vendredi, août 29, 2008

Animale

À chacune de mes grossesses, une métamorphose animale surgit en moi.

Je ne suis plus toute volonté, toute liberté, tout contrôle de moi, toute câline. Je deviens pulsions. En alternance avec mon moi naturel, parfois.

Je deviens louve, lionne et chatte. Je me retourne, je grogne et je mords. Je me creuse une tanière et m’y terre, aussi.

Au besoin, je chasse. Je chasse de mon territoire ceux dont le discours, les gestes, les agissements ou la tendance à toujours tout savoir mieux que les autres m’énervent.

Il m’arrive de chasser aussi ceux que j’aime. Au début et en fin de grossesse, à chaque fois, comme la veuve noire, je ne supporte plus mon mâle. Je deviens assassine. Je pourrais tout assumer seule la suite sans jamais revenir en arrière (au prix d’une éventuelle grande peine d’amour, contrairement à l’araignée). Et cela n’est surtout pas une question d’amour!

C’est une intolérance à l’Homme. Pas n’importe lequel: celui qui a eu le culot de "m'infliger" ce pénible état. Ce sont des élans d’agressivité, d’indépendance, de douceur, de besoin de cocooner, de m'enfuir et d’être chouchoutée si grands qu’ils sont incompatibles entre eux et me font violence.

Cela est éprouvant. Je ne tolère plus le chaos intérieur et les paradoxes de fins de grossesse.

Après la naissance de mes bébés, animale je demeure. Je les surveille, je les guette, je les bichonne, je leur murmure des mots sucrés, je les respire, je me gave d’eux et ne supporte guère l’éloignement. La symbiose est totale. Comme j’ai souffert, à mon premier bébé, de voir mon beau-père se ruer sur moi pour venir me l’arracher des bras quelques heures après sa naissance! Il venait littéralement de m’arracher le ventre, je me serais effondrée de douleur et de désespoir!

Comme une animale, j'anticipe à la seconde près l'heure de la tétée et je ne tolère pas qu’on laisse des vestiges de son odeur sur mes bébés. Exit les odeurs de parfums prononcés de « matantes », exit les odeurs de cigarette et les gros doigts sales qui font des guilis-guilis sur les joues pures immaculées de mes rejetons!

GrwaRw.

"C'est comme ça."

Moi qui me fais facilement piéger au jeu des incessants "Pourquoi??" du petit dernier par mon souci de réponse juste et adéquate, voilà ce que j'ai commencé à répondre pour éviter les épuisantes escalades.

Au troisième ou quatrième "Pourquoi?" d'affilée, il se bute dorénavant à un "C'est comme ça."

C'est presque jouissif d'enfin trouver une fin.

jeudi, août 28, 2008

La rentrée

Bien oui, je n'y échappe pas. Normal. Bien que j'apprécie l'aspect rafraîchissant de la rentrée, je trouve fastidieux de devoir remplir le même questionnaire X 4, les fiches-santé X 4, l'étiquetage X 3 (avec un peu d'aide), les chèques X 4, 5, 6.

Le matériel scolaire n'est pas encore acheté. Je viens de terminer les kits pour chacun des garçons à partir du stock que nous possédions déjà. Le reste suivra, même pas envie de me stresser avec ça, quoique le boulot abattu ce soir soit déjà soulageant.

En faisant l'inventaire des étuis de mes marmots, je me suis posé une question: à quoi bon se donner la peine d'étiqueter les crayons des miens alors que j'ai retrouvé dans chacun d'entre eux jusqu'à une quinzaine de crayons identifiés aux noms d'autres enfants ou dont les marques n'avaient rien à voir avec ce que j'avais fourni comme matériel au début de l'an passé?

Quel enfant se donne la peine de vérifier si le crayon tombé par terre est réellement à lui avant de le ramasser et de le ranger dans son étui? Pas que je sois dérangée par les mélanges de crayons mais si je peux éviter de me taper du boulot inutile...

Demain, la rentrée scolaire. Pas une journée complète, mais quand même. Cela signifie un avant-midi juste à moi.

Halleluia.

mercredi, août 27, 2008

Le désir

Comment le se*e pourrait-il être aussi délectable s'il n'y avait pas d'abord le désir? N'est-ce pas les prémisses de l'amour qui lui donnent toute sa valeur?

Les yeux qui dévorent à tue-tête, la certitude de jouir du pouvoir de plaire, les frissons qui traversent le corps au moindre effleurement et dont l'écho perdure au simple souvenir, l'odeur sublime du cou, la respiration haletante, l'urgence de l'autre si grande qu'on pourrait en pleurer, le non-verbal qui donne tout son sens aux pulsions amoureuses.

Le désir est le terreau fertile du se*e. Au moins autant que le se*e, j'aime le désir.

lundi, août 25, 2008

Le hamburger

(Eh non, détrompez-vous, ceci n'est pas un billet faisant honneur à la célèbre figure des Puppetry of the penis)

Devant le hamburger restant de notre souper, Grand-Homme demanda à l'insatiable ogre de la maison: "Un p'tit dernier Fils Aîné?"

"Non" répondit-il, "Je n'ai plus faim."

Étonné de voir l'adolescent constamment affamé refuser quelque chose de digestible, Grand-Homme insista: "Allez Fils Aîné, si tu le veux, il est à toi. Si tu le prends pas, on va le perdre!"

"Ben là!!" s'exclama l'adolescent exceptionnellement repu, "C'est quand même pas un patient sur une table d'opération!"

Refresh

Un petit refresh, ça fait toujours du bien. Ça regaillardit, ça revitalise, ça stimule, ça nous donne l'impression d'être divinement vivant.

J'ai besoin d'un méchant bon refresh social.

La semaine dernière, j'ai été souper avec une amie du secondaire que je n'avais pas revue depuis nos quinze ans. Nous avons passé une exquise soirée dont les bienfaits m'ont rendu pour quelques jours cette légèreté si mélodieuse à l'intérieur.

Il me faut tout un tas de dîners/soupers/moments comme ça.

samedi, août 23, 2008

Le plus épuisant

Le plus épuisant avec une famille nombreuse, ce n'est pas la quantité monstre de lavage à faire ni les inévitables traîneries (quoique...) ni même la gestion des devoirs ou la nécessité de faire le taxi.

Le plus épuisant, ce sont les feux à éteindre, les enfants qui revendiquent leur droit de parole tous en même temps en empiétant sur les demandes des autres pour être sûrs d'être ceux auquels on répond en premier, l'impatience qui teinte chaque demande, la sursollicitation qui ne vous accorde pas la possibilité de répondre adéquatement à un avant de vous faire interrompre pour quelque chose de bien plus capital par le revendicateur qui tire sur votre manche.

En allant chercher les quatre grands chez la femme de mon père cet après-midi (ils y étaient depuis trois jours), elle a soupiré en me disant: "En tout cas, je te lève mon chapeau!"

J'ai compris avec compassion (et une certaine gêne) par le ton employé qu'elle était épuisée, ce qu'elle me confirma au bord des larmes (elle était déjà surmenée avant de faire plusieurs activités avec eux).

Bien que les garçons aient été reconnaissants et aidants, reste que...le plus épuisant, avec les miens, c'est ce que je vous ai décrit plus haut.

"Oui, OUI, c'est ça!" s'est-elle exclamée lorsque je lui ai parlé de ce que je trouve le plus difficile. "C'est exactement ça! Ils veulent tout, tous en même temps!"

La gestion du droit de parole à elle seule est drainante. Mes enfants ont beaucoup de difficulté à le faire eux-même et beaucoup de mes phrases doivent hélas commencer par: "Il p-a-r-l-e!" ou par un index levé en guise de requête de laisser terminer l'autre avant de se mettre à solliciter (ou rapporter, ou pleurnicher, ou revendiquer...) à leur tour.

C'est à vous rendre fou.

vendredi, août 22, 2008

La nage synchronisée

Voilà bien la discipline olympique qui m'impressionne le plus, probablement parce que je ne la comprends pas.

Je ne comprends pas qu'une coordination puisse être si parfaite, réglée aussi parfaitement qu'une mélodie rapide au métronome et cela par huit nageuses à la fois, dans l'eau de surcroît alors que les repères spatio-temporels sont tout autres qu'à l'extérieur.

Je regarde leur accord parfait et me retiens au coût d'un grand effort de ne pas pleurer devant tant de grâce, de travail, de synchronisme, de technique et de fierté.

mercredi, août 20, 2008

Les idéaux amoureux

Nous avons tous, n'est-ce pas, des idéaux amoureux? Des couples dans notre entourage qui sont si beaux à voir ensemble, qui semblent si assortis, si amoureux, si équilibrés, si complices, si indépendants qu'ils nous inspirent et nous font rêver.

Ils semblent avoir du plaisir ensemble, se laisser la latitude dont chacun a besoin, ils semblent amoureux, ils ont un tas de projets, ils sont créatifs, ils s'admirent, se stimulent, ils nous font soupirer d'envie.

Puis un jour, le couperet tombe: ils se séparent et vous n'en finissez pas de vous étonner. Ils étaient votre inspiration, votre couple idéal!

Il y a quelques années, "mon" couple idéal -un couple d'amis dont l'équilibre semblait parfait- s'est séparé. J'ai décidé alors que je ne me laisserais plus berner par les apparences des couples apparemment trop harmonieux (n'est-ce pas Brel qui chantait que c'est le pire piège de vivre en paix pour des amants?).

Deux nouveaux couperets sont tombés ce soir pour deux de mes cousins préférés dont les couples étaient adorables, apparemment douillets à souhait, stimulants, accomplis. Bien que je ne les côtoie pas souvent, je n'ai rien vu venir.

Je suis facilement dûpe. Nous le sommes tous un peu. On m'a déjà dit après ma séparation d'avec le père de mes grands que nous étions le couple idéal de quelqu'un. Pourtant, je n'étais plus heureuse et j'ignore si le père de mes grands l'a déjà été avec moi.

Comme quoi pour tout le monde, les apparences...

Les salopes

En descendant me rejoindre dans sa chambre après avoir brossé ses dents, Tout-Doux: "Maman, j'ai vu deux putes dans la salle de bain."

J'ai souris de l'expression utilisée.

En réalité, ce ne sont pas des putes mais bien des salopes. Il a simplement confondu les deux.

Les salopes, c'est le nom que je donne sans pudeur à ces multitudes de drosophiles qui nous ont envahies depuis presque trois semaines.

L'an dernier, je les avais exterminées rapidement à partir du moment où j'entrepris de les noyer dans des coupes de vin gracieusement offertes.

Cette année, elles sont plus tenaces et je n'ai pas encore trouvé leur site de reproduction. Généralement, les salopes pondent leurs oeufs sur des fruits mûrs mais je ne leur en laisse guère l'occasion en nettoyant rigoureusement le comptoir et les lieux de ponte potentiels.

Généreuse, je leur offre une bouteille de sangria par semaine depuis dix jours. Je demeure toutefois perplexe: le calvaire n'est pas tant dans la cuisine que dans la chambre de Tout-Doux. Malgré la soixantaine de mouches que j'arrive à trucider dans les deux verres de sangria quotidiens, il y en a presque autant le lendemain. J'ai beau chercher, je ne trouve pas leur lieu de ponte. Il faut pourtant nécessairement un site d'orgie et une pouponnière, diantre!

Je cherche un vieux fruit laissé négligemment dans un coin de la chambre, une pelure de banane ou je ne sais quoi encore, mais chaque fois en vain.

Je les aurai les salopes!

Encourager le vice

En me regardant enfiler mon jeans ce matin par-dessus le surplus de livres ayant tristement élu domicile dans mon humble postérieur, Fils Aîné me fit remarquer qu'après la naissance du bébé, il faudrait absolument que je me remette à la course à pieds.

Bien évidemment, il avait raison. J'y songe, oh que j'y songe au bonheur de la liberté de la course retrouvée et, espérons-le, de ma/mes forme(s) d'avant la grossesse.

Je me suis réaffirmé cette certitude ce soir lorsque la femme de mon père m'informa qu'elle avait préparé spécialement pour moi une recette de son sucre à la crème au chocolat qu'elle m'apportera demain en venant chercher les enfants.

lundi, août 18, 2008

Désorganisés

Rendez-vous chez la sage-femme aujourd'hui. Notre nonchalance a besoin de se faire secouer, semble-t-il. Plus qu'un mois avant l'arrivée du bébé et je réalise soudainement tout ce qu'il reste à faire pour être prêts:

-Acheter un nouveau lit à Fred pour refiler le petit au bébé

-Vider les tiroirs du bureau de Thomas (snif snif) pour les refiler au bébé

-Réorganiser entièrement la chambre des deux petits

-Laver les vêtements de nouveau-né (cela implique de braver le bordel de la chambre de rangement pour les trouver)

-Braver ce même bordel pour trouver les accessoires de bébé et les sortir de là pour les nettoyer et préparer son nid douillet et son siège d'auto

-Effectuer les achats pour les morceaux de vêtements de base manquants

-Préparer la valise pour la maison de naissance

-Nous équiper en couches lavables et accessoires pour être prêts le moment venu

-Terminer les rénos du salon et de la salle de bain pour récupérer l'espace non utilisable actuellement

-Organiser la rentrée scolaire des quatre grands et s'armer de patience pour le boum de l'étiquetage

-Planifier la logistique à la maison et envisager quelques scénarios d'organisation pour le jour J

Actuellement, j'en suis à l'étape "cigale". J'ai commencé à préparer un peu de bouffe à stocker. L'arrivée de l'automne est généralement inspirante pour ça quoique ces jours-ci la chaleur soit plutôt accablante et donc mes élans automnaux au ralenti.

La sage-femme a sourcillé lorsque je lui ai parlé de mon "syndrome du cow-boy". Bébé est engagé, presque complètement fixé et j'ai perdu du bouchon muqueux. Comme j'accouche toujours à terme, cela ne me stresse pas outre-mesure mais la petite cloche sonnée par la sage-femme indiquait d'être prêts "au cas".

C'est là que je trouve qu'on fait dur. Laxisme total. Il y a tant de feux à éteindre au quotidien en plus des rénos, de la rentrée qui commence à déteindre sur notre organisation et de l'absorption de Grand-Homme à préparer son matériel pédagogique que le boulot à attaquer spécifiquement pour l'arrivée du bébé représente un surplus à abattre.

...Et dire que je m'amusais de l'empressement de ces mères veilleuses dont la chambre du bébé est prête six mois à l'avance. Ces femmes ont au moins le bon sens de pouvoir relaxer en fin de grossesse!

La pêche (partie 1)

Avant de vous raconter nos aventures de pêche, je me dois de vous mettre dans le bain de combien la pêche à la truite était attendue chez nous.

La pêche, bien plus qu’une activité espérée depuis longtemps, représentait une icône, un idéal, un mythe pour mes enfants.

Si la pêche fut une activité courante durant notre enfance (à mon frère et moi), à l’âge adulte, lui seul poursuivit cette activité plusieurs fois par année alors que je n’avais pas remis mes lignes à l’eau depuis mes dix-huit ans.

Dans sa passion, mon frère part régulièrement dans les fins fonds reculés du Québec pour jouir du territoire le plus sauvage possible tandis que mes cannes à pêche, tels des trophées déchus, sont rangées dans le plafond du sous-sol et font l’envie de ma marmaille depuis belle lurette.

Fils Aîné reçut pour son premier Noël –il avait trois mois- une canne à pêche de son parrain. Cette canne, après une pêche infructueuse alors qu’il était âgé de trois ans, a vite fait de rejoindre les miennes au sous-sol.

Mon frère a toujours continué à nous parler avec désinvolture de ses voyages de pêche sans se douter à quel point il faisait rêver ses neveux. Nombre de fois je lui ai demandé de les emmener avec lui afin de les y initier, mais en vain. Jamais il ne se serait encombré d’un parasite haut comme trois ou quatre pommes durant ses parties de pêche entre amis.

Tout-Doux, depuis ses trois ans, rêve de pêche, espère qu’on l’y amènera et croit à chacune de mes demandes à mon frère (incluant ici les demandes désespérées qui considèrent la pisciculture comme une pêche acceptable) que le moment de bonheur tant souhaité est enfin venu.

Il y a quelques semaines -puisqu’on est jamais si bien servi que par soi-même-, je promis à Tout-Doux de l’emmener pêcher. L’espoir dans ses beaux yeux, je ne vous dis pas!

Fils Aîné a tôt fait de réclamer de venir aussi, puis Grand-Charme également.

Il y a trois semaines, je partis donc acheter une nouvelle canne à pêche, les accessoires manquants pour retaper mes vieilles lignes ainsi qu’un permis de pêche familial. Fils Aîné, qui m’accompagnait, jubilait déjà devant la multitude d’appâts, s’imaginant déjà sortir de l’eau LE mastodonte qui allait constituer le repas du soir.

En rentrant à la maison, je lui confiai la tâche de préparer nos lignes à pêche, ce qui fut fait comme il se doit.

Une fois la canne à pêche de son premier Noël retrouvée et retapée, il mit tout son sérieux à pratiquer son lancer dans la cour sous l’œil amusé du voisin. Sa ligne, bien que lancée habilement, s’accrochait sur les divers matériaux de rénovation de la cour et dans les branches de l’arbre mitoyen, ce qui offrit un spectacle assez loufoque au voisin, à la voisine ainsi qu’à moi-même.

Le voisin brava l’orgueil de l’adolescent pour se permettre quelques conseils techniques que Fils Aîné n’écouta que d’une oreille.

Au moment de paqueter la voiture pour le chalet, Fils Aîné prit grand soin de s’occuper des lignes (de la sienne, devrais-je spécifier). (à suivre)

vendredi, août 15, 2008

Quelques signes...

...qu'il est vachement temps que le tempo de l'année scolaire reprenne:

-Les enfants se plaignent de vider le lave-vaisselle trois fois par jour (eh oui, c'est ainsi quand "toute" (m'habituerais-je un jour à ce mot triste et restrictif?) la famille est présente à temps plein!);

-L'ado devient insolent et arrogant;

-Les enfants s'ennuient et je fais le taxi presque chaque jour pour aller les conduire chez l'un ou l'autre des amis;

-Les amis aussi s'emmerdent et l'un d'eux téléphone désespérément cinq fois par jour;

-Grand-Homme recommence à aller zieuter ses courriels sur le serveur de la commission scolaire;

-Je me sens irritée par les demandes constantes des enfants et élève le ton de plus en plus rapidement lorsque je me sens harcelée par leur insistance;

-Malgré les bons moments passés avec ma gang, j'étouffe, je perds patience, le silence, le calme et la latitude pour travailler sur mon livre me manquent (parce que contrairement à beaucoup de commentatrices de ce billet, même si j'ai CHOISI de fonder une grande famille (pour la très noble raison des allocations familiales essentiellement :P), j'ai aussi des besoins de ressourcement essentiels et je ne considère nullement que cela affecte ma qualité -déjà bien imparfaite- de mère);

-Je suis amère que la spontanéité lubrique prenne le bord parce qu'il y a presque à chaque heure du jour des enfants autour du noyau amoureux;

-Je songe au budget de la rentrée en jonglant nerveusement avec les chiffres;

-Je regarde fièrement mes mousquetaires et trouve dont qu'ils ont grandit en beauté durant l'été;

-...

Quand je vous disais...

(ici)...que Tout-Doux manquait de confiance et que ses frères pouvaient faire ce qu'ils voulaient de lui...

Nous sommes en pleines rénovations. Comme nous finissons salon et salle de bain au sous-sol, nous avons dû relocaliser tout le contenu des meubles du salon dans les trois chambres en bas. Grand-Charme est bien heureux d'avoir hérité temporairement de la télévision dans la sienne.

Or, s'il clamait au début des rénos que sa chambre était "la chambre du partage" et que tout le monde avait le droit de venir écouter la télé "chez lui", à présent, il se sent dépassé par l'affluence (pas uniquement pour la télé) et impose des prix d'entrée pour franchir le seuil de sa porte. Les prix d'entrée peuvent varier entre l'obligation de se vêtir d'un pyjama pour pénétrer dans son antre, faire X nombre de redressements assis, ramener un objet inusité (et souvent improbable dans la maison) voyez le genre.

Hier matin, je me fis réveiller par l'indignation résignée de Tout-Doux: "Maman, Grand-Charme m'a fait manger une gâterie Whiskas hier soir".

Moi(somnolente): "MmMhein?"

-Il m'a obligé à manger une gâterie pour chat.

-Et toi tu l'as écouté?

-Ben là! C'était la condition pour qu'il me laisse écouter la télé dans sa chambre.

Sans commentaire. Un soupir suffira.

La simplicité

Voilà une qualité que j'admire beaucoup chez les autres mais que je ne possède hélas pas.

mardi, août 12, 2008

André Sauvé

Je l'adore. Cet humoriste qui se démarque par son genre unique me fait tellement penser à une certaine personne que j'aime que j'ai décidé de l'inviter à son spectacle pour qu'elle puisse le découvrir et évaluer si elle se reconnaît dans la façon bidonnante qu'il a de passer du coq à l'âne d'une façon complètement décousue.

Bien que j'aie acheté trois billets, j'espère pouvoir accompagner mon invitée spéciale: c'est que la date du spectacle est une semaine top chrono avant ma DPA.

lundi, août 11, 2008

Les (inévitables?) pots cassés

Je vous ai parlé ici de nos nuits infernales. La situation s’était améliorée avec la barrière et la fermeté mais notre semaine de vacances nous a fait faire un ou deux pas en arrière.

Notre petit dernier, c’est une méga dose d’entêtement sur deux pattes. Adorable minet le jour, il se transforme à l’heure du dodo en un petit monstre d’une ténacité remarquable.

C’est le prix à payer, nous en sommes conscients, pour la surprotection dont nous avons entouré cet enfant depuis ses cinq mois. Cinq mois, c'est l’âge qu’il avait lorsque nous avons perdu Thomas.

Le sommeil de Frédéric a été guetté, après la mort de son frère, de façon maladive. Nous en avons surveillé chaque petit soubresaut, chaque soupir, nous nous sommes réveillés en sursaut en imaginant le pire, nous nous sommes levés pour vérifier si son petit coeur battait sous sa poitrine, nous l’avons couché avec nous pour ne dormir que d’un œil afin de demeurer toujours alertes.

Durant six mois, j’ai harcelé avec une inépuisable énergie le coroner, l’enquêteur et le pathologiste ayant procédé à l’autopsie du petit corps de Thomas pour que quelqu’un me dise enfin pourquoi notre fils était mort subitement durant la nuit après avoir fait une simple forte fièvre.

Avant que la réponse ne vienne –et même après, je vous l’avoue-, nous avons envisagé le pire à la moindre fièvre de Frédéric. Nous l’avons couvé dans notre nid ouaté plus que nécessaire. Le mal sournois que nous craignions était pire que les conséquences que nous pourrions éventuellement devoir assumer –et que nous assumons actuellement.

Nous ne dormons presque plus. Notre diable nocturne revendique comme un droit acquis le nid ouaté dans lequel il a eu un peu plus que les autres le droit de s’endormir avant que nous ne le ramenions dans son propre lit. Brave, il confronte, se heurte à notre autorité parentale lorsque notre position est aussi indiscutable que la sienne.

Il a développé certains arguments pour toucher notre fibre sensible mais devant leur inefficacité ces dernières semaines, son génie n'a pu que se peaufiner et sa persévérance, s'aiguiser. La nôtre aussi, malgré la difficulté d'être constants quand on est tant carencés en sommeil.

La nuit dernière, après plusieurs tentatives un brin mielleuses de Grand-Homme pour renvoyer le tenace au lit, je me suis levée avec une poussée de violence intérieure que l’on massacre ainsi sciemment mon précieux sommeil. J’en avais marre de ces crises nocturnes et mon ton de maman TRÈS fâchée ne permettait pas d’appel.

DODO. Point.

J’ai mis la barrière, bordé le récalcitrant, suis retournée au lit et qu’on me sacre enfin patience! Il était 3h30 du matin et le manège durait depuis une heure et demie.

Le jeune homme n’a point aimé le ton sec de sa maman.

Des pleurs à fendre l’âme se sont fait entendre quelques minutes après mon départ. Je suis retournée le voir et eus droit au spectacle désolant de ses deux mains sur sa bouche tentant de contenir les fuites de sanglots à travers tout son désarroi : « Toi l’as fait de la peine à moiiiii! Toi l’as fait de la peiiiiine à moi!!! Moiiii l’a d’a peiiiiiine! »

Bien oui, j’ai trouvé le moyen de trouver ça trognon, mais il n’en a rien su. J’ai seulement baissé le ton d’un cran pour réaffirmer mon leitmotiv : « La lune est dans le ciel. Quand le soleil sera revenu dans le ciel, tu pourras venir faire des colle-colle. Là, c’est la nuit, papa et maman sont très fatigués et aussi fâchés quand tu fais des crises. Tu fais dodo maintenant. »

Reprendre le beat. Reprendre du sommeil, aussi.

Question de foi

Je vous en ai parlé ici et ici, l’existence (ou pas) de Dieu est un sujet toujours d’actualité chez nous. Tout-Doux semble le plus mitigé sur la question, entendant différentes opinions/croyances à gauche et à droite et n'arrivant à se faire une opinion propre.

Saisi au vol sur la dernière banquette de la voiture à notre retour de vacances…

Coco –…Mais oui, Dieu existe!

Tout-Doux –Non, je te dis que Dieu n’existe pas. Dieu, c’est comme le Père Noël ou la Fée des Dents : ça n’existe pas!

Tout-Doux, en aparté à Fils Aîné sur un ton méprisant- …Fils Aîné…Coco croit que Dieu existe!

Fils-Aîné -…

Moi –Même si tu n’y crois pas Tout-Doux, tu peux quand même respecter ceux qui y croient!

Tout-Doux se retourne vers son jeune frère et maintient fermement sa position –Dieu n'existe pas.

Coco amène son argument-choc –Ah oui? Alors ils viennent d’où, tu crois, les orphelins, HEIN? Ceux qui n’ont pas de parents, qui n’ont jamais eu de famille? Ils viennent de Dieu! C’est grâce à Dieu si ils sont là!

Tout-Doux, sur un ton de grande évidence –Ils viennent de la science! La science existe!

En aparté à Fils Aîné –Fils Aîné, c’est vrai que la science existe, HEIN?

Sans attendre sa réponse, il se retourne vers Coco et affirme de toute sa suffisance–Les orphelins viennent de la science parce qu’il n’y a pas de Dieu!

Ils finiront peut-être par trouver un consensus. En entendant, leur raisonnement dans le développement de cette question et d'un athéisme/foi qui leur est tout sauf imposé m'amuse beaucoup.

Vacances sédentaires 2008

Moi qui rêvais d’un ambitieux voyage en Europe avec la gang cet été –sans bien sûr renoncer aux rénovations de la cour et du sous-sol entamées depuis le début de l’été- voilà que sagement je réalise que notre périple dans Charlevoix fut amplement suffisant pour l’énergie dont la femme enceinte fatiguée que je suis disposais.

Un grand chalet à flanc de montagne avec vue sur le fleuve rendit la semaine agréable et confortable. Les garçons ont pu bénéficier de l’abondance de volontaires pour les jeux de société puisque nous partagions l’endroit avec Papi et Mamie. Ainsi, la plupart de leurs soirées se sont terminées sur cette note :





Quant à nous, nous avons pu profiter de la grasse matinée jusqu’à 9h tous les matins puisque nous avions de la relève pour s’occuper des plus jeunes.
Le l-u-x-e!

Mon amour pour ce paysage à couper le souffle m’a aidée à tenir le coup pour ma deuxième ascension du mont du Lac des Cygnes. Moi qui étais fière d’avoir grimpé le minuscule mont St-Hilaire enceinte de 36 semaines de Fils Aîné, je ne m’étais jamais fait les 5,2 km sur des centaines de mètres de dénivelé du mont du Lac des Cygnes à 33 semaines de grossesse. Tout le défi est dans le dénivelé, mes mollets et mon coeur vous l’assurent!



J’ai bien failli abandonner mais ma fierté étant ce qu’elle est (et mon Tout-Doux étant si prévenant pour mes différents besoins : rocher pour m’asseoir, gorgée d’eau, sac ou bouteille à transporter, petite poussée dans le dos pour le prochain escalier), j’ai pu jouir du magnifique spectacle du sommet.

Dans mon essoufflement cependant, je me suis maintes fois félicitée d’avoir mis de côté l’Europe avec mon gros bedon pour cet été. J’aurais été si déçue de ne pouvoir profiter à fond d’excursions libres et de hiking dans les Alpes ou les Dolomites!

Une autre fierté: celle d’avoir réussi à convaincre Fils Aîné de braver sa peur des ours noirs pour nous accompagner (il y a deux ans, il avait préféré nous attendre dans la voiture pour éviter LE monstre des forêts...).

Même notre petite peste était de la partie pour la grande randonnée (bon d’accord, les épaules de Papi lui ont rendu la grimpe plus facile à certains endroits mais tout de même!).

Autre plaisir partagé par petits et grands :

Nous avions déjà visité la chocolaterie des Éboulements mais j’y ai découvert cette année différentes crèmes pour le corps au chocolat. Je possède tous les ingrédients chez moi pour en faire, ne me reste qu’à trouver une recette infaillible et juste assez décente pour que je ne m’auto-dévore pas!

Le bonheur de partir en vacances, quand on a un menuisier à la maison, c’est qu’on retrouve un beau deck de piscine fraîchement fini à notre retour:

Je ne peux omettre de vous raconter nos histoires de pêche mais cela mérite un billet unique dédié au sujet...

samedi, août 02, 2008

Le territoire des autres

Petite pause de préparatifs de bagages le temps d'une réflexion. Je n'ai pas l'habitude d'intervenir sur le territoire des autres, lire ici la chambre de mes enfants sauf pour ordonner le ménage, faire le tri ou l'inventaire des vêtements, laver le plancher ou superviser certaines tâches.

J'ai ici deux enfants extrêmement ordonnés (qui sont dans la même chambre). Fils Aîné et Coco apprécient un environnement propre et rarement besoin est de quémander pour que les lits soient faits ou les vêtements/jouets rangés.

À l'inverse, Tout-Doux est bordélique et Grand-Charme, le Prince du Chaos. Sa chambre, c'est la brocante du quartier. Y pénétrer à ses risques et périls uniquement. J'en sors tout juste d'ailleurs au coût d'une sandale de cuir brisée en me pétant la gueule sur un plancher encombré.

Dans la chambre de ce dernier, on trouve de tout: des bidules non identifiables, des petits bouts de fil à souder, des dessins mêlés à des morceaux de casse-têtes, des piles de linge propre qui traînent entre son lit et le mur couverte du bran de scie des rénos que nous sommes en train de faire au sous-sol, des déchets, des... Mieux vaut m'arrêter là. Et les meubles de rangement récemment achetés ne changent rien à sa nonchalance domestique!

J'ai pris une liberté que jamais je n'ai osé prendre: éliminer le superflu (ce qu'il est incapable de faire lui-même) à son insu.

Je n'aime pas intervenir sur le territoire des autres. D'abord, c'est du boulot supplémentaire pour moi et je me sens intruse sur un territoire précieux à l'autre (bien oui, certains sont confortables dans leur bordel). J'ai tout mis au lavage le linge propre qui n'a pas été rangé tel que demandé et il devra tout plier ET ranger à son retour.

Cet enfant a la capacité de vivre dans un fouillis ténébreux. Dans plus dégagé, espérons qu'il sera plus apte à entretenir son domaine (je spécifie ici pour ma nomade de belle-soeur: plus longtemps que lors de notre voyage à Cuba!).

Et vous, vous immiscez-vous dans la gestion du bordel des autres?

Je retourne dans l'antre de l'enfer.

vendredi, août 01, 2008

Le pénis: un être à part entière

Je savais ce constat véridique à l'âge adulte en entendant certains hommes parler de leur membre viril en le désignant par un sobriquet affectueux ou en lui attribuant une volonté indépendante de la leur.

Cependant, j'avais tendance à penser que cela était un acquis de construction sociale, non un réflexe inné.

Lorsque, à l'âge de trois ans, mon premier fils dû subir un examen de son appareil masculin par un médecin et qu'il me confia (le fils, non le médecin et encore moins l'organe) que son pénis avait peur, je n'avais pas compris alors que selon la perception de mon enfant, son pénis possédait ses sentiments propres. Cela m'avait amusée, point.

D'accord, je ne suis pas toujours vite vite mais il me fallut six garçons et le commentaire de mon petit dernier cet après-midi pour comprendre que le fait de considérer son pénis comme un être à part entière n'avait rien d'une construction sociale ou culturelle tel que je l'imaginais mais résultait bien d'un rapport inné à son corps.

Tandis que Grand-Homme retirait le maillot de notre fils qui sortait de la piscine, notre bonhomme se pencha pour saisir entre ses mains son appendice masculin et s'adresser à lui tendrement afin de lui livrer une information capitale: "C'est fini dans l'eau, ben oui pénis, c'est fini. Papa l'a enlevé maillot, maintenant on va mettre couche. Ben oui, une belle couche pour toi."

Honnêtement, est-ce qu'il serait venu à l'esprit d'une petite fille d'informer ses organes génitaux d'un changement dans la programmation vestimentaire de la fin d'après-midi?

Les luttes de l'alternatif

Quand on fait certains choix alternatifs, il faut parfois payer cher pour les assumer. Non que ce soit un fardeau d’assumer ses décisions mais il faut s’attendre à devoir y investir de l’énergie qui ne nous serait pas nécessairement exigée si nos choix de vie étaient plus conservateurs.

Cela peut impliquer de devoir s’indigner haut et fort devant un fournisseur de sortie familiale dont la définition de la famille se limite à deux adultes et deux enfants dans leurs forfaits familiaux. Cela peut impliquer de devoir continuellement justifier ses choix en matière de vaccination auprès des infirmières ou du pédiatre lorsque vous avez choisi de ne pas suivre le calendrier proposé. Cela peut impliquer de devoir vous battre pour faire reconnaître les acquis académiques de vos enfants lorsque vous choisissez de leur faire l’école à la maison.

Même si, au Québec, aucune loi ne régit la définition de famille utilisée chez les fournisseurs de loisirs, même si en théorie, la vaccination n’est pas obligatoire chez nous, même si de faire l’école à la maison est tout à fait légal, constamment, on vous demandera de démontrer que vos choix sont judicieux et que vous êtes en mesure de les assumer entièrement sans nuire au développement, à l’intégrité et à l’équilibre de vos futurs adultes.

Vos enfants sont vos enfants (quoiqu’en dise Khalil) mais un bien-pensant quelque part (un médecin, un enseignant, un représentant de commission scolaire, une infirmière, un représentant de compagnie pharmaceutique, un voisin, une collègue by the book) se fera un devoir de vous faire entendre raison quant à la marginalité de vos décisions.

Dès que vous sortez des standards établis, vous déstabilisez un protocole, une procédure, un sous-système.

Ce matin, que mon choix de me faire accompagner par une sage-femme durant ma grossesse ait pour incidence de me fasse sortir des services offerts par le système du santé si je ne me soumettais pas aux procédures, eh bien ça m’a fait sortir de mes gonds.

J’aurais voulu que ce soit simple, j’aurais voulu pouvoir bénéficier du même service que les autres femmes, j’aurais voulu ne pas avoir à dépenser d’énergie supplémentaire pour obtenir le droit de passer mon fichu test d’hyperglycémie provoquée.

J’ai fait le choix d’être suivie par une sage-femme. Par définition, une sage-femme est une professionnelle formée pour accompagner une femme durant la période de sa grossesse et pour l’aider à mettre au monde son enfant dans un contexte d'encadrement sécuritaire, adapté aux volontés de la mère et de son couple mais non-médicalisé.

Les femmes aux grossesses à risque ne peuvent être suivies par une sage-femme. Ce n’est pas mon cas. J’ai des grossesses médicalement faciles. C’est donc ma sage-femme qui répond à mes inquiétudes, prend mes prises de sang de routine, prend ma pression, mesure mon bedon, surveille mon pipi, me fait entendre le coeur de mon bébé, me rassure et me fait un chaleureux câlin après chaque rendez-vous. C’est aussi elle qui m’avertit quand j’ai des carences en fer ou que mon taux de sucre est trop élevé.

Les maisons de naissance avec lesquelles j’ai fait affaire sont affiliées à un hôpital pour les analyses de sang et les urgences bedon. Rien n’est pris à la légère et au moindre risque débordant des compétences de la sage-femme, on réfère à un médecin (curieuse coïncidence, ma merveilleuse sage-femme est la cousine de ma merveilleuse médecin).

Ce matin, donc, je me présente à mon CLSC pour passer mon test de glycémie étant donné que le précédent m’indiquait, snif, un holà au sucré. Évidemment, je m’étais préalablement assurée au téléphone qu’on allait accepter la prescription de test de ma sage-femme même si la maison de naissance était affiliée à l’hôpital de St-Jérôme. Dans un même système de santé, on devrait pouvoir accéder à un service offert à quelques rues de chez soi plutôt que de se taper une heure de route pour pallier à l’excès de zèle et du manque de flexibilité de quelques employés il me semble!

On m’a refusé le test. J’ai soupiré. Puis insisté. On m’a référée à la formelle infirmière. « On ne peut pas vous faire passer ce test Madame, on ne reconnaît pas la validité d’une prescription de sage-femme parce qu’elle ne fait pas partie d’une association. »

Je lui ai expliqué que la sage-femme était une professionnelle membre d’un Ordre professionnel.

« Non Madame, j’ai vérifié avec l’hôpital et le laboratoire refuse cette prescription si elle n’est pas contre-signée par un médecin. »

J’ai insisté, lui ai expliqué que la sage-femme avait les compétences nécessaires pour assurer un suivi de grossesse au même titre qu’un médecin, que je lui faisais confiance, que l'hôpital de St-Jérôme lui reconnaissait aussi cette crédibilité et que de me faire passer ce test était justement une belle démonstration de son professionnalisme. Je lui ai expliqué que je n’avais pas eu de problème à passer le même test au même CLSC à ma grossesse précédente.

Son (ridicule) argument final : « On ne peut vous faire passer ce test puisqu’il peut révéler des choses sur votre état de santé qui sont confidentielles. » (Sans blague!!)

Pardon? L’infirmière était-elle à court d’argument sensé, cohérent et intelligent? Si cette prescription était rédigée par ma sage-femme, c’est qu’en unique juge que je suis pour choisir qui recevra mes « infos confidentielles », j’ai choisi que cette personne serait justement ma sage-femme. (Quelle coïncidence, quand même!)

Me suis butée à un mur. Cela ne donnait rien de m’obstiner avec elle, elle se terrait derrière la position du laboratoire et ses arguments vides et approximatifs. Des mots assassins se sont bousculés dans ma tête, ont chatouillé l'intérieur de mes joues et je suis partie en ravalant ma hargne contre le système et sa fermeture, contre ses pseudo-représentantes têtues, contre la maudite nécessité de toujours devoir lutter pour avoir droit à de légitimes services du moment que l’on ne rentre pas dans une petite case pré-établie.

En arrivant à la voiture, j’ai éclaté en sanglots. Il était 7h45 et j’avais usé de mes dernières énergies pour me tirer de mon lit pour passer ce fichu test avant nos vacances.

Aussitôt arrivée à la maison, les garçons se sont mis à me solliciter. J’ai été sèche, bête, expéditive. J'avais plus urgent à régler que de distribuer des permissions pour un déjeuner aux restants de beignes convoités de la veille.

J’ai réfléchi, réfléchi en ruminant ma colère. Les sages-femmes possèdent une formation reconnue et un ordre professionnel au même titre que les autres professionnels de la santé. Elles agissent dans leur champ de compétences et en aucun cas n’empiètent sur celui des obstétriciens (dont on s'inquiète de la pénurie au Québec). Parce qu'elles ne possèdent pas de compétences spécifiques en pharmacie, elles ne peuvent naturellement prescrire de médicaments, pas même ceux liés à la grossesse. Cette profession est extrêmement surveillée du coin de l’œil par les entités médicales et para-médicales.

Une sage-femme qui possède des compétences reconnues légalement ne peut guère jouir de la latitude que son statut devrait lui permettre (alors qu'un médecin qui n'exerce pas demeure un médecin avec toute la notoriété de son statut). Elle ne peut exercer en toute « légalité » si elle n’est pas embauchée par un CSSS (régit par le système de santé). Ainsi, les compétences de ma sage-femme sont reconnues uniquement dans le cadre de ses fonctions en maison de naissance (sous l'égide du CSSS).

Je n'aurais pas le droit de l'embaucher au privé car alors elle serait dans l'illégalité, pourrait perdre son permis d'exercice et ne serait guère couverte par ses assurances. On ne lui permettrait pas non plus d'attester qu'elle m'a aidée à mettre au monde mon enfant sans qu'elle n'en subisse des représailles et que cela ne compromette la profession pour laquelle elle a été formée.

Que vaut un BACC sage-femme reconnu officiellement par le ministère de l’Éducation si elles ne peuvent pratiquer leur profession sans constamment devoir se buter à la méconnaissance populaire de leur métier? (L'Ordre devrait se lancer dans une méga-campagne d'information pour favoriser la connaissance de la profession et désamorcer les préjugés...et encore, cela ne pourrait se faire sans s'attendre à une solide réplique de la médecine traditionnelle largement en moyens mais ça, c'est une autre histoire...) Considère-t-on les sages-femmes comme des sorcières?

On les forme et elles se retrouvent parfois encore à devoir attendre la sacro-sainte estampe médicale pour valider leurs actes! C’est désespérant, frustrant, enrageant.

Il y a cent ans, les sages-femmes assistaient les femmes en travail naturellement. On faisait confiance à leurs compétences. C’était avant que l’on ne médicalise l’acte on ne peut plus naturel d’accoucher.

Si une sage-femme faisait une erreur, les médias et la gent médicale se feraient un devoir de ternir la profession en entier pour cela. Si un médecin fait une erreur, sa profession n’en souffrira pas : par son simple statut, il bénéficie d’une forme d’immunité professionnelle, d’une infaillibilité plus grande que la faute elle-même. À la limite, on tapera sur les doigts du médecin, non sur la profession comme tel. Une amie ayant perdu son fils à la naissance suite à l’erreur médicale d’un résident en obstétrique souffre encore de l'injustice de cette iniquité en matière d'imputabilité entre les professions.

L'amoureuse de mon frère ces dernières années était anesthésiste et déboursait extrêmement cher pour ses assurances professionnelles afin d'avoir un tant soit peu de tranquillité d'esprit quant à cette question. Les sages-femmes n’ont hélas guère les moyens de payer pour des assurances pareilles pour les couvrir en cas de bévue. D’ailleurs, ce n’est qu’il y a deux ou trois ans qu’elles ont pu trouver une entente avec une compagnie d’assurance pour bénéficier elles aussi d’une protection professionnelle, cela à de strictes conditions.

Peut-on me permettre de comparer le prix à payer pour les sages-femmes pour faire reconnaître leur travail ET obtenir le droit de l’exercer sans le constant contrôle de la gent médicale à celui de la lutte symbolique à engager et aux énergies à dépenser pour faire respecter ses choix quant à sa façon de vivre sa grossesse, son accouchement et sa façon d’éduquer ses enfants quand ses choix sont minimalement marginaux?