiculés à travers des mots toujours parfaitement justes.

J'ai entendu une critique EXTRÊMEMENT décevante du résultat cinématographique. Comment une oeuvre cinématographique pourrait-elle conserver de façon précise (pas envie d'une adaptation) toute la superbe du ton d'une oeuvre littéraire (je m'étais posé la question en tombant par hasard sur Stupeur et tremblements sur les tablettes du club vidéo et je n'avais pas pu résister. Je n'avais pas été trop déçue, le ton avait su être conservé. Simplifié, mais conservé.).

Vais-je pousser ma curiosité jusqu'à aller démollir ma conception au grand écran?

mardi, novembre 20, 2007

Blanche

Blanche, comme la première neige.

Accueillante, futée, intuitive, coquette. Une dame de classe et d'humilité, une fée des fleurs, une hôtesse reine, une digne femme de la terre. Généreuse, espiègle, solide et vulnérable à la fois. Une éternelle amoureuse. Le genre de femme qu'on s'arrange pour ne pas décevoir.

Blanche. C'était ma grand-mère et c'est ce matin, à 91 ans, qu'elle est partie rejoindre son Paul-Émile.

Au revoir, douce grand-mère.

PS. J'aime penser à de touchantes retrouvailles entre elle et son mari, entre elle et ses deux filles qui l'ont devancée de plusieurs décennies. Je ne puis m'empêcher de songer que désormais, elle puisse accéder aussi au monde de mon Thomas.

lundi, novembre 19, 2007

Éclectisme en éducation

De nature éclectique en ce qui a trait à mes méthodes d'éducation, il m'arrive d'emprunter des trucs qui semblent fonctionner ailleurs lorsque l'efficacité de mon approche semble s'essouffler.

Ce fut le cas la semaine dernière. Je le constatai lorsqu'après avoir été bordés quarante minutes plus tôt, les enfants se relevaient une énième fois pour des raisons indignes de ce nom.

Je m'écriai, en les voyant surgir de toutes parts dans ma tardive tranquillité, qu'ils dépassaient mes limites et que je ne voulais plus en voir un de la soirée.

Tout-Doux brava ma colère pour me demander pourquoi ils ne pouvaient plus se lever.

C'est alors que je me remémorai ce truc de Madame Unetelle, que je gardais en réserve pour un éventuel cas désespéré.

Je lui répondis tout de go qu'il était 21h06, qu'ils devaient dormir depuis longtemps et qu'à cette heure, en plus, maman devenait hystérique.

Chacun repartit dans sa chambre, me laissant enfin apprécier le silence.

Le lendemain, tandis qu'à la lueur d'une bougie je me faisais cuire assaisonnée de Kundera dans un bain moussant, on frappa à la porte.

C'était Tout-Doux.

-Qu'est-ce qu'il y a? demandai-je sur un ton étonnament calme pour l'heure.

À travers la porte, il me demanda doucement: "Maman, pendant que t'es pas encore hystérique, est-ce que je peux dormir dans le lit de Coco?"

Leçon apprise.

vendredi, novembre 16, 2007

Outil d'efficacité



Génial pour le ménage.

Le ton du chanteur des Pet Shop Boys me rappelle celui du chanteur des Violent Femmes -et de mon adolescence. J'adore!

Fête de ma maman aujourd'hui. Toute la gang fait sa part pour le souper de ce soir. J'ai troqué la préparation du repas contre la moppe -excellente partenaire de danse- de Fils Aîné. Excellent deal.

jeudi, novembre 15, 2007

300

Je ne fais pas référence aux Spartiates, mais à mon livre.

C'est simplement que...rédiger sa trois-centième page procure un je-ne-sais-quoi de satisfaisant. :)

La force du réseau

Depuis le début de ma vie adulte, j’ai connu les bienfaits de deux types de vie complémentaires: l’isolement dû à mes études –à distance (j’ai fondé ma famille en étudiant à plein temps) et la nourriture sociale que constitue le réseau développé par le travail.

Pour le social, il y avait la famille, les amitiés, les collègues. Puis, l’organisme communautaire de mon quartier dans lequel je m’impliquais et les camarades du judo.

Il y eut, après mes études, les congés de maternité qui me plongeaient dans un profond paradoxe : la famine sociale liée à l’isolement par opposition à mon besoin de demeurer avec mes bébés jusqu’à ce qu’ils puissent se déplacer à quatre pattes, prononcer un « maman » enthousiaste doux à mes oreilles pour m’accueillir à mon retour du travail.

Il y eut l’unique session de maîtrise où je sentis la liberté absolue que constitue le fait de circuler dans un lieu de savoir en étant autre chose qu’une mère. Il y eut mon travail auprès de chercheurs en communication et toute la confiance qu’ils avaient placée en moi. Y a-t-il plus enivrant sentiment que celui de se sentir admiré et estimé?

Socialement, il y eut des dîners fous de copines spontanées, charismatiques et lumineuses.

Il y eut aussi la reddition : je n’arriverais pas à terminer ma maîtrise avec quatre enfants, peu de sommeil, beaucoup de responsabilités, pas de soutien conjugal et un couple à la dérive.

Puis, il y eut ma séparation. Une libératrice mais tout de même douloureuse séparation où je me savais la force de passer à travers alors qu’on s’inquiétait de ma solidité. Je me sentais solide parce qu’élément d’un système où règne l’homéostasie, parce que membre d’un réseau, parce que confiante en ma force.

Il y eut mon amour profond pour mon homme et plus vite que l’éclair (!), les deux divins enfants que nous avons eus ensemble.

En trois ans, il y eut une séparation, un nouvel amoureux, beaucoup d’adaptation de part et d’autre, la naissance de deux enfants, la mort de l’un d’entre eux, le démarrage d’une entreprise, le sabordage de celle-ci, trois cancers pour mon père et des soucis de différents ordres. De l'amour gros comme ça, aussi.

Ces trois dernières années et demi, il y eut l’effritement de mon réseau social. Parce qu’en congé de maternité prolongé et sans vie sociale active, la famine est plus criante et menaçante que jamais.

Aller prendre une bière avec une copine, aller dîner avec une autre de temps à autre, c’est momentanément nourrissant, mais ça ne remplace pas l’apport vitaminique du réseau.

Le réseau, c’est le système dans lequel tout être humain trouve la place qui tend à le mener à l’équilibre. C’est sa part d’appartenance au monde actif. Le réseau, c’est la gang, c’est l’appui derrière, c’est les petites tapes dans le dos, c’est l’image positive que l’on nous renvoie de nous-même et qui nourrit notre estime, notre sentiment d’avoir des compétences et une personnalité qui nous sont propres, c’est la certitude d’avoir une place dans une communauté, c’est prendre du système et lui redonner autrement, c’est sentir que l’on contribue nous aussi à nourrir la machine.

La richesse du réseau, c’est les discussions spontanées au bureau au détour d’un couloir, c’est le bonjour joyeux aux collègues le matin, c’est la force de la cohésion, le partage des bons coups, les fous rires, les brainstorming d’équipe, le feed-back, l’entraide, les compliments inattendus, les sourires de ses pairs, la reconnaissance, la familiarité, l’accueil des autres, la gratification sociale.

Graduellement, j’ai perdu cela. C’est un vide immense et on pourrait croire que le vide ne pèse rien. C’est faux. Le Vide, c’est très lourd. Seuls, sans reflet de nous-même, qui sommes-nous? N’est-ce pas essentiel d’avoir la possibilité de se voir dans le regard de l’autre pour être en mesure de maintenir et de peaufiner la définition que nous nous faisons de nous-même?

Être consciente quotidiennement des riches réseaux dont fait partie l'être qui partage ma vie me confronte. Cela creuse un écart entre nos réalités dans un moment où j’ai plus besoin du diapason que du fossé.

La solitude est douce, l’isolement est destructeur. Je suis devenue un terreau parfaitement fertile pour la folie.

Mes implications isolées ne me permettent pas de développer de réseaux, seulement quelques connaissances agréables, mais éparses et sans force de frappe.

Durant l’année de mon entreprise, il y eut le réseautage d’affaires. Ce fut agréable et je suis heureuse de l'avoir fait même si ce n'était pas exactement ce que je recherchais humainement. Rencontrer d’autres entrepreneurs, discuter, partager des repas, s’informer ou simplement se reconnaître et se saluer.

Hélas, ce fut aussi une année de deuil où mon esprit était absent. Avalé par autre chose. Ailleurs, dans un univers émotif inconnu. Paralysé. L’émotif sollicite toute ma personne. Impossible de m’en dissocier. Utopique d’espérer en faire fi pour les besoins de la cause. Rencontres superficielles, donc, où il me fallait me détacher de mon fardeau émotif le temps de m'intégrer aux affaires. Quelle illusion! Off la sourde souffrance, on le masque de sociabilité.

La reconstruction d’un réseau est graduelle. Le mien n’en est pas encore aux devis.

J’espère depuis des mois terminer mon livre avant de retourner travailler. Boucler un projet avant d’en démarrer un autre. Être entièrement disponible d’esprit. J’ignore actuellement comment je pourrais concilier les deux. Finances, besoin de réalisation et soif de social obligent, je continue tout de même ma recherche d’emploi.

Peut-on avoir un aussi grand besoin de calme et de solitude pour terminer un projet essentiel à notre survie émotive en même temps que la quête désespérée de la gratification qui vient avec le reflet positif de nous-même issu du réseau?

mercredi, novembre 14, 2007

Enfants et étrangers

Comme tous les parents, je sers régulièrement à mes enfants le discours sur l'attitude à adopter avec les étrangers: ne pas accepter d'argent ou de bonbons d'un inconnu, refuser de chercher un petit chien avec un adulte même s'il semble sincère, ne pas embarquer dans la voiture d'un étranger, les référer à un autre adulte, vous connaissez les variantes!

Toutes ces consignes valent pour l'ensemble des étrangers même si la grande majorité d'entre eux ne sont pas des gens mal intentionnés. L'attitude à adopter envers les étrangers est régie par la méchante minorité.

Voilà deux matins ces derniers mois où devant la pinte vide, j'envoie Tout-Doux acheter du lait (une fois que je l'estime -à tort- démêlé en ce qui a trait aux différents pourcentage de gras et innombrables formats!).

Voilà deux matins qu'il me revient avec un format de lait plus gros que ce que la monnaie en poche lui permettait. Il m'explique alors que c'est un autre client qui a payé pour lui la différence de plusieurs dollars. Le client -ce matin, un vieux monsieur- ne lui demandait rien. Sans doute amusé de voir le jeune garçon déposer sur le comptoir sa tintante poignée de monnaie, il a simplement posé un geste de gentillesse gratuite.

"Tu as dit merci?"

-Oui, mais j'étais un peu gêné.

-Tu sais que cet homme qui a été gentil, s'il t'avait demandé de le suivre, tu aurais dû dire non? Tu sais que tu ne lui aurais rien dû parce que les gestes gratuits, on ne demande rien en retour?

-Oui, je sais.

Cela me laisse perplexe. Le vieil homme était vraisemblablement bien intentionné et je ne crois pas que mon fils ait été en danger. Des gens aimables, il en existe beaucoup.

Ce qui m'inquiète, c'est que la ligne de notre perception peut être tellement mince entre un étranger aimable par pure bonté d'âme et un étranger momentanément aimable pour mieux appâter un enfant. Comment expliquer cela à un enfant? Les kidnappeurs d'enfants ne les abordent pas en se présentant comme de dangereux personnages!

Reste-t-il une autre option, après la sensibilisation faite aux enfants, que d'espérer qu'ils aient, à huit-dix-douze ans, l'intuition et le jugement de faire eux-même le tri des gestes d'altruisme qu'ils peuvent accepter en sachant qu'ils peuvent aussi se tromper?

La petite Cédrika connaissait elle aussi les consignes et croyait avoir affaire à quelqu'un de sincère.

Au-delà de la vigilance, est-ce une question de chance?

mardi, novembre 13, 2007

Candeur verte

Tout-Doux, fier de son idée de génie, venant doucement me tirer de mon sommeil ce matin: "Maman! Je l'sais ce qu'on pourrait faire pour économiser de l'argent! On pourrait garder les pépins de tous les fruits qu'on achète, les semer et faire pousser nos propres fruits!"

Inculte

Depuis quelques mois, je sais que je suis inculte en matière de sauce de pseudo-vedettes de télé-réalité lorsqu'en attendant aux caisses de l'épicerie, je ne reconnais sur les magazines à potins aucun visage familier.

"Stéphanie évincée du loft", "Les confessions d'une sex-symbol", "L'heure juste à propos de Laurie", "La face cachée de Melinda", "L'enfance douloureuse de Freddy"...On n'a plus les médias de vedettes qu'on avait!

lundi, novembre 12, 2007

Le bonheur

Ces derniers jours, je cogite énormément sur le bonheur. Je connais la pensée qui dit que le bonheur n'est pas une destination à atteindre mais une façon de voyager.

J'ai déjà voyagé ainsi. Insouciante, libre, désinvolte, sagace, légère et heureuse. Je préparais le souper en dansant, j'étais agréable à côtoyer, je chantais, me comparais peu aux autres, jouais beaucoup avec les enfants, qui s'attroupaient autour de moi pour baigner dans ma joie de vivre. Très peu de facteurs pouvaient altérer mon bonheur. Peu importe ce que je faisais, où j'étais, avec qui j'étais et quels doutes m'habitaient, j'étais entièrement heureuse avec la fille que j'étais et je savais faire face à tout avec un inaltérable optimisme. Cette faculté, je la croyais à tort acquise.

À présent, mon bonheur est différent. Fragmenté. Mon bonheur n'est plus une ligne continue qui s'adapte à mes pas dansants, mais de petits fragments épars d'états pendant lesquels je me dis: "Là, dans ce moment présent, dans ce contexte particulier, avec cet état précis, je suis heureuse et je connais le délicieux goût du bonheur". Je ne fais alors pas que respirer et assumer, je vis.

Admirer certaines personnes est une chose. Admirer celle que l'on fut mais dont on n'arrive plus à retracer le splendide filtre de couleurs en est une autre.

mardi, novembre 06, 2007

Zoothérapie

Tout-Doux (huit ans), étendu sur le divan et caressant la petite chatte après une journée particulièrement émotive pour lui: "Maman, moi, quand j'suis triste, on dirait des fois que c'est juste les animaux qui peuvent me consoler."

Moi -C'est vrai que les animaux nous font du bien. Ils le sentent quand on a besoin de réconfort.

Lui -Ils viennent nous voir, ils jouent avec nous, ils sont capable de sentir la présence des fantômes, ils sont doux.

Moi -Dans certains hôpitaux, on amène parfois aux enfants malades de petits chiens. Ils font du bien aux enfants, même aux adultes.

Lui -Moi, je dis que les animaux nous font tellement de bien qu'ils sont comme des médicaments!

Euh, c'est une façon de voir les choses, mais je ne suis pas certaine que j'échangerais notre Mimi contre une boîte de pilules...

Diplomatie

Grand-Charme (dix ans), mieilleux, après avoir fait de son mieux pour terminer en vain son assiette: "Maman, c'était une très bonne initiative ta nouvelle recette, mais ça ne me plaît pas...(ton solonnel faussement ému) M'acceptes-tu comme je suis?" (imaginer ici les battements de cils accompagnant l'attente de mon fou rire et de ma reddition).

Voilà là un jeune homme dont le raffinement et la diplomatie ne cessent de m'étonner.

vendredi, novembre 02, 2007

Illustration

Femme Libre, en commentaire au billet précédent, reconnait la grandeur d'âme de Fils Aîné. C'est vrai, je présente souvent l'aspect dur, audacieux et rusé de mon aîné. Il n'est pas insensible pour autant et le flair et la perspicacité de Femme Libre l'ont détecté depuis un bon moment.

Je vous raconte donc une anecdote illustrant à merveille la capacité de don de soi de Fils Aîné.

C'était il y a un peu plus de deux ans et les garçons étaient en journée pédagogique. J'étais fatiguée, impatiente, intense et caractérielle (enceinte) jusqu'au cou. Je ne savais pas quoi cuisiner pour dîner et j'avais héroïquement réussi à réunir juste ce qu'il fallait pour préparer des croque-monsieurs, que je mis à cuire au moment où le téléphone sonnait.

Bien que je demeurai à côté du four, je fis lamentablement calciner le dîner. Je fus donc expéditive avec mon interlocutrice, lui reprochant bêtement de choisir mes heures de rush pour téléphoner (maintenant, j'ai la sagesse de ne plus répondre au téléphone aux heures de repas).

Je raccrochai, sortis les croque-monsieur du four et m'effondrai en larmes devant ce qu'il subsistait de ce modeste repas si péniblement préparé.

Fils Aîné, qui avait assisté à la scène, me rassura: "Maman, il sont corrects tes croque-monsieur."

"Non ils ne sont pas corrects, ils sont complètement calcinés!" lui répondis-je, découragée à l'idée de devoir trouver une alternative.

Fils Aîné prit alors un ton réconfortant et affirma: "Ils ne sont pas calcinés maman, ils sont juste un peu dorés" et en guise de preuve, il fourra dans sa bouche un carré de pain noirci qu'il avala sans même grimacer.

Il confirma alors sa propre hypothèse: le repas était excellent et tout le monde allait donc survivre. Il appela ses frères et décréta que le repas était prêt. La question était réglée.

Pour apprécier la valeur réelle de ce geste, il faut savoir que Fils Aîné refuse catégoriquement d'ingurgiter toute crêpe, toast, grilled cheese, gaufre si elle est le moindrement dorée. Combien de fois me suis-je insurgée devant ses caprices en lui expliquant que sa crêpe était simplement dorée plutôt que calcinée comme il l'affirmait?

Que pouvais-je donc répondre à mon fils qui me servait mes propres paroles pour me démontrer sa compassion? Mieux encore, il avait fait ce qu'autrement il n'aurait jamais fait: il avait avalé quatre fois pire que ce qu'il s'était toujours refusé à avaler.

N'était-ce pas là une démonstration sans équivoque de sa capacité de don de soi?

jeudi, novembre 01, 2007

Une histoire d'Halloween

Une mère épuisée qui se laisse contaminer depuis deux jours par le virus du petit dernier tente de se reposer avant la préparation générale pour la course aux bonbons.

Mal en point, elle songe à laisser son homme courir seul l'Halloween avec les petits, puis se ravise: c'est le premier Halloween du petit dernier (qui refuse obstinément d'enfiler -et de garder- son costume) et elle ne veut pas le rater.

Agréable course aux bonbons, température parfaite, garçons sages et polis.

La mère rentre à la maison avec les enfants après la soirée tandis que l'amoureux repart faire quelques courses.

Elle tente de ramasser un peu le bordel de la maison, mais le tout-petit est malade et refuse de quitter ses bras. Elle réussit à obtenir une liberté conditionnelle en installant son petiot devant un petit film sur l'ordinateur.

Elle commence à ranger mais se décourage rapidement: des sacs d'écoles, manteaux-vestes-chandails-pièces de costumes d'Halloween sont étendus en trop encombrants tapis sur le plancher. Les crochets de l'entrée débordent avec des manteaux de trois saisons différentes. Les sacs d'épicerie de l'après-midi ne sont toujours pas défaits, le comptoir est encombré et la (très grande) table est recouverte des bonbons, que ses enfants s'échangent dans une parfaite quiétude.

Après avoir demandé plusieurs fois coopération en vain, elle regarde le tout avec un détachement nécessaire et constate qu'elle n'y arrivera pas.

En réalité, elle ne fait qu'éteindre des feux. Rien de ce qu'elle entreprend ne paraît jamais réellement et tout est toujours à recommencer. Elle ne voit rien d'autre à faire que d'aller se recroqueviller sur le divan pour pleurer en silence son désespoir.

Son aîné entre dans la pièce, s'inquiète doucement. Elle lui nomme la situation telle qu'elle est.

Le fils descend retrouver ses frères et contrairement à ce auquel elle aurait pu s'attendre, il ne les invective pas. La fratrie remonte sur-le-champ, vient valider les propos de l'aîné et à sa discrète demande, commence à ranger sans délai.

Tout-Doux vient s'accroupir près de sa mère et déclare doucement avant de poursuivre les tâches attribuées par l'aîné: "Ce qui te ferait du bien à toi, c'est un bon bain chaud".

Le tout-petit vient trouver sa maman, pointe ses larmes et décrète, fasciné: "Ooh, l'eau! L'eauuu, maman!"

L'aîné, sans dire mot, ramasse les jouets du tout-petit qui gisent sur le plancher et apporte quelques chocolats à sa mère en espérant lui remonter le moral. L'homme rentre et Coco s'empresse d'aller le retrouver pour lui expliquer le drame: "Maman pleure parce que c'est toujours le bordel dans la maison et qu'elle doit encore ranger toute seule".

L'homme ordonne à son amoureuse d'aller se coucher. Grand-Charme lui propose un massage, s'informe professionnellement du "plus haut", "plus fort", "pincer plutôt que pétrir". L'aîné vient lui prêter main forte: Grand-Charme se charge du massage manuel et Fils Aîné de l'appareil à massage chiropratique. Ils forment une équipe harmonieuse que la mère apprécie malgré ses persistants sanglots.

Le tout-petit, malade, colleux et possessif tente de se faufiler entre ses frères pour se coucher sur le dos de sa mère afin d'établir clairement son territoire. L'aîné découvre avec amusement que le petit craint le bruit de l'appareil et utilise cette astuce pour le chasser de sa zone de travail. Le tout-petit se greffe à un flanc de sa mère en guettant d'un oeil la terrible machine.

L'homme s'apprête à mettre la marmaille au lit, mais Coco réussit à se rendre plusieurs fois jusqu'au QG du massage pour promettre à sa mère (et lui réitérer, et lui rappeler, et lui certifier, et lui revalider) que demain, il va l'aider à ranger la maison.

La mère se dit qu'en gestion de crise, ses garçons possèdent sans contredit quelques aptitudes.

La volonté

J'ai longtemps cru que la volonté pouvait venir à bout d'à peu près n'importe quoi. J'ai longtemps carburé avec entrain dans des situations qui désespéraient mon entourage. Malgré ma vulnérabilité, je possède la capacité de me tenir debout dans les tempêtes. Je suis une fille qui ai une très forte volonté et j'en suis fière.

Toutefois, je sais de plus en plus que la volonté ne se suffit pas à elle-même. Elle a besoin d'appuis, de ressources, d'une certaine zone de solidité intérieure. Elle requiert certaines capacités préalables, de l'audace, des convictions, une certaine réserve d'énergie pour s'alimenter. Il est frustrant de posséder une grande volonté mais d'être contrainte par ses réserves fluctuantes de combustible.

mercredi, octobre 31, 2007

Question de perspective, épisode 2

En sortant d'un rendez-vous chez l'ergothérapeute (pour son doigt), Grand-Charme (dix ans): "Maman, moi, je suis le plus chanceux de tous tes enfants."

Moi, curieuse -Ah oui? Et pourquoi?

Grand-Charme, joyeux -Bien, je suis le seul à m'être fracturé une jambe, un bras et à m'être coupé un doigt. Je suis donc celui qui a le plus d'occasions de rater des jours d'école!

Moi -Hm, tu as une façon très positive de voir les choses...

Grand-Charme, encore sur sa lancée d'enthousiasme -En plus, je suis le seul qui remporte souvent des prix à des concours.

Moi -C'est vrai.

Grand-Charme -Tu sais pourquoi je suis si chanceux?

Moi -Non...?

Grand-Charme -C'est parce que j'ai trouvé un trèfle à quatre feuilles quand j'étais petit...

Voir le verre à moitié plein plutôt qu'à moitié vide malgré ses malheurs et attribuer sa sublime vision de la vie à une plante...C'est tout à fait mon Grand-Charme, ça.

lundi, octobre 29, 2007

Dépendance

Enfant, ma mère -monoparentale- allait prendre des cafés pour s'aérer l'esprit de ses deux adorables enfants.

Je ne comprenais pas le besoin ni le rituel, que j'estimais superflu et capricieux.

Qui plus est, lorsqu'elle rentrait du travail, elle m'imposait (à moi seulement, sa pauvre fille mal-aimée) un quinze minutes où je n'avais pas le droit de lui adresser la parole. Durant ce temps, elle s'étendait sur le divan et décompressait de sa folle journée de travail et de son quarante-cinq minutes de voyagement.

Hébétée, j'étais cruellement résignée à la regarder se reposer dans un silence impeccable (j'étais obéissante) avec une légère amertume, littéralement rejetée par ma propre mère avant de pouvoir lui raconter les drames de mes journées. Nouer ma langue et ses impulsions; un monstrueux supplice qu'elle m'infligeait sans pitié aucune.

Lorsqu'elle décrétait que le quinze minutes était terminé, je me ruais sur elle, lui pardonnais ingénument sa cruauté et renouais avec la pie que j'étais.

Bien que je sois nettement plus clémente avec mes enfants, je comprends aujourd'hui la nécessité de cette trêve de sollicitation infantile. Rarement ose-je interrompre les hémorragies verbales de mes garçons même si souvent, je dois admettre que l'envie ne manque pas.

Toutefois, ces fuites de la maison pour se retrouver toute seule dans un café, j'y ai adhéré. Je vais écrire plusieurs fois par semaine devant un grand latté aux amandes. Ailleurs, je sais écrire. Et très bien, même.

J'amène parfois un (ou deux ou trois et je me suis déjà rendue jusqu'à quatre) garçon avec moi. Ils le savent, dans le contexte du café, on ne me DÉRANGE PAS. À mes côtés, ils lisent ou jouent à leurs jeux électroniques en silence.

Ils apprécient, je crois, ce rituel. C'est un privilège pour eux de m'accompagner.

Pour ma part, c'est devenu une dépendance.

Lorsque, comme aujourd'hui, par nécessité, j'en suis privée, je suis une lionne.

Nombre

Comme chaque année, la femme de mon père a préparé des sacs d'Halloween pour les enfants.

Émue, elle me raconte sa "bévue": spontanément, elle a préparé six sacs. C'est mon père qui lui a passé un commentaire sur son nombre de sacs. Elle a réalisé son "erreur" et ça l'a attristée.

Je la comprends. Moi aussi, je me trompe. C'est irrationnel, mais depuis que j'ai perdu un fils, j'oublie combien nous sommes de membres dans la famille, combien nous avons de chaises à table, combien nous avons de places dans la voiture.

Chaque soir, je dois refaire le calcul pour savoir le nombre de couverts à mettre pour souper. Bien sûr, je sais que maintenant, nous sommes sept concrètement (mais huit dans mon coeur), mais de tirer cette conclusion exige de moi un calcul rapide, m'impose une hésitation dont j'étais exemptée avant.

Comme si ce nombre ne me rentrait pas dans la tête, comme si c'était contre-nature, comme si j'étais gauchère et que je devais apprendre à devenir droitière, comme si mes réflexes devaient être altérés, comme si pour apprendre à vivre dans ce qui est je devais constamment me référer à ce qui fut.

J'imagine que ce doit être une forme de réadaptation émotionnelle.

Compassion

Visite chez père enfin à la maison ce week-end. Ce fut bon de le voir chez lui. Moments simples et touchants.

Il parle très peu, demeure assis sur son fauteuil un peu comme une statue. Je m'approche, m'accroupis près de lui, pose ma tête sur le bras du fauteuil. Papa approche les os de sa grande main maigre et me caresse longuement les cheveux.

Au bout d'un moment, je relève la tête et le vois réprimer ses larmes. Je lui demande ce qui ne va pas. "Je suis tanné", qu'il me murmure en secouant la tête et fixant le vide. Il pose sa main sur sa cuisse et je suis désolée de voir qu'il lui reste si peu de chair qu'on voit la nette démarquation entre son radius et son cubitus. La peau moule chacun de ses os comme une fine couche d'alginate.

Je l'aide à se lever, lui propose de lui faire un massage. Il s'étend sur son lit et je masse son corps. Au bout d'un moment, je deviens hésitante. Le massage devrait soulager la tension des muscles, mais papa n'en a plus. Ils ont fondu sous sa peau. Mon massage ne fait donc que promener la peau désormais libre sur les os. Je la caresse donc elle, cette peau douce et fatiguée. Je touche mon père et je vois très clairement dans ma tête la page du squelette humain du dictionnaire.

Je lui dis que Grand-Charme et Fils Aîné s'inquiètent pour lui. Il me répond en pleurant qu'il les aime, ses petits-fils.

"Dis-leur".

Je perçois encore son esprit, mais il est fatigué, lui aussi. Il est faible, entretient le rituel avec de l'eau glacée qui le soulage mais qu'il ne peut avaler.

Au moment où toute la famille s'installe pour manger, il se lève de son fauteuil et vient se tenir près du comptoir où mes quatre aînés prennent leur repas.

"Qu'est-ce que tu fais?" lui demande sa femme, inquiète et surprise de le voir debout.

"Je veux juste les voir tous", qu'il lui répond. Il se tient debout en s'aggripant au coin du mur et regarde la splendide vue d'ensemble que représentent ses cinq petits-fils vivants qui mangent avec appétit leur spaghetti.

Il emmagasine l'image, puis retourne s'asseoir sur son fauteuil.

En soirée, mes deux aînés vont le voir, s'intéressent à lui, à sa machine à gavage. La discussion est silencieuse, mes grands sont un peu perturbés de voir leur grand-père qu'ils aiment dans cet état.

Silence. Je sais que mon père prépare ses mots. Mes grands mangent leurs bonbons près de lui. Puis, papa réussit à formuler sa déclaration d'amour à ses deux premiers petits-fils, ceux dont il est le plus proche.

Je souris intérieurement. Compassion à l'état pur.

jeudi, octobre 25, 2007

Mon bras droit

Je me plains parfois que je ne reçois pas suffisamment d'aide à la maison (je sais pourtant déléguer!), d'autant plus que notre femme de ménage nous a laissés tomber sans prévenir il y a trois mois.

Chaque jour, je quémande de l'aide, éteins des feux, réclame du soutien, me fâche, répète, me décourage, attribue des listes de tâches, ai envie de foutre le camp et de ne revenir que lorsque tout sera impeccable et que tout le monde aura fait sa juste part.

Voilà que depuis deux semaines, je suis touchée de l'aide impromptue qui m'arrive par la personne la plus inattendue qui soit: mon fils de deux ans. D'accord, il n'est qu'un bambin et ce qui est pour lui un jeu aujourd'hui deviendra demain un fardeau, mais de le voir aller m'émeut et je l'observe avec admiration.

Mon bonhomme, quand il circule dans la maison et qu'il aperçoit une mousse, un petit bout de carton, une miette quelconque, il prend la peine de se pencher pour la ramasser et aller la mettre dans la poubelle.

Mon bonhomme, quand il nous voit prendre un linge pour ramasser un dégât sur le plancher ou pour essuyer la table, insiste: "Donne! Donne!" et il nous arrache le bout de tissu des mains pour essuyer lui-même le dégât.

Mon bonhomme, quand il me voit faire un tas de poussière avec le balai, il va chercher le porte-poussière et essaie de m'aider (!) à mettre la poussière où il se doit.

Mon bonhomme, plusieurs fois par semaine, s'installe dans le coin lavage, ramasse les tas de vêtements sales par terre et se dresse sur la pointe de pieds pour tenter de les mettre dans la laveuse.

Mon bonhomme, quand il voit des vêtements sales tombés à côté du panier, s'arrête au passage pour les remettre dedans.

Mon bonhomme, (pour compenser pour toutes les fois où il se promène avec mes souliers dans la maison?), essaie de remettre les souliers en paires sur le tapis d'entrée.

Mon bonhomme, quand il voit ses frères vider le lave-vaisselle, se met à la tâche pour les aider (à leur grand désespoir).

Mon bonhomme, quand il vient de terminer son repas, il lui arrive de prendre son bol pour aller le déposer sur le comptoir.

Mon bonhomme, quand il se trouve dans la salle de bain après le bain de ses frères et qu'il constate qu'il y a inondation sur le plancher, saisit une serviette pour essuyer les dégâts de ses aînés.

Je l'ai même surpris la semaine dernière à brosser l'intérieur de la toilette!

Je suis touchée de voir mon si petit garçon agir en grand garçon, de voir mon bébé de deux ans agir comme un digne bras droit.

Nature et nostalgie

Comme j'ai moins couru ces dernières semaines, je craignais avoir perdu du cardio. Je me trompais: c'est la motivation qui en arrache. Lorsque je me botte le cul (celui-là même qui gêne Fils Aîné), j'ai encore cette bonne impression de courir sans effort, de flotter et d'être libre.

Je crains de cesser de courir l'hiver car je déteste le froid et la slush* du début de la saison. Perdre tous mes acquis, non merci. Juste de m'imaginer braver le froid et je suis découragée.

Sur les rochers, ce soir, je prends ma pause habituelle. Courir à l'obscurité, un autre mood. Je me couche sur le dos, respire et regarde les étoiles -les rares étoiles qui sont encore visibles malgré la pollution par la lumière de la métropole.

L'air de la campagne me manque, ses ciels étoilés aussi. La terre de mes grands-parents où, chaque hiver, durant les vacances, mon frère et moi passions nos journées dehors à concevoir une incroyable glissade de neige où nous nous élançions en crazy carpet de la butte jusqu'au lac.

L'immense jardin de ma grand-mère où j'allais chiper des bouts d'échalotte et des fèves pour me régaler, la forêt si calme, la cabane à sucre où tout le monde mettait la main à la pâte, le réduit que me faisait boire mon grand-père, les immenses champs dans lesquels j'aimais tant courir et surtout, les très gros érables centenaires dans lesquels j'adorais grimper pour espionner les passants ou me jeter dans les immenses tas de feuilles l'automne.

L'hiver, lorsque je suis à la maison et qu'une tempête de neige collante se lève pendant que mes garçons sont à l'école, il m'arrive de leur construire un super fort haut, large et solide (une de mes spécialités) avec des compartiments à munitions. Mon plaisir: les voir arriver à la maison d'un pas traînant et accélérer subitement au contact visuel de la merveille qui les attend.

Ils ne prennent alors pas le temps de rentrer ranger leurs sacs, ils se laissent plutôt tomber à genoux pour m'aider à rouler des boules après avoir bien sûr pris le temps de visiter le fort, qui fait l'envie des rares enfants du voisinage.

Encore une fois, braver l'hiver. Pour la trente-troisième fois.

*Soupir*

*Pour mes lecteurs hors-Québec: en français correct, la gadoue, mélange de neige, d'eau et de calcium qui recouvre tristement les rues et massacre le paysage des beaux hivers québécois.

mercredi, octobre 24, 2007

Irréfutable

Mon amoureux et moi sommes un couple non ponctuel. Nos proches le savent, il ne faut jamais s'inquiéter de nos retards. Ils sont regrettables, mais habituels. À toute soirée, nous sommes assurément les derniers arrivés.

Mon homme se plaît à se disculper de nos retards, préférant les rejeter sur mes larges mais innocentes épaules.

Aujourd'hui, il eut l'élégance de me blanchir sans réellement le savoir.

***

Alors que Grand-Homme était affairé à la préparation de sa gastronomie préférée, Grand-Charme arriva dans la cuisine avec la fable du Renard et du Corbeau et se mit spontanément à la réciter avec une admirable conviction.

Grand-Homme, interpellé, ajouta sa voix à celle de Grand-Charme en continuant de brasser son Kraft Dinner. À eux deux, ils surent m'émouvoir avec leur si parfaite interprétation de la fable, leurs mots concordant à merveille telle une musique longuement répétée.

J'attendis la fin du récital littéraire pour interroger mon homme: "Veux-tu bien me dire où t'as appris à réciter de la sorte les fables de La Fontaine? Ma mère apprenait les fables par coeur dans les années 60! On n'apprend plus ça à l'école depuis belle lurette!"

Carburant encore aux vives émotions que venaient de lui procurer cet harmonieux duo, Grand-Homme m'expliqua que lorsqu'il était au secondaire, il était souvent en retard et que l'enseignant responsable des retards faisait apprendre aux élèves non ponctuels en guise de moyen coercitif des fables qu'ils devaient réciter devant la classe.

Rusé, cet enseignant sut tranformer les élèves lents et négligeants en hommes fiers et cultivés.

À la lumière de l'étendue de la culture de mon homme, me croira-t-on, à l'avenir, lorsque j'affirmerai que nos fréquents retards conjugaux sont dus à la personne la plus poilue du couple?

Complexes amours

Moi qui croyais que l'amour était un sentiment complexe, voilà qu'à la lumière des confidences de Tout-Doux, je suis encore plus perplexe.

***

"Maman, aujourd'hui a été une très bonne journée pour moi. Tu veux savoir pourquoi?"

-Oui. Pourquoi est-ce que c'est une bonne journée?

-Je suis amoureux de Béatrice ET...Béatrice est amoureuse de moi!!!

-Ah oui? Elle te l'a dit?

-Oui! Et Lucas est amoureux d'Alisha. Il m'a demandé de ne pas lui dire, mais j'ai profité du moment où il discutait avec un autre garçon pour aller le dire à Alisha.

-Tu as fait ça? Tout-Doux! Tu as trahi la confidence de ton ami alors qu'il avait pris la peine de te demander d'être discret!

-Ben...C'est pas grave! Il m'avait fait la même chose en disant à Béatrice que j'étais amoureux d'elle. Et puis, Alisha est amoureuse de lui elle aussi, alors c'est correct.

-Booon! Tout le monde est amoureux, alors tout va bien maintenant!

-Ben...Moi aussi j'aime Alisha, mais je ne l'ai pas dit à Lucas.

-Tu es amoureux de Béatrice et d'Alisha? Tu aimes deux filles en même temps?

-Non, non. Je ne suis pas amoureux d'Alisha. Elle, je l'aime. Béatrice, je suis amoureux d'elle, c'est pas pareil.

-Ooh!

Voilà la nuance, une nuance que je comprends. Aimer et être amoureux. Il a de l'acuité amoureuse, mon Tout-Doux.

Pourquoi donc est-ce que je me perds encore dans de profondes et angoissantes réflexions sur l'amour alors que tout peut être si simple?

mardi, octobre 23, 2007

Avantage numérique

Tout-Doux (8 ans), en rentrant de l'école: "Maman, Alexis trouve que ce serait plus avantageux pour lui de vivre dans notre famille."

Moi -Ah oui? Et pourquoi?

Tout-Doux -Ben, parce qu'on a beaucoup de Lego de Star Wars et aussi, parce qu'on est beaucoup de frères pour jouer.

Coco, étonné: "Il n'a AUCUN frère pour jouer?"

Tout-Doux, compassif -Non.

Coco, inquiet -Et de soeurs?

Tout-Doux, avec une pointe de dédain -Oui, une.

Pauvre Alexis. Voué à une enfance malheureuse certaine. De quel genre d'adultes sera donc composée la société de demain?

Un geste, un souvenir

Un geste fréquent: préparer de la salade.

Les huit-dix derniers mois de la vie de Thomas, ce geste était accompagné d'un petit rituel: je lui demandais s'il voulait donner de la salade au lapin et où qu'il fût dans la maison, il accourait. Il se levait sur la pointe des pieds pour regarder les légumes sur le comptoir et attendait près de moi sa feuille de laitue. Je la lui donnais et il se dépêchait d'aller s'accroupir près de la cage pour l'offrir au lapin.

Heureux de voir l'animal se ruer sur la nourriture, il revenait près de moi et infatiguable, en réclamait encore. Les aller-retours entre le comptoir et la cage pouvaient durer de très longues minutes. Même si le lapin avait largement dépassé son quota de verdure, j'avais du mal à refuser à Thomas une troisième, puis quatrième portion. Il y mettait tant de coeur!

Je compris rapidement qu'au nombre de fois où il venait réclamer encore de la laitue, mieux valait la lui donner en plus petits morceaux.

Puis, mon beau bonhomme est décédé et durant dix-neuf mois, j'ai préparé la salade sans bambin à mes côtés pour se soucier du lapin avec un tel engagement. Ce petit rituel me manquait intensément au début, puis j'ai fini par m'habituer au Vide.

La semaine dernière, en préparant la salade, j'ai, sans réfléchir, demandé à Frédéric s'il voulait donner de la salade au lapin et au cochon d'Inde. Il est accourut et est reparti aussitôt vers les animaux.

En le voyant partir à la course avec sa laitue et son enthousiasme, j'ai réalisé ce que je venais de faire. Ça m'a grandement remuée. Je venais de lui transférer sans le vouloir un rituel qui appartenait à Thomas et moi.

Ce geste simple aurait probablement passé incognito si Thomas n'était pas mort. Frédéric aurait naturellement nourri les animaux, comme tous les enfants aiment faire.

Je crois que je cherche à préserver certains souvenirs liés à Thomas uniquement, à les garder immaculés pour lui seul et à leur attribuer un certain statut "non transférable".

Maintenant que j'ai "transféré" ce geste, je ne peux plus reculer. Frédéric s'attend, en me voyant affairée à la préparation de la salade, à en offrir aux animaux. En l'observant s'élancer avec bonheur vers les cages, cela me fait chaud au coeur, mais me rend aussi nostalgique. Jusqu'à la semaine dernière, dans mon coeur, c'était la petite tête brune que je voyais courir laitue en main. À présent que j'ai la chance de voir courir la petite tête châtaine si vivante, comment garder intacte la première image?

Les souvenirs étaient si clairs au début, je voulais être certaine de ne rien oublier. Certaines images pâlissent, à mon très grand regret. C'est la vie qui prend le dessus et ça, ce n'est pas toujours facile à accepter.

lundi, octobre 22, 2007

La franchise

Ma franchise a un côté sombre. Elle me nuit. Je me crois diplomate, mais on me dit plutôt (trop?) prompte.

Je ne dis pas à un employeur ce qu'il veut entendre. Je suis une personne calme, mais audacieuse et probablement insolente. Certains de mes patrons de qui je me croyais peu aimée m'ont dit apprécier beaucoup ma franchise et la détermination de mes idées.

Un homme colérique (j'ai le doigté avec les colériques) et intéressant d'une remarquable culture qui aurait pu être mon patron (si je n'avais pas été si provocatrice -avec mes paroles) m'a déjà chassée de son bureau en furie parce que je le confrontais trop avec ma quête naïve d'idéaux. Impertinente, je me retenais pour cesser de m'amuser de sa colère montante.

J'ignore si j'ai encore une fois été trop franche en entrevue aujourd'hui.

Une copine à la "franchise" plus élastique que la mienne m'a reproché un jour être trop honnête (mon père m'a déjà fait le même reproche) et m'a raconté les pieux mensonges de son $ucce$$ story . Je me cherchais désespérément du travail et j'ai décidé d'assouplir mes idéaux de vertu. J'ai obtenu le poste à l'entrevue suivante. Le mensonge était d'une piété ridicule, mais je me sentais bullshiteuse de première.

Je saurai cette semaine si ma franchise s'est encore mis les pieds dans les plats de la docilité.

dimanche, octobre 21, 2007

Exquise


Exquise que cette journée d'automne volée à l'été. Marcher sur les sentiers de la montagne, respirer les odeurs de la forêt, apprécier les cris de joie de Bébé qui viennent briser la perfection de cette denrée rare qu'est le silence...des trappes à moments présents comme je les aime.



Les préposés à l'accueil des centres d'interprétation doutent souvent de la faisabilité de certains sentiers abruptes avec de jeunes enfants. Je m'en inquiète rarement. S'ils voyaient la détermination et le bonheur dans les yeux d'un jeune enfant lâché lousse en forêt, ils seraient aussi confiants.




D'accord, cela exige une (très) grande patience pour donner la main au petit de deux ans qui tient à grimper sur chaque souche et chaque pierre plus grosse qu'un ballon pour qu'on compte: "Un...deux...trois...GOOO!" avant d'en sauter, provoquant de ce fait un sublime éclat de rire qui se perd dans le calme de la montagne, mais ce rire est si sucré, si doux à mes oreilles, je ne peux y résister (Faux. Vive les épaules de papa-maman pour quelques répits!)



C'est l'automne, quoiqu'on pourrait en penser. En fin d'après-midi, et déjà la lune qui se pointe.

J'adore la bonne fatigue de marche en fin de journée. Elle me fait sentir accomplie.

vendredi, octobre 19, 2007

Automne

Un de mes plaisirs favoris de l'automne est le passage bruyant des oies sauvages. Je les trouve magnifiques, autant par leur beauté que par leurs cris ou leur organisation sociale. Chaque fois qu'une déléguation nous avertit de son passage par ses cris d'encouragement, je laisse mon occupation du moment, je les regarde et je suis émue.

Comme j'habite au bord de la rivière, je les observe se reposer dans l'eau. De toute beauté!

Bien qu'elles soient mes préférées, il n'y a pas qu'elles. Depuis deux semaines, des oiseaux viennent s'aggriper à la vigne pour manger les minuscules raisins. Je les ai identifiés: il s'agit d'étourneaux sansonnets. Ils ne sont pas clairs sur ma photo, mais on les voit en train de s'alimenter.



Cette semaine, il y eut de nouveaux arrivants. C'est Grand-Charme qui les a vus. Ils sont minuscules, jaunes, délicats, gracieux et ils apprécient les graines de mes échinacées. Ce sont des parulines jaunes. Encore une fois, ma photo n'est pas claire, mais ils sont bien là, les tout charmants.



La visite de ces oiseaux me fait tellement plaisir que je rêve depuis deux nuits de gigantesques oiseaux tropicaux colorés qui viennent se percher dans l'érable pour m'attendre et m'émouvoir.

mardi, octobre 16, 2007

Insouciante et exhibitionniste

Tels sont les nouveaux qualificatifs qui me désignent, selon deux de mes fils.

Par une splendide fin de journée comme celle-ci, tandis que le repas est au four, il serait péché de ne pas aller courir. Comme je suis suffisamment pécheresse ces dernières semaines, je chausse donc mes chaussures de course.

Alors que j'ai le pied dans la porte, Fils Aîné et Tout-Doux m'interpellent: ils veulent m'accompagner. Je ne m'en plains pas, ça donne toujours lieu à des échanges intéressants.

Fils Aîné et moi, familiers avec nos rythmes respectifs, marchons d'un pas rapide. Tout-Doux, lui, court comme un chiot enjoué malgré les recommandations de son frère et finit par s'essouffler au moment où ce dernier et moi commençons à courir.

Fils Aîné passe devant et je discute avec le plus jeune, qui est encore tout près. Voyant que je le dépasse, il me demande: "Tu ne m'attends pas?"

Je l'informe que non, que je ne veux pas perdre mon rythme et que ce n'est pas grave s'il marche quelques pas derrière moi.

-Tu n'as pas peur que je me fasse kidnapper? me demande-t-il.

-Non. As-tu peur de te faire kidnapper quand nous allons au parc et que tu as quatre coins de rue d'avance sur moi?

-Non (un peu indigné)...c'est juste que là...si quelqu'un me kidnappe, il pourrait me torturer, me faire beaucoup de mal, et même me tuer. Je suis ton enfant...tu m'aimes...je suis sûr que tu n'aurais pas envie qu'un de tes enfants meure...

Ainsi, mère insouciante, je suis. (Tout-Doux a tout de même survécu jusqu'à la berge, puis jusqu'à la maison).

Nous arrivons au bord de la rivière, où nous prenons une pause sur les rochers. Après quelques minutes de repos, nous repartons.

Cette fois, je marche aux côtés de mon grand qui, embarrassé, me confie: "Ce qui m'embête, quand on marche dos au trafic, c'est que tout le monde peut zieuter notre cul."

Je le rassure: il n'a pas à s'inquiéter, son cul est parfait.

En réalité, ce n'est pas le sien qui le gêne. Il monte donc d'un cran la confidence et spécifie: "Maman...tu portes des pantalons moulants..."

-Oh, (éclat de rire) je vois, c'est donc le mien qui t'incommode!

Embarrassé, il sourit.

-Tu as treize ans et tu commences déjà à être gêné de ta mère! Écoute, si je t'embarrasse à ce point, passe devant. Sinon, tant pis, tu seras pris derrière moi et tu auras mes fesses dans ton champs de vision.

Cela ne suffit hélas pas à le rassurer: "Maman, on est un groupe. Même si on s'espace un peu, ça restera bien évident qu'on est ensemble! C'est sûr qu'on va m'associer à toi!".

Pauvre fils, quand même: être confronté aux jugements éventuels du cul de sa mère, il n'y a là rien de réjouissant.

Il choisit finalement l'option de me dépasser. À quelques reprises, je ne peux résister à l'envie d'augmenter mon rythme et d'aller me flanquer devant lui pour le simple plaisir de remuer les fesses à outrance avant de me tordre de rire devant ses réactions scandalisées: "Mamaaan! Arrête, t'as vraiment l'air folle!"

Pauvre Fils Aîné. Être affligé d'une mère non seulement insouciante, mais également folle et exhibitionniste!