mercredi, novembre 29, 2006

Et la lumière fut

Il est de ces changements qui surviennent et qui nous éblouissent. Parce qu'on ne les attendait plus, on n'ose trop y croire lorsqu'enfin on y est confrontés.

Parfois, pour amorcer le processus du changement, on fait un move initial, comme consulter une psychologue, une travailleuse sociale, un pédo-psychiatre.

Il arrive parfois qu'en dépit des actions entreprises, le statu quo persiste.

On se creuse alors la tête, on se décourage, on peste, on soupire, on se révolte. Quelque chose doit bien être plus fort que la rigidité, l'entêtement, l'orgueil et la tyrannie d'un enfant de douze ans. Quelque chose devrait bien pouvoir vous permettre de percer la carapace, mais quoi?

On décide de prendre une voie alternative, on opte finalement pour l'hypnothérapie et Ô, alleluia, le changement radical je vous dis pas!

On regarde son enfant maintenant auréolé de sa nouvelle attitude, on se plaît à découvrir cette toute récente bonne foi, ces élans naturels pour aider, partager, rigoler sans mesquinerie. Wow.

La routine se poursuit et trois mois plus tard, on se rend compte avec désolation et épuisement que le tyran est revenu en force.

Sauf que...

Les mystères enchantés existants, parfois, naturellement, sans crier gare, un changement survient...

Un mercredi soir, tandis que les plus jeunes moussaillons s'amusent, vous entrez dans le bureau et surprenez une discussion entre votre amoureux et votre aîné.

L'aîné est en train de magasiner le prix d'un Nintendo quelconque vraiment hot sur Internet en tentant de démontrer à votre amoureux que "ce n'est pas si dispendieux".

Les deux hommes zieutent sur un site, puis un autre, et encore un autre. L'ado ne réussit pas à trouver un prix raisonnable qui pourrait convaincre le ministère des Finances.

Pourtant, avec toute sa volonté, il insiste et persiste, c'est vraiment ce qu'il désire le plus pour Noël et il défend bravement ses idéaux en articulant de son mieux ses arguments.

Devant son insistance qui commence à se faire lourde, vous rajoutez votre mot: "Fils aîné, tu connais très bien ma position sur les Nintendo et compagnie. Ce genre de jeu n'entrera pas dans la maison."

Fils aîné motivé -Oui mais c'est vraiment ça que je veux.

Grande-Dame -Même si j'étais d'accord avec le principe, je n'achèterais jamais ces machines hors de prix.

-Mais vous pourriez vous cotiser, demander aux mamies, à mon oncle Luc, avec tout cet argent, ça ne vous coûterait pas si cher!

-C'est non.

Fiston soupire, mais tenace, revient vite à la charge.

Grand Homme, légèrement excédé, se met lui aussi à revendiquer auprès de Fiston un cadeau pour Noël.

Fiston, impassible -Je ne peux pas moi. Je suis un enfant.

Grand Homme -Et alors? Qu'est-ce que ça change? Tu n'as qu'à demander à tes frères de cotiser avec toi...

Fiston, un brin agacé par la revendication parallèle -Nous sommes des ENFANTS.

Grand Dame -Ça n'a rien à voir. Boute-en-train (9 ans) prépare des cadeaux chaque année à chacun des membres de la famille...

Fils aîné -Il ne fait qu'emballer des babioles dont il ne veut plus pour s'en débarrasser...

Grand Homme- Faux. C'est toi qui agit ainsi.

Grande-Dame approuve et poursuit: "Boute-en-train offre des cadeaux tout simples pigés ça et là, mais il a cette attention, il aime faire plaisir. Il m'offre une Caramilk emballée chaque année qu'il a paye avec son argent. (Doucement) C'est un enfant lui aussi...

Changement d'attitude radical de Fils aîné. Un masque tombe.

Fils aîné -Mais là! Arrêtez, vous allez me faire pleurer!

Soudain, silence. Les yeux de Fiston s'emplissent d'eau. Il est assis sur le divan, recroquevillé sur lui-même. Cela vous alerte. Fils aîné n'offre jamais ses larmes. Vous savez qu'il est sensible, mais les larmes, ça non. Jamais.

Vous sentez bien que quelque chose se passe. Échange furtif de regard entre Grand Homme et vous. Grand Homme est visiblement aussi intrigué-ébahi que vous.

Fils aîné, tentant de sourire pour camoufler son extrêmement inhabituelle émotivité (et réussissant plutôt mal): "Et dans la boîte que j'ai emballée il y a quelques jours, vous croyez qu'il y a quoi?"

Fils aîné éclate en sanglots.

Vous osez: "Fils aîné... Qu'est-ce qui se passe? Qu'est-ce que tu as mis dans la boîte?"

Grand Homme incrédule, en le taquinant -Sûrement des jouets dont tu voulais te débarrasser!!?!

Fils aîné, à présent incontestablement bouleversé -Si vous allez dans ma chambre, vous allez voir tout de suite qu'il manque quelque chose...

Grand Homme, moqueur -Pas ton radio, toujours?

Fils aîné tente un sourire.

Grande-Dame, touchée de la grandeur d'âme soudaine de son petit dur d'aîné -C'est ta super base de Légo.

(Il faut savoir que Fils aîné prend un soin extrême de tout ce qu'il possède, est très créatif et a construit -et perfectionné au fil des années une base de Légo invincible avec des tours, des armes redoutables, champs de force et autres particularités très recherchées par ses jeunes frères, qui n'ont jamais Ô grand jamais pu s'avancer à moins de deux mètres de ladite intouchable base sans risquer la crise de panique aïgue de leur aîné)

Fils aîné pleure de plus bel, se camoufle le visage entre les genoux.

Vous êtes viscéralement émue de la situation, doublement parce que c'est lui, le sensible qui joue toujours le Dur, lui qui refuse toujours de parler de ses sentiments, lui qui ne vous a pas montré une larme depuis la mort de son petit frère il y a presque neuf mois.

Vous vous approchez, le prenez contre vous. Voilà votre grand garçon au petit duvet de moustache qui sanglote dans vos bras tandis que vous ne comprenez rien à la situation, que même dans le regard de votre amoureux, vous ne parvenez pas à trouver d'explication à cet élan d'ouverture et de générosité subit.

À travers ses sanglots, vous entendez un "...je ne leur offre jamais rien..." empreint de culpabilité et d'auto-flagellation morale.

Le détachement affectif de cette Super base semble ardu, mais c'est précisément ce qui rend le geste honorable.

Vous êtes ébahie, déstabilisée, soulagée, heureuse que derrière cette façade de tyrannie chronique, il y ait bel et bien ce coeur que vous étiez pourtant certaine d'avoir conçu en même temps que tout le reste.

En allant border votre aîné, vous apercevez à l'emplacement habituel de la base un vide évident...

...Et en posant votre regard dans l'autre coin de la chambre, sur la bibliothèque, votre coeur se serre en voyant l'immense boîte rouge contenant l'objet d'un grand dépassement.

mardi, novembre 28, 2006

Le bout du tunnel

Papa sortira de l'hôpital demain. Après un interminable mois d'inquiétudes, de douleur de progrès, de problèmes, de régression, de crise, de progrès, de "surprogrès", il voit enfin le bout du tunnel.

Je suis heureuse. Je lui ai dit à quel point j'avais eu peur de le perdre, à quel point cette douloureuse angoisse à l'idée qu'il s'en aille m'avait fait retrouver la capacité de pleurer que j'avais perdue après la mort de Thomas (ironiquement à cause de surexploitation). Nous avons parlé des vraies affaires. Les affaires de coeur.

Il articule de mieux en mieux avec sa nouvelle langue, sa trachéo a été recousue, il a recommencé à marcher -lentement et péniblement, mais tout de même. Il mange maintenant de la purée dégueulasse et a hâte de retourner chez lui pour une purée cinq étoiles.

Le médecin lui a dit qu'il était à présent sauvé de son cancer et de lui-même. Papa n'a pas nommé le vice, il m'a simplement dit: "Tu sais de quoi je parle". Bien sûr que je le sais. Je suis tellement fière de lui!

Il a franchi une grande étape en admettant pour la première fois de sa vie son alcoolisme. Même s'il n'a pas prononcé le mot, il a quand même dit: "Tu sais de quoi je parle"...C'est tellement énorme comme allusion!

Il s'ennuie de ses chats adorés. Demain, il les retrouvera.

dimanche, novembre 26, 2006

Velours au coeur

Thomas, les derniers mois de sa vie, avait entièrement sa place dans les jeux avec ses frères.

Les grands s'amusaient à le traîner sur une couverture sur le plancher de bois franc. Thomas se laissait traîner avec joie, aimait qu'on l'emballe dans une boîte de carton et qu'on s'étonne avec exclamation lorsqu'il en sortait subitement, prenait plaisir à courir dès qu'il voyait dans mes yeux et mes gestes lents que je n'attendais que sa fuite pour le pourchasser et le dévorer.

Il pleurait en nous voyant tous disparaître en jouant à cache-cache. Il fallait toujours un volontaire (moi, le plus souvent) pour se sacrifier et le prendre avec lui. Thomas, de sa cachette, faisait du bruit, placotait et trahissait involontairement celui qui avait eu la grandeur d'âme de le prendre sous son aile. Mais il était heureux. Heureux d'être inclus dans le jeu.

Les garçons se construisaient des cabanes en deux clans et Thomas était le seul autorisé à n'avoir pas d'allégeance fixe. Il pouvait passer de l'une à l'autre et on ne lui en tenait pas rigueur.
Petit Caractère, qui vient juste avant Thomas dans la fratrie, était proche de son cadet. Thomas était quotidiennement accaparé par les excessives démonstrations d'amour de son aîné. Il finissait par le repousser, n'en pouvait plus de tant d'affection. Il réclamait sa place dans les jeux de la fratrie, semblait être prêt à laisser son titre de réceptacle à câlins pour graduer vers un titre de joueur à part entière.

À présent, le gouffre est béant entre mes 4e et 6e fils. Comment le 6e pourra-t-il se lier naturellement avec les autres puisqu'il manque un maîllon? L'écart de quatre ans est trop grand, ils ne pourront s'intéresser aux mêmes jeux, la continuité étant brisée par cet hiatus monstre qu'est la mort.

***

Quel bonheur ce week-end de constater mon erreur! J'observais mon quadrupède de 14 mois enjoué marcher en riant vers Petit Caractère dans le but de le mordre. Il fallait voir ce dernier se pousser pour éviter la redoutable morsure d'un bébé apparemment inoffensif!

Bébé, dont l'enthousiasme et la volonté de mordre grandissaient au prorata des tentatives d'évitement de l'autre, poussait de petits cris de joie avant de rire aux éclats chaque fois que ses dents réussissaient à se poser sur la chair de son aîné. Un grand, grand velours au coeur.

Et ce matin, Petit Caractère, fidèle à son habitude, assis à côté de la trappe à chauffage sur la courtepointe avec Bébé en lui énumérant gaiement: "Lapin, coq, écureuil, chèvre, Caaanaaard!!!"...

Le splendide rire aux éclats de Bébé qui résonne de l'autre bout de la maison après chaque "canaaard"...un grand, grand velours au coeur.

Je vais les espionner pour observer la scène de plus près: Petit Caractère a été chercher un yogourt -qu'il partage avec le petit quadrupède. Entre deux bouchées, il énumère les quelques animaux d'un livre dont il regarde les images avec bébé et après la nomination du dernier animal, il se frotte le nez sur le bedon nu d'un bébé ivre de bonheur qui offre à qui veut l'entendre ses délectables éclats de joie.

Soudainement, un murmure d'espoir que malgré la sourde douleur, l'absence du cinquième maîllon n'empêchera pas le quatrième et le sixième de se lier, que ma famille ne sera pas scindée entre "l'avant" et "l'après".

jeudi, novembre 23, 2006

Tranche de soirée

Tranche de souper

Attablée, la famille commence à déguster sa salade (les divines salades étant ma spécialité).

Fils aîné -Maman... Certaines feuilles de ta salade goûtent bizarre...

Grande-Dame -C'est du kale. C'est délicieux au goût et excellent pour la santé.

Fils aîné -Du kale? (grimace) J'aime pas vraiment ça. Je le mets de côté...

Charme de 9 ans -DU "KALE"?!!? (yeux subitement allumés) Wow, comme Kevin-"Kyle"!!!

Grand-Homme -C'est quelqu'un à ton école?

Fils aîné à Grand-Homme -Ben non, toi, tu peux pas le connaître!

Charme, enthousiaste -Non, c'est un gars dans Loft Story!!!

Échange à la fois interrogatif et exclamatif de regard entre Grand-Homme et Grande-Dame.

Grande-Dame, pas certaine d'avoir bien entendu -C'est qui?

Charme, encore plus heureux de l'intérêt que l'on manifeste à son personnage-mystère -C'est un lofteur.

Fils aîné -Il est bisexuel.

Approbation enthousiaste de Charme.

Échange de regard interrogatif et exlamatif entre Grand-Homme et Grande-Dame.

Grande-Dame à Fils aîné: "Qu'est-ce qu'un bisexuel?"

Charme, heureux de connaître la réponse et d'instruire sa mère, devance son frère -C'est quelqu'un qui aime les hommes ET les femmes.

Grande-Dame perplexe devant la culture sexuelle de son fils de neuf ans -(...)

Fils aîné un peu blasé à Charme -Elle le savait déjà... (en levant des yeux désabusés vers sa mère)

***

Tranche de fin de soirée

Je fais du classement dans un tiroir fourre-tout, y trouve des photos de Thomas oubliées depuis longtemps, des cartes de félicitations reçues à sa naissance, son baptême. Je soupire d'amour de les regarder. Souvenirs nostalgiques et doux-amers devant les cartes de souhait de son premier -et unique anniversaire.

Je vais border les petits, leur partage les photos trouvées. Ils parlent de moins en moins de leur petit frère décédé, mais ils sont heureux et excités devant la "tendreté" des images retrouvées, des souvenirs qui jaillissent. Nous parlons un peu de lui. Ma Douceur réclame une de ces photos pour renouveler celle qu'il garde près de son lit (zut, il me faudrait des doubles!).

Ils s'avancent chacun leur tour vers les photos que je leur présente et embrassent leur bébé-frère sur chacune des images.

Je suis heureuse qu'ils gardent dans leur coeur amour, tendresse et loyauté pour leur petit frère devenu ange avant de devenir homme.

mardi, novembre 21, 2006

Coiffeuse story, partie 2

Et ce soir, c'est moi qui tiens les ciseaux.

Il est grandement temps que l'on s'occupe du toupet de ces moussaillons, qui doivent lever la tête pour voir de l'autre côté de leur rideau capillaire.

Ma Douceur est le premier client à venir poser ses fesses sur la chaise. Outre le gigotage parce que les cheveux dans le cou, dans le dos et sur les épaules, ça piiiiiique, je suis étonnée du calme auquel j'ai droit pour aiguiser mes piètres talents de coiffeuse sur mes pauvres cobayes d'enfants.

Mon Petit Caractère (que ce soir, j'appellerai Petit Charme) vient à son tour poser ses petites fesses sur la chaise tandis que son prédécesseur est déjà au bain.

J'ai presque du regret à couper ses belles mèches dorées sur le front qui lui vont à ravir et qui lui donnent cet air si délectable. Petit Charme se tient tranquille, est d'une patience exemplaire.

Je suis agréablement surprise: aucun pleurnichage, aucune plainte sur le tirage de cheveux ou la crainte de voir son sort réduit par ma faute à celui de Van Gogh. Je suis tellement plus efficace quand ils sont coopératifs!

Au suivant. Mon grand Charme s'asseoit sur la chaise.

Je me mets à la tâche de mon dernier client pour ce soir.

Hurlement de terreur en provenance de la salle de bain. Inquiète, je me retourne.

Voilà mon Petit Charme décontenancé, paniqué, littéralement horrifié qui marche vers moi d'un pas décidé après avoir croisé un miroir et qui semble résolu à déposer sa plainte officielle:

"Mamaaaaaaan, je voulaiiiiiis paaaas que tu me coupes les cheveuuuuux comme çaaaaa!"

-Oh, tu n'aimes pas ta coupe?

-Noooon!!!! Mamaaan, je veux paaas comme çaaaaa, je veux comme avaaaant....

-Hmm, on pourrait te mettre une perruque pour aller à l'école demain? Ou mettre l'horrible masque de Grand Charme en attendant que tes cheveux repoussent?

-Noooon! Mamaaaaan! Je veux que mes cheveux soient COMME AVANT. Là je ressemble trooop à papaaaa! Je suiiiis laiiiid, vraiment trop laiiiid!

(Hmm. "Ton père, tu honoreras"....)

La discussion se poursuit dans son lit (j'essaie de le convaincre que son père n'est pas laid et Grand Charme, loyal allié de papa, fait l'éloge de la beauté de leur paternel), je tente de calmer sa panique, il est vraiment désorienté d'avoir perdu ses repères capillaires. Il me demande si ses cheveux repousseront.

-Oui, bien sûr. Les cheveux poussent tous les jours. Leeentement, mais ils poussent tous les jours.

-Demain, ils vont avoir poussé?

-Euh, ils vont déjà avoir commencé... mais ce ne sera qu'à Noël qu'ils seront à peu près longs comme avant qu'on les coupe.

Petit Charme me donne le bénéfice du doute, est rassuré et s'endort paisiblement, le coeur gonflé d'espoir de retrouver son long toupet doré.

Au matin, dès son réveil, Petit Charme se précipite vers la salle de bain. Elle est occupée. Il piétine impatiemment sur place en attendant que son occupant sorte. L'occupant finit par ouvrir, brusqué par ce qu'il croit être un pipi matinal urgent.

Petit Charme grimpe sur la marche et se plante devant le miroir, espérant y retrouver une toison plus familière.

Dépit. Désillusion. Défaite. Désespoir. Déconfiture.

C'est à ce moment qu'il doit encaisser la dure réalité.

vendredi, novembre 17, 2006

Fleurs pour parents

J'apprécie toujours les rencontres aves les enseignants de mes enfants. J'aime avoir du feed-back de leur évolution en-dehors du cadre familial.

Je connais mes enfants pour ce qu'ils sont avec moi, mais n'ai pas vraiment d'éléments de d'observation (pour éviter d'utiliser le très vilain "comparaison" ;-) ) avec un groupe du même âge. À la maison, ils sont eux, je connais leurs forces, leurs tendances, les indicateurs de ce qui ne va pas. Ils sont ma référence pour un enfant de leur âge respectifs.

En discutant avec leurs enseignants, j'apprends à connaître le développement social de ma progéniture et cela m'enchante d'ouvrir la porte sur un aspect d'eux auquel je n'ai pas souvent accès.

C'est toujours un bonheur de se faire flatter indirectement par les commentaires des profs, de ressentir cette fierté à l'idée que ces petits garçons que j'aime plus que tout, même loin de mon rayonnement protecteur, ils cheminent et accumulent du bagage pour nourrir leur caractère, personnalité, leurs connaissances.

Ainsi, mon Petit Caractère de cinq ans "est un élément positif dans le groupe, un leader qui aime aider les autres de façon constructive, qui prend confiance en lui et qui règle ses conflits jadis classés avec les poigts de mieux en mieux avec les mots. Ah, et il est cultivé, a un bon vocabulaire et est très articulé pour son âge". Flatterie numéro 1.

Je connais peu l'enseignante de ma Douceur de sept ans. Elle est nouvelle à l'école et ses interventions écrites et la rencontre de début d'année me donnaient l'impression d'une prof très exigeante, très axée "discipline". J'avais hâte de la rencontrer pour valider mon impression.

Finalement, échanges intéressant, elle sait où elle s'en va, elle tient les rênes de sa classe serrés. Nous avons partagé nos observations. Mon fils a un esprit de synthèse incroyable que je prends plaisir à découvrir. Il nous expliquait cette semaine ce qu'il avait appris sur les Égyptiens, nous détaillait la hiérarchie des dieux égyptiens "qui sont différents du dieu unique de la religion catholique". Le prof me disait à quel point elle trouvait ma Douceur cultivée pour son âge, son vocabulaire recherché et sa capacité de partager de l'information pertinente au bon endroit dans une discussion admirable. Flatterie numéro 2.

L'enseignant de Boute-en-train a eu lui aussi sa dose de bons mots: un élève aidant, généreux, qui a un peu tendance toutefois à s'asseoir sur sa facilité alors qu'il pourrait se surpasser aisément avec un minimum d'efforts. Il expliquait qu'il avait observé le côté humoristique et théâtral de mon Boute-en-train, qu'il avait une belle complicité avec lui et que mon fils aimait bien aller lui partager des jeux d'esprits assez vifs "pour son âge".

Dans ma tête: "Ça y est, il a été grossier, nooooon, j'ai faillit!!!"

Le prof rajoute: "Oh, mais rien de déplacé! C'est simplement qu'il a une présence d'esprit, un type d'humour qu'on ne retrouve pas habituellement chez un enfant de 8-9 ans."

Me voilà rassurée. Flatterie numéro 3 (ma fierté de mère commence à être drôlement gonflée).

On passe ensuite à ma première rencontre avec un conseiller du secondaire. Je ne m'attendais à rien d'inquiétant, mon aîné étant un élève appliqué, studieux et autonome.

Voilà mes flatteries numéro 4: bon élève, discipliné, à son affaire, qui s'affirme de plus en plus et qui a assez d'aplomb pour aller négocier avec tact et doigté une note qu'il juge injustifiée avec un enseignant.

Wow.

Mes fils sont évidemment imparfaits et je connais chacun de leurs défis à relever en classe, mais n'est-ce pas magnifiquement agréable d'apprendre à connaître les aspects cachés de ces petits humains que nous avons engendré, de découvrir le potentiel de ces jeunes personnes qui sont aussi une partie du capital d'une nouvelle génération?

***

En contre-partie, depuis que je suis en amour avec un prof, les rencontres avec les enseignants me font sourire. L'observation de ces profs pendant la rencontre nourrit mon imagination quant aux discussions de salles de profs.

À force de débats passionnées entre mon homme et un de ses amis enseignants sur la pédagogie, la réforme, la discipline, les solutions à tous les maux de l'éducation au Québec et surtout, surtout, les parents (aaaah, les parents, qui semblent être le calvaire chronique de plusieurs!), je ne peux m'empêcher de sourire à imaginer qu'au moment où je m'asseois sur la chaise en face de l'enseignant de mon fils, je deviens moi aussi le calvaire d'un prof.

Je tente alors de contenir mon amusement (j'ai toujours en tête les discussions enflammées), ne voulant pas avoir l'air trop insolent par mon sourire déplacé.

J'ai de l'estime pour ces enseignants habités par leur passion et leurs idéaux, mais je ne peux m'empêcher de ressentir un élan de réelle compassion pour certains enseignants épris d'éducation et qui, tout frais sortis de l'université avec des idéaux plein la tête, s'affichent comme des spécialistes incontestables dela pédagogie venant étaler généreusement l'Ultime Savoir en méprisant de façon à demi-avouée les parents qui apportent l'enfant à l'école comme de la simple eau au moulin.

La pédagogie est-elle à ce point universelle et indépendante de l'individualité de chacun? Un parent et un prof qui travaillent de pair, c'est envisageable et même souhaitable, non? Le parent, par sa connaissance de son enfant, peut aider l'enseignant à peaufiner ses méthodes avec lui. En quoi le parent est-il un si lourd fardeau pour l'enseignant? Le prof se sent-il discrédité dans son rôle?

La directrice de l'école de mes moussaillons -femme que j'estime, m'a dit lors du dernier conseil d'établissement suite à une proposition que j'apportais que je ne vivais pas dans le vrai monde, que les parents sont centrés sur leurs besoins et leurs droits par opposition à leurs responsabilités. Les profs et les responsables du service de garde étaient unaniment d'accord.

Dans ma toute bonne foi, je suis demeurée perplexe. J'ai déjà croisé l'un de ces parents, qui m'avait grandement consternée par son désengagement total vis-à-vis de son enfant et que je croyais être une exception.

Nous avons une petite école de quartier harmonieuse, un brin hétéroclite et à la clientèle majoritairement d'origine québéboise et dont les parents se situent dans la classe moyenne, je discute avec d'autres parents -hétéroclites aussi, ne partage pas les opinions de tous, mais la plupart me semble des parents soucieux du bien-être de leur enfant, investis, semblant accorder à leur éducation une importance minimalement "correcte" (j'ose à peine apposer d'étiquette).

Le portrait que me dresse des parents le personnel de l'école est tout autre. Beaucoup trop de parents sont laxistes quant à l'éducation de leurs enfants, trop peu impliqués, peu coopératifs, nourrissent mal leur enfant, les sous-habillent en hiver, ne respectent pas les conventions implicites et explicites de l'école, etc.

Encore une fois, je demeure perplexe. Est-ce que je vis vraiment dans ma bulle?

Suis-je si naïve?

mardi, novembre 14, 2006

Tendres moments

Le trajet vers Sherbrooke est toujours à la fois angoissant et excitant.

Angoissant parce que malgré le portrait quotidien que m’en dresse sa femme, je ne conceptualise pas facilement l’état physique et psychologique dans lequel je trouverai mon père et qu’en dépit du fait que le cancer soit à présent tout gratté, je ne peux m’empêcher d'appréhender que je me dirige vers lui pour une dernière fois.

Excitant parce que c’est toujours un soulagement merveilleux de le serrer dans mes bras, de le voir vivant et de percevoir dans ses réactions à ma vue cette joie partagée (qui ne la ressentirais pas?).

Hier, c’est avec une indescriptible émotion que j’ai entendu le son de sa voix au téléphone. De petits sons, mais c’était bien sa voix, que je n’avais pas entendue depuis son opération. J’ai pu percevoir l’enthousiasme dans son ton lorsqu’il a validé auprès de sa femme que je venais le voir.

« Oui oui, ta fille s’en vient te voir, elle sera là en fin d’après –midi ».

Inutile de se forcer pour parler, c’est déjà assez difficile pour lui, mais me savoir attendue avec impatience et sentir sa joie au bout de fil a décuplé ma hâte d’arriver au bout du long trajet.

Pour l’occasion, j’ai retiré mes moussaillons de l’école pour l’après-midi. Quelle joie de rater l’école pour aller jouer avec les Légo super cool de mamie et passer une journée privilégiée avec grand-maman! Mon grand devait dire adieu à son cours d’arts plastiques, l’apogée du bonheur scolaire pour lui, mais bon, dans des moments comme ceux-là, coûte que coûte, on s’organise!

Quelques heures plus tard, je suis enfin arrivée à l’hôpital sur l’étage de papa. Mon cœur s’affolait de la même façon que si j’avais un rendez-vous galant, mais c’est à la rencontre de mon père que j’allais.

J’ai vu sa femme au bout du corridor. Elle a souri, nous a envoyé la main. Je suis entrée dans la chambre et mon cœur battait un peu plus fort. J’ai aperçu papa assis dans une chaise roulante. Son visage bouffi s’est illuminé lorsqu’il m’a vue. Je lui ai souri et il m’a serrée dans ses bras.

Je n’aurais pu le reconnaître si je l’avais croisé sur la rue. Je n’aurais jamais soupçonné un visage humain (tant connu et tant aimé de surcroît) d’avoir la capacité d’enfler à ce point. Ses beaux yeux bruns étaient réduits à de simples petits traits. Sa femme m’a confié : « Je suis contente que tu le vois comme ça. Si tu l’avais vu hier! Son visage était trois fois pire. » Ce que j’ai vu était assez inimaginable, imaginer trois fois pire était impensable.

Nous avons parlé. Sa trachéotomie ayant été recousue, j’ai pu converser avec lui autant cela se pouvait. Je l’ai entendu faire de son mieux pour parler avec sa nouvelle langue. Je devais être très attentive pour bien comprendre ses mots.

Cela m’émouvait d’être près de lui, impuissante et bienveillante à lui caresser la cuisse. Il y a huit mois, dans cette chambre d’hôpital où nous bercions le corps vide de notre petit garçon envolé durant la nuit, la situation était inversée : c’était papa qui était assis près de la mère effondrée que j’étais et qui me caressait la cuisse en silence, trop impuissant et effondré lui-même pour pouvoir dire quoi que ce soit. Qu'aurait-il pu dire de toute façon? Dans une situation comme celle-là, la solidarité est silencieuse. Seule la présence compte.

Et puis, comment réconforter son enfant qui vient de perdre le sien quand on a soi-même le cœur en miettes? C'est le comble de l'impuissance. Pour un parent, cela doit être atroce et demander une force hors du commun, mais nous avons besoin de cette force. Dans ces moments où simplement vivre devient insoutenable parce que l’on est amputé d’une partie à la fois essentielle et indépendante de soi-même, toutes les forces de l'entourage deviennent vitales.

Ainsi, c’est à mon tour d’offrir mon épaule et pour tout dire, j’en ai autant besoin que lui. Hier, nous avons parlé. Pas beaucoup de mots. Juste les nécessaires.

Papa ne se souvenait plus s’il avait signé sa carte de don d’organe. Sa femme lui a dit que oui, il a hoché la tête comme pour nous dire « Parfait, voilà une bonne chose de réglée».

Il a profité d’un moment d’absence de sa femme pour se dépêcher de prendre ma main entre ses deux mains enflées pour me regarder tendrement à travers les deux petits traits qui lui servent de yeux. Deux grosses larmes ont obstrué les minuscules trous et avec beaucoup d’amour, il m’a murmuré en ne lâchant pas ma main : « Ton frère et toi, vous êtes les deux plus grandes réussites de ma vie » (ce que mon amoureux a commenté par un « Je ne sais pas pour ton frère, mais en ce qui te concerne, je suis tout à fait d’accord avec ton père! » (mon homme a assez souvent raison, je dois l’avouer). Papa a étouffé son sanglot, puis sa femme est revenue.

J’imagine que dans de tels moments de souffrance, on ne peut faire autrement que de faire un genre de bilan de notre vie, regarder en arrière et qualifier l’ensemble de ses accomplissements.

Nous avons été marcher dans le corridor. Papa se tenait à sa petite femme jusqu’à ce que je me propose comme une béquille beaucoup plus appropriée pour ses 6’2". Il était émotif. Cher papa… Après sept jours presque entiers sans sommeil, comment garder un moral d’acier? On flancherait à moins. Je lui ai proposé un massage de la nuque et l’idée lui a plu.

Au retour à sa chambre, il s’est étendu. Je me suis assise près de lui sur le lit et doucement, j’ai massé sa nuque et son cuir chevelu, là où la tension s’accumule toujours. Après quelques minutes, il s’est endormi. Je le regardais, maigre et soudainement abandonné et vulnérable. J’avais l’impression de m’occuper d’un de mes enfants.

Nous avons éteint les lumières, l’avons embrassé, lui avons laissé un mot sur le tableau magique, puis nous sommes repartis vers la métropole.

Ce soir, je ferai téléphoner ses petits-fils. Papa m’a dit qu’il serait heureux d’entendre leur voix.

lundi, novembre 13, 2006

Chicane de fratrie

Journée efficace, soirée bien remplie, mais tranquille.

Maman roule ses sushis en se délectant à l'avance.

Les quatre grands garçons arrivent de chez leur père. Ils saluent maman, discutent un peu, puis la fratrie se divise: le tyran de 12 ans, Candide de 7 ans et Petit Caractère de 5 ans d'un bord (dit le clan du lapin) et Boute-en-train de 9 ans (dit le clan de cochon d'Inde) de l'autre.

Le clan du lapin va s'installer dans une chambre pour construire une base de Légo vraiment cool avec un champ de protection invincible.

Le clan du cochon d'Inde tente de s'approcher pour participer à la construction, mais on le rejette illico.

Ça, c'est vraiment dur: lui qui partage, est conciliant, généreux, attentionné aux autres, voilà qu'on oublie tout de ses égards passés et on l'ostracise cruellement sous prétexte qu'il leur faut un ennemi pour tester la résistance du champ de protection rouge (en réalité, maman sait bien que l'unique raison est que son aîné ne veut pas de son frère le plus âgé, qui lui s'affirme plus que les autres...aucune démocratie pour un tyran, c'est la dictature, point à la ligne).

Le clan du cochon d'Inde est triste et va chercher son petit animal -un cochon d'Inde, vous l'aurez deviné. Tristement, il le colle dans le creux de son épaule et le caresse en lui confiant sa désolation que ses frères le mettent de côté ainsi.

Il marche de long en large du couloir en lui sussurant tendrement : "T'es la plus belle animale de la maison, oui Gripoil, t'es la plus gentille... Au moins, toi tu es mon amie..."

En backround et à la rescousse de leur mascotte, les membres du clan du lapin s'écrient: "Aaargh! Jamais d'la vie! Grimpp est bien plus belle que Gripoil, bien plus douce aussi...Gripoil, elle est même pas belle!"

S'ensuit une série d'insultes -que je tairai ici- contre les deux petits animaux de part et d'autre des clans. On cherche à blesser l'ennemi par la porte ultime de la vulnérabilité: le cochon d'Inde et le lapin. Pis encore, on porte atteinte à leur intégrité physique.

Aucun des clans ne voulant admettre la suprématie de la beauté de l'animal du clan opposé, maman décide d'intervenir.

Après analyse de la situation, elle choisit d'enrayer le problème à sa source: le grand tyran sournois qui encourage les petits à insulter l'animal pour blesser son petit propriétaire. Il doit donc quitter la chambre et se diriger vers la sienne, ce qu'il exécute fidèle à son habitude, en traînant de la patte et en maugréant que c'est injuste, qu'il n'a rien fait, qu'il est toujours puni pour les autres.

Maman fait la leçon aux petits. Elle trouve cela très mesquin de leur part de rejeter Boute-en-train ainsi sous aucun motif, uniquement parce que le tyran l'a décidé. Elle leur rappelle la bonté du Boute-en-train, qui les accueille toujours dans sa chambre et partage quotidiennement tout ce qu'il possède de plus précieux avec eux. Elle n'admet absolument pas qu'ils puissent accepter de proférer des insultes à l'endroit de son animal pour l'atteindre, tout cela parce que Tyran initie le bal et les encourage à le faire. Elle leur rappelle qu'ils ont toujours le droit de protester face à un tyran, que ce soit lui ou un autre.

La tempête semblant calmée, le message semblant être entendu, maman retourne à ses sushis.

Elle entend -et écoute- avec intérêt la discussion qui se poursuit dans la chambre tandis que Boute-en-Train s'est installé naturellement sur le plancher avec ses deux petits frères pour continuer la Super Base:

(Boute-en-train)-(...) Pourquoi vous vous laissez manipuler par lui? Il vous fait faire tout ce qu'il veut et lui ne partage jamais rien avec vous, ne vous laisse même pas aller dans sa chambre. Il se permet tout ce qu'il veut avec vous et vous acceptez tout, pourquoi?

(Candide)-Ben (soupir).... Il veut venir nous construire des bases... (haussement d'épaules)...

-En plus, vous faites comme lui quand il insulte Gripoil, ça c'est vraiment pas correct, ça me fait de la peine. Peux-tu m'expliquer, Candide, pourquoi le matin, tu me supplies de te laisser prendre Gripoil et tu te plains que je ne te la laisses pas assez et que là, ce soir, tu te mets à l'insulter?

-Tu as insulté Grimp toi aussi. Tu as dit qu'elle n'était pas belle.

-C'est parce que vous ne m'avez pas laissé entrer. Comprends-tu ce que je te dis pour le Tyran? Il ne te donne jamais rien en retour, il n'est même pas gentil avec toi alors que moi, oui. Je suis juste.

-Je l'sais... Mais t'sais, quand le Tyran entre dans ma chambre et que je lui demande de sortir, il le fait jamais.

(Petit caractère)- Même, quand on lui demande de sortir, il nous dit "non"!

-Il faut pas que tu te laisses faire! Toi non plus Petit Caractère! Il vous MANIPULE. Il vous fait croire qu'il veut vous construire une base pour vous, mais la vérité, c'est que lui n'a plus de Légo et qu'il se sert des vôtres parce qu'il a envie de construire. Il s'impose. Comprenez-vous?

Les deux petits affirment que oui.

-À partir de maintenant, vous suivez mes directives envers le Tyran?

-Quelles directives?

-Celles que je viens de vous donner! Vous NE vous laissez PLUS manipuler juste parce qu'il est le plus vieux!

-(...)

(Boute-en-train)-Maintenant, vous n'insultez plus mon cochon d'Inde...

-Et tu n'insultes plus Grimp!

-Entendu mon pote. On se serre la pince?

-(...)

-Elle est là ma pince, Gros Lard!


Conclusion: Tous les diplomates ne peuvent être parfaits.

vendredi, novembre 10, 2006

Coiffeuse story

Autant le dire tout de suite, ma coiffeuse est "particulière". Ses commentaires sont spontanées et la plupart du temps pleins de jugements.

Si certains adoptent le très original leitmotiv: "Pis, quoi de neuf?"pour amorcer une discussion sans trop d'efforts, le : "Pis, es-tu encore enceinte?" a la cote auprès de ma coiffeuse.

Ainsi, tous mes soins capillaires débutent de la sorte:

-Salut Grande-Dame, entre!

-Bonjour! Comment vas-tu?

-Oh, ça va, ça va, ben il faut, hein, on n'a pas le choix (ça me fait toujours sourire).

- ...

-Ouin! (moue mi-dégoûtée/mi-désespérée) Ça fait un bout que t'es pas venue hein! (Elle prend une mèche de mes cheveux et la laisse retomber avec un soupir d'incertitude.)

- ...

-Bon! Qu'est-ce qu'on te fait?!! T'es vraiment due pour un bon rafraîchissement. (Elle regarde plus attentivement mes cheveux, fait une moue interrogative) Est-ce...est-ce que tu as retouché à tes cheveux?

-Oui, oui, j'ai coupé un brin mes pointes.

-Fiou. J'avais peur que ce soit moi qui ai coupé ça croche comme ça.

(Je souris de l'habituelle indélicatesse de la remarque)-C'est vrai que tu as vraiment la touche pour me faire quelque chose de beau.

(Sur un ton de grande évidence)- Ben, c'est sûr hein, je suis coiffeuse, c'est mon métier. Ça fait presque vingt ans que je fais ça.

- Bon! Ma chérie, j'ai en tête quelque chose qui t'irait vraiment bien!

-Ah bon...détaille...

Elle m'explique (c'est son métier, elle est coiffeuse) et on passe au lavabo.

Tandis que j'ai la tête sous l'eau -Pis. Comment vont les enfants?

(Je vois venir le sempiternel même sujet)-Très bien.

(lave-lave, frotte-frotte, rince...)

-Mais là... T'es pas encore enceinte hein?

-Non.. Pas pour l'instant.

-Fiou. Parce que là, ça t'en fait beaucoup... Des grosses familles, on ne voit plus ça souvent aujourd'hui. Moi j'en ai juste un pis je ne revivrais pas une autre grossesse... Ben écoute, j'ai été malade tout le long!

-Ah, c'est dur. J'ai moi aussi toujours eu beaucoup de nausées...

-Pis mon bébé, il était gros. DIX livres! Tu sors pas ça comme tu veux...J'ai été obligée d'avoir une césarienne!

-Tu sais, les miens pesaient plus de neuf livres et ils sont sortis naturellement...

-Mais le mien, on se parle de DIX livres.

-(...)

(coupe-coupe...)

-Ils sont beaux tes enfants.

-Merci. Ton fils est charmant aussi.

-Ben oui! Il est vraiment beau mon fils! Ben c'est sûr hein, j'ai eu une césarienne, sa tête était ronde-ronde! Certaines clientes me montrent les photos de leur bébé, et ils sont vraiment pas beaux.... J'ai de la misère à leur dire la vérité...

-Les nouveaux-nés sont rarement beaux. Plusieurs de mes enfants étaient affreux à la naissance.

-Heiiiin? Pauuuvre toi! Pas le mien. Il était vraiment beau... C'est sûr hein, césarienne...

-(....)

-Faque là, c'es-tu fini les bébés?

-Je ne sais pas. J'ai besoin de passer à autre chose, mais en même temps, je demeure ouverte... Je ne suis pas vraiment prête maintenant...

-Ben pauvre choueeeette! C'est sûr! T'es en deuil, donne-toi le temps! Et puis tu sais, ton fils mort, tu ne pourras jamais le remplacer!

-Si je fais un autre bébé, ce ne sera pas pour remplacer mon fils. Juste pour scandaliser le monde un peu...voir la tête de mes voisins...

(scandalisée)-Ben arrête donc toi!!! Tu ferais pas ça!?!

(sourire amusé) -(...)

-Tu me niaises là? Écoute ma beauté, c'est bien beau les bébés, mais il faut savoir s'arrêter!

-Pourquoi?

-Ben.... Parce que... Écoute, c'est pas facile aujourd'hui! Le monde aujourd'hui là..... Hein... C'est plus ce que c'était...Et puis ça coûte cher les enfants...

-(...)

-Et ton ex, il te paie une pension j'espère? (Elle attend)

-...Hum.

-Je sais pas combien il te donne, mais ça coûte cher les enfants...

(Dans ma bulle, je souris)

-Tu dois avoir de bonnes allocations aussi... Tsé, cinq enfants... (Elle fait une moue suggérant un montant substantiel)

-(...)

(attendant impatiemment la réponse)-Mais là, est-ce que vous prenez des moyens contraceptifs?

(prise au dépourvu) -Euh...

-J'espère que vous en prenez, parce que fertile comme tu es, tu vas m'annoncer que t'es enceinte à ta prochaine visite...

-(...)

-Oh, je voulais te dire, je t'ai vue chez Maxi la semaine dernière!

-Ah...

-Moi c'est extrêmement rare que je vais là-bas. Je vais habituellement chez IGA. Mais toi, avec ta gang, je te comprends d'aller chez Maxi. Le service est moins bon, mais ça coûte moins cher...

(éclat de rire) -Coiffeuse, tu es pleine de préjugés!

-Ben quoi? C'est vrai que ça coûte moins cher chez Maxi !?

-Tu prétends que je vais chez Maxi parce que ça coûte moins cher alors que j'y vais parce que c'est tout près de la maison. Erreur sur mes motifs.

-En tout cas...

-(...)

-Et voilà ma belle! Qu'est-ce que t'en penses?! C'est beau hein! J'suis pas mal contente... C'est sûr que ça te fait du bien...

-C'est trrrès joli! Ouais, j'aime! Tu as vraiment du talent!

-C'est mon métier, hein! Bon, bon automne! Est-ce qu'on se revoit avant Noël?

J'adore cette coiffeuse. Rien à rajouter.

mardi, novembre 07, 2006

Réflexions

DE MAGASINAGE

En passant devant d'onéreuses horreurs de Noël gonflables: y a vraiment une clientèle pour ce genre de mastodontes de vinyle?

À en croire mes voisins de plus en plus nombreux, hélas...

***

En passant devant un superbe petit jeans grandeur 3 ans: Oh qu'il aurait été beau! Ses petites fesses auraient été exquises avec le design du derrière du pantalon. Il porterait du 3 ans aujourd'hui, mon costaud de petit homme.

Ça me manque de lui acheter de beaux petits morceaux, des petites surprises impulsives au gré du magasinage, des jouets qui l'auraient amusé. Ça me manque cette simple possibilité de penser que si j'achète tel truc en pensant à lui, ce sera utilisé.

Lorsque j'achetais du chocolat et que je rentrais à la maison, j'en gardais toujours quelques morceaux pour lui. Je lui tendais en souriant et il me regardait avec un stoïcisme apparent, mais ses yeux parlaient pour lui et il les prenait naturellement et me tendait ensuite la main en me demandant "encore olat".

Son intense regard brun foncé était toujours si conscient, si mature. Vingt-trois mois, mais une incroyable lucidité dans le regard de ce sublime enfant.

Il y a un si grand trou, un si grand vide à présent entre mon fils de 5 ans et mon bébé d'un an... J'y pense continuellement, en filigrane derrière tout ce que je fais.

Je disais à mon homme hier que l'on devrait pouvoir avoir, disons deux après-midis par année, le droit et la possibilité d'aller le chercher là où il est pour passer un peu de temps avec lui, pour s'ennivrer de lui et nous permettre de vivre sereinement six mois de plus.

Deux intenses demi-journées par année, ça me semble raisonnable, ne pensez-vous pas?


DE MON FILS DE CINQ ANS

(en mangeant sa viande trop dure)

"Maman, y a du bruit dans ma viande, je veux pas la manger."


DU MATIN À LA GARDERIE

En regardant la belle Louna à la garderie hier: ça y est... Elle vient de franchir l'âge éternel de mon fils. Vingt-trois mois et sept jours. Elle avait désormais une journée de plus que lui, elle venait désormais de devenir plus âgée que son grand ami Thomas.

Je la regardais, belle, frisotée, délicate et si volubile et me disais que ses parents étaient choyés (d'une "chance" que l'on croit à tort acquise, je le sais maintenant) d'avoir été chercher dans son lit au matin leur petite fille vivante.

On se méfie du sommeil uniquement pendant la période à risque de la mort subite du nourrisson, pas pour un enfant de vingt-trois mois. Et c'est correct ainsi, il ne faut pas virer fou, on est déjà assez inquiets pour eux pour plein d'autres raisons! Les morts subites d'un enfant plus vieux pendant le sommeil sont extrêmement rares, mais ça nous est quand même arrivé. On ne s'attend pas à trouver son enfant si délicieusement vivant la veille mort dans son lit au matin.

Elle fêtera bientôt son anniversaire, la petite, et elle soufflera ses deux bougies comme notre Thomas n'a pu le faire.

Je ne suis pas amère du bonheur des autres, mais uniquement plus consciente de ce qui n'est pas acquis, même si ça devrait aller de soi. Plus consciente aussi que la présence près de nous de ceux que l'on aime est un immense privilège. Je sais maintenant qu'on peut difficilement savoir ce qui nous pend au bout du nez et que l'on devrait profiter à fond de ce qui nous est précieux aujourd'hui.

dimanche, novembre 05, 2006

Solitude et dignité

La semaine dernière, nous avons été lui rendre visite. Elle était dans la grande salle de son Centre, à discuter avec une amie tandis que ses comparses dansaient un continental sur He's got the world in his hands.

Surprise, elle a mis quelques minutes à réaliser que ces deux jeunes gens qui avançaient vers elle étaient son petit-fils et son amoureuse. Spontanément, lorsqu'elle nous a reconnus, elle s'est levée, a posé sa main sur son coeur comme pour lui ordonner de se contenir un peu, a demandé où était son arrière-petit-fils, n'a pas attendu la réponse et tendrement, a serré le beau grand jeune homme devant elle dans ses bras.

J'ai une affection naturelle pour cette petite femme à la fois forte et vulnérable. Toujours bien mise, coquette aux yeux bleus si lucides, elle est observatrice et sensible aux qu'en-dira-t-on. Elle porte son histoire, ses drames, ses amours et ses déchirures. Elle continue dignement, malgré ses trop nombreux moments de solitude.

Dans son Centre, ils sont des centaines de Solitudes comme elle à porter leur histoire et qui, lorsqu'on les regarde, nous apparaissent comme de simples petits vieux faibles et malades. L'Âge d'Or, qu'on dit.

Dans les ascenceurs, ils se saluent, connaissent des bribes de l'histoire de chacun, se demandent des nouvelles. Dans la cafétéria, ils y a des cliques, des prises de bec, du commérage et des affinités, à la même manière que dans les cafétérias scolaires ou la salle des employés de toute entreprise.

Ces Solitudes me touchent.

Je porte cette même compassion, ce même respect envers toutes ces histoires tues ou trop peu connues parce que je ne connais pas tous ces gens. Je me sens toujours honorée de faire sourire quelques vieux dans les ascenseurs parce que j'ai avec moi un ou quelques uns de mes enfants et que la plupart de ces personnes semblent se sentir revivifiées à la vue d'un petit bébé ou d'une si charmante marmaille.

J'avais le même sentiment pour la mère de la femme de mon père -ma grand-mère adoptive, vieille allemande d'origine ukrainienne venue s'installer ici durant la Deuxième Guerre. Son sourire était toujours radieux lorsque j'allais la visiter, son étreinte toujours sincère.

Elle me racontait sa vie dans les camps de réfugiés avec ses quatre enfants, la façon dont ils avaient fuit l'Allemagne, la manière dont elle avait dû s'y prendre pour étirer chaque jour le seul et unique biberon de lait dont elle disposait pour son fils de neuf mois. Elle me faisait l'immense flatterie de me dire que mon courage avec tous mes jeunes enfants lui rappelait, chaque fois qu'elle me voyait, le courage qui l'avait animée elle-même pour sortir à tout prix ses enfants de l'Allemagne pour leur propre survie. J'étais, évidemment, bien indigne de recevoir des compliments d'une femme si exceptionnelle.

Et que dire de ma grand-mère, femme de la terre, jardinière, exquise petite femme aussi forte et fragile aujourd'hui que les autres, qui était le centre de l'univers familial de ses neuf enfants et de leurs propre marmaille, charmante femme encore aussi amoureuse de son homme à 80 ans, le regard longtemps allumé, l'esprit vif et l'humour pervers à travers ses manières de femme respectable. Elle nous raconte aujourd'hui ses anecdotes avec de moins en moins de lucidité et je dois lui rappeler chaque fois je suis la fille de laquelle de ses filles.

Une autre grande femme, une autre grande Solitude. Et un autre regard à la fois admiratif et désolé de ma part pour la déchéance de la vie qui semble vouloir balayer la grandeur de ces femmes pour ne leur laisser que leur vulnérabilité une fois la vieillesse arrivée.

J'en suis si désolée, je prendrais mes journées pour aller les visiter, les écouter, leur offrir mon intérêt. Tant d'histoires comme tant de capital humain qui risquent de basculer dans l'oubli.

***

Ce fut la même impuissance et la même désolation qui m'ont habitées hier au 10e étage de cet hôpital. Sauf qu'il ne s'agissait pas de mes grand-mères ni d'aucune Noble Vieillesse, mais de mon propre père de soixante-deux ans.

Un coup de poignard. Une désillusion sur la vie. La porte grande ouverte sur la déchéance et l'indignité. De la tristesse. Et beaucoup de révolte.

D'entendre mon père il y a encore quelques jours me dire en toute conscience qu'il attendait avec impatience cette opération, que la douleur infligée par le cancer, il ne pouvait plus la supporter davantage et que oui, il consentissait dorénavant à cette méga-chirurgie très complexe... et de le voir par la suite dans un état aussi pitoyable.... Aucun mot ne me vient. Que des émotions.

Mon père est un homme important. D'abord dans mon coeur. Mais il était aussi un grand enquêteur respecté, estimé socialement et décoré plusieurs fois. Un homme vraiment beau, jadis vivant jusqu'à la moëlle, intéressant, conservateur, drôle, orgueilleux et charmeur. Un charismatique guitariste, un accordéoniste merveilleux. J'aurais vachement aimé hériter de son oreille musicale, mais non, moi, j'ai besoin de partitions.

Je le vois si fier et si digne dans son bel uniforme rouge, si droit et le sourire si enjôleur à toutes les fois que l'on a valsé ensemble alors que ses gouttelettes de sueur dégoûlinaient sur mon front et que ça me faisait sourire aussi. Il y avait beaucoup de complicité dans nos regards.

Hier, c'est à la fois péniblement et avec hâte que j'ai marché jusqu'à lui au bout de ce corridor d'hôpital.

Je suis allée jusqu'à cet homme branché de partout et j'ai dû réprimer bien bravement mon envie de pleurer de tant de dépit. Avec mon coeur, je savais bien que c'était mon père, mais ce que je voyais était si désolant, si triste.

Toussant par le trou dans sa gorge, s'étouffant avec ses sécrétions, le visage enflé, la bouche serrée parce que trop douloureux de l'ouvrir, couvert de tubes et de fils, le bras gauche, la cuisse gauche, la gorge, le menton et la lèvre inférieure brochés, il n'avait que son regard déconfit à offrir.

De l''observer remuer faiblement les lèvres en semblant penser que nous comprenions ce qu'il tentait de nous dire fut douloureux. Et non, les petits gestes incohérents qui accompagnaient le mouvement subtil de ses lèvres ne nous aidaient pas. J'osais à peine lui dire que je n'arrivais pas à comprendre ce qu'il voulait; il y mettait tant d'efforts! Mon frère et moi, après avoir tenté un peu d'humour pour entretenir son moral et nous faire encourageants, étions près de lui à tenter de constituer des mots à partir des lettres que notre père nous pointait sur une feuille.

Nous nous regardions, cherchions un consensus, comme les joueurs d'une équipe d'un triste quizz. Nous avons réussi à comprendre quelques mots-clés, avons spéculé sur le reste. Impossible pour papa de communiquer: toute demande de sa part étant véhiculée via le médium de la douleur, ce dernier finissait par voiler le message lui-même.

La révolte et le dépit ne me quittent plus. De voir mon si précieux papa la jaquette à moitié attachée à cause des innombrables tubes heurte son essentielle dignité, mon essentiel besoin de dignité pour lui.

Lui, au degré de souffrance où il se situe, à demi lucide à cause de la morphine, que lui importe de devoir vider sa vessie la porte ouverte juste devant le poste des infirmières? Ça lui demande tant d'efforts de nous réclamer un peu d'eau -que nous devons lui refuser cruellement à cause de sa trachéo, userait-il de ses dernières énergies pour demander qu'on ferme le rideau afin qu'il puisse pisser dignement? Bien sûr que non.

Juste avant de partir, nous essayions d'étirer le temps encore un peu. C'est déchirant de laisser derrière une personne que l'on aime tant.

Juste avant notre départ, papa était agité. On venait de lui donner un calmant. La douleur et les sécrétions l'empêchaient de dormir. Il se redressait brusquement dans son lit, cherchait du regard quelque chose qu'il ignorait probablement lui-même. Sa femme et moi caressions chacune de notre côté son dos nu.

Il se recouchait doucement, tentait de remuer doucement les lèvres. Désolées et compassives, nous ne percevions aucun son. Il a fermé les yeux, en quête inavouée d'un peu de repos. Je caressais doucement sa joue pîquante et enflée. Il ne bougeait pas, semblait apprécier. J'avais espoir que ma caresse lui soit agréable. Il semblait calme. Je continuais. Sa femme me dit doucement: "Regarde Grande-Dame, il sourit."

Je tentais de percevoir le sourire et avec un effort, j'y parvins. Un subtil sourire à travers un visage ravagé par la douleur et la confusion.

Combien d'hommes, combien de femmes dans les hôpitaux sont en quête d'une caresse, d'une présence réconfortante?

Avec les 180 km qui me séparent de son hôpital, je suis bien impuissante. Je m'organiserai cette semaine pour retourner près de lui. Je tolère mal que la dignité de mon père puisse être hypothéquée, même l'espace des quelques nécessaires semaines à l'hôpital. La vision que j'ai eue de mon grand homme de père réduit à cet état à cause des vices qui l'ont accompagné à travers les années me remet les priorités à la bonne place.

vendredi, novembre 03, 2006

Pssst!

Vous voulez savoir ce qui se passe chez moi à cet instant précis? Vraiment?

La salle de bain est en train de se laver toute seule sans que je n'aie à lever le petit doigt. La femme de ménage est même en train de nettoyer l'intérieur de la pharmacie, chose qui n'a pas été faite depuis...

Pas que je sois embarrassée, non pas du tout, mais changeons tout de même de sujet, voulez-vous.

Et moi, que fais-je? J'organise mon travail et je rédige en respirant par le nez (chose d'ordinaire extrêmement ardue) et en poussant l'audace jusqu'en le faisant en sirotant avec quasi-désinvolture mon Amarula.

Tout ça en plein après-midi, dans un calme impeccable, avec Richard Desjardins en arrière-plan. C'est tellement merveilleux!

Je risque d'y prendre goût. Mais c'est un risque que je suis entièrement prête à assumer.

J'adore les vendredis après-midi.

jeudi, novembre 02, 2006

Les ambitions des uns...

Ambitieux, mon homme convoite dans ses fantasmes les plus avoués depuis un certain temps la place et les fonctions de cette femme.

Avec son charisme, sa prestance, ses merveilleuses aptitudes pédago-historico-politiques, sa sagacité, son articulation sans failles, son art du discours et son charme, il pourrait aisément la surclasser.

Mais pas maintenant. Question de timing.

Je fus quand même bien surprise de voir cette femme de l'autre côté de ma porte d'entrée hier en plein après-midi.

J'étais à la fois amusée et désolée que mon homme vienne tout juste de descendre se reposer; il aurait sans doute été fort heureux de discuter avec elle, question d'étudier de plus près sa future rivale au sein même du comité exécutif de notre circonscription.

Dès que j'eus refermé la porte, je descendis donc narguer mon amoureux avec celle qu'il venait de rater: la candidate à l'investiture... qui tranquillement commençait à assurer sa présence, sa visibilité dans le secteur...

Navré, il m'écouta tout de même attentivement détailler son allure. "(...) Et puis (argument facile!), avec tes aptitudes oratoires et ta superbe voix, tu pourrais la clancher facilement (ne serait-ce qu'au niveau de la séduction de l'électorat): elle zézaie!!"

Mon homme, soudainement très éveillé, considérait attentivement ce qu'il venait de laisser passer lorsque je sortis de la pièce et croisai mon fils de douze ans qui, méfiant des bribes de conversation qu'il venait d'entendre, m'interpella: "Maman, mon exquis-beau-père-que-j'adore veut faire de la politique?"

-Il adorerait!

(le regard terrifé)-Ah non, maman!!! Tout le monde va se mettre à nous haïr!!!

Voilà. Voilà le prix à payer pour les ambitions des uns...

mercredi, novembre 01, 2006

Ostracisme: quand les enfants de familles nombreuses sont victimes

Je ne compte plus les fois qu'elle nous fait le coup.

La première fois, j'ai passé l'éponge, J'AI réparé SON oubli et préservé SA réputation à partir de MON budget.

La deuxième (troisième, quatrième...) fois, j'ai dû, fortement désolée (mais tout de même en m'efforçant d'avoir l'air désinvolte), expliquer à mes enfants la probable raison de sa non-visite. J'ai spéculé qu'elle devait avoir un quota de dents à respecter pour chaque nuit, que malheureusement, ça adonnait qu'ils débordaient du quota pour cette nuit-là et qu'il faudrait probablement attendre la suivante.

Je me suis trompée, semble-t-il, car elle omet maintenant de laisser quelques sous même après que certaines dents eûrent passé plus de TROIS nuits sous l'oreiller. J'ai beau lui mettre des mnémoniques dans la maison, ELLE NE SE POINTE PAS.

Or, au point où on en est, j'en suis à penser qu'elle nous ostracise sous prétexte que l'on est une grande famille et qu'elle a déjà suffisamment donné (et dans le temps, elle était assez généreuse merci... elle n'avait probablement pas encore réalisé la beurrée que ça allait lui coûter sous mon toît à ce rythme-là) à mes deux premiers fils.

Je vais vous dire, je suis assez révoltée car actuellement, ce sont les plus jeunes qui paient pour sa négligence. J'ai actuellement ici deux enfants qui perdent régulièrement des dents, un pour qui ça ne devrait pas tarder et un qui prend le temps de laisser pousser les siennes avant de les perdre.

Je fais quoi en attendant moi? J'ai beau entretenir sa notoriété, ce n'est plus de gaieté de coeur si je le fais si elle n'y met pas un peu du sien.

Ne devrait-il pas y avoir une Fée des Dents juste et bonne, qui applique la même générosité à TOUS les enfants, qu'ils soient enfants uniques ou issus d'une famille nombreuse?

En attendant, je songe sérieusement à aller au privé... elle serait peut-être plus fiable...