mardi, juin 17, 2008

Le mess

Je vous ai parlé ici d'un événement cher à mes yeux parce que cher à ceux de mon père. Dans quelques heures, nous y serons déjà.

Les retrouvailles sont étalées sur plusieurs jours, période durant laquelle différentes activités sont organisées allant du souper-croisière à la visite de différents musées de la capitale. Un souper officel est organisé dans le mess à l'endroit même (si je ne me trompe pas) où la troupe a reçu son entraînement.

En discutant de la possibilité que mon homme vienne m'y retrouver avec notre fils (dont la présence incommodait quelqu'un), je me suis rappelée de la fierté que nous avions mon frère, mon demi-frère et moi, jeunes ados, à accompagner notre père au mess des officiers.

Le mess était un endroit solonnel où il fallait bien se tenir et nous prenions cela très au sérieux. Une fois sur place, nous jouions au billard ou aux arcades et notre père nous permettait parfois aussi de pénétrer dans le chic salon (quasi désert le week-end). Nous prenions place sur les fauteuils de luxe pour siroter une liqueur et manger des chips. Impressionnables que nous étions, c'était un honneur pour nous d'être admis dans le monde mystique des agents secrets!

Il y avait aussi un gymnase (désert lui aussi la plupart du temps) où l'on grimpait sur des cordes, courait et s'amusait sur les appareils d'entraînement des officiers.

Mon souvenir mémorable demeure toutefois cette fois où mon humiliation atteignit un sommet jusque là inégalé. J'avais quinze ans et décidai d'aller jouer au basket seule dans le gymnase après avoir épuisé le budget autorisé par mon père.

Durant une demi-heure, je dribblai avec passion, courus avec le ballon en me prenant pour une athlète que je n'étais pas. Je réussis même glorieusement quelques paniers. Qu'importe si j'avais l'air fou puisque j'étais seule au monde dans cette immense salle! À quelques reprises, mon frère vint me regarder dribbler du haut de la mezzanine du mess qui surplombait le gymnase en se moquant des airs de sportive que je me donnais.

Après tout ce temps, je remarquai sur le plancher une multitude de lignes noires qui n'étaient pas là lors de mon arrivée. Prise d'une panique soudaine, je vérifiai l'état de mes semelles. La chose était confirmée: la semelle de mes chaussures était responsable de l'état désastreux du plancher. J'avais commis un épouvantable délit!

Craintive de me faire disputer (on était au travail de mon père, jamais je n'aurais pris le risque de lui faire honte), je me ruai au vestiaire et armée de papier brun mouillé, tentai de faire disparaître mon malheureux gâchis.

Cendrillon à quatres pattes, angoissée comme jamais, frottait vigoureusement le plancher du gymnase et fit un nombre incalculable d'aller-retours au vestiaire pour assurer ses provisions de papier brun. Vite, effacer toute trace de mon passage avant de m'humilier publiquement devant un vrai athlète décidant de venir s'entraîner un jour de congé.

Heureusement, je réussis à sortir de là incognito et nul ne remarquât ma terrible bévue...jusqu'à ce qu'en sortant de l'édifice pour remettre nos cartes d'accès au gardien, il me fasse un subtil sourire et que je remarque derrière lui tous les écrans de surveillance dont "les miens", ceux du gymnase vu sous tous ses angles.

5 commentaires:

Anonyme a dit...

Anecdote charmant...je pense au gardien qui t'as fait ce beau sourire, il a du lui aussi apprécier tes vas- et- vient de jeune adolescente responsable, ta candeur. Et sans doute a t-il eu autant de tendresse pour ton geste que j'en ai eu en te lisant. (peu m'importait le motif)

J'ai également acheté un billet pour cette jeune athlète vedette qui rêvait d'un devenir.

Fantasmer, rêver, croire...

En te voyant atteindre tes buts, dépasser tes peurs, te montrer dans ta vulnérabilité parfois ne t'en fait que plus belle.

Dans mon coeur de mère, je sais alors que tout n'a pas été vain - ce à quoi je croyais, ce que j'entrevoyais je le vois se matérialiser sous mes yeux...et
crois-moi c'est le plus beau cadeau que je puisse récolter.

Plein de tendresse ma chérie, je t'accompagnerai en pensée dans les jours qui viennent.

Méli a dit...

Quelle charmante histoire ! ;-D

Anonyme a dit...

Maman de Grande Dame,

vous êtes merveilleuse, en mots, en tendresse, en action... une maman remplie d'amour, comme la mienne...

Cela ne me surprend pas que Grande Dame soit devenue ce qu'elle est aujourd'hui. Elle est unique!

Oui Grande Dame, tu es unique!

Christiane xxx

Anonyme a dit...

j'ai passé de nombreuses années à aller manger au mess le week end avec mes parents..puis mon beau père...mais parmi mes souvenirs mémorables celui là. nous déjeunions au mess des sous-officiers, sauf situation exceptionnelle. le long des couloirs, il y avait des patères, comme à l'école, ou chacun rangeait son képi. dans le couloir désert du couloir des officiers, mon père me fit 'chut' et décrocha les képis pour les aligner par terre. Ensuite il sauta dessus à pieds joints presque tout le long du couloir...jusqu'à ce qu'un officier sorte du mess. je crois que mon papa n'était pas fait pour l'armée.
et pourtant il y était depuis l'âge de 9 ans...

Grande-Dame a dit...

Momz..sourire-tendresse...

Christiane...Perle, va!

21, il faut du guts pour oser cela! :)