samedi, septembre 15, 2007

Angoisse et culpabilité

Je n'y échappe jamais. J'ai passé la plus grande partie des deux dernières journées à Ste-Justine*. Programme de la journée: s'asseoir, s'armer de patience, attendre notre tour.

On joue aux cartes, on lit, on parle, on change de position, on soupire, on se dégourdit les jambes, on s'imagine tout ce qu'il serait savoureux de manger si il (on) ne devait pas être à jeûn. Grand-Charme propose de me mimer la danse des Schtroumfs telle qu'illustrée dans son livre pour me divertir et s'active avec enthousiasme dans la petite pièce sans être gêné par le bandage qui lui recouvre la main et le poignet.

Je suis exténuée de ces heures interminables d'attente et malheureusement, je me dis que j'ai l'enfant "idéal" pour attendre avec moi. Il est d'une patience d'ange, ne se plaint jamais de quoi que ce soit. Grand-Charme porte ses blessures comme de véritables trophées.

Cinq heures plus tard. Enfin notre tour. Il doit partir à la salle d'opération, est mal à l'aise que je l'embrasse. C'est mon moins colleux celui-là. Je le regarde s'éloigner, excité à l'idée de se faire endormir. Il fait le rigolo avec l'anesthésiste, visiblement étonnée de faire face à un jeune garçon si plein d'aisance. Et moi? Eh bien mon coeur se serre et je réprime mes larmes de le voir s'en aller.

Trois heures et demi (angoisse! épuisement! émotivité!) plus tard, revoilà enfin la chirurgienne. Le doigt de Grand-Charme est reconstruit. Il lui a donné du mal, mais elle a réussi à retrouver les tendons et à tout rafistoler. Elle me détaille l'opération et je soupire de soulagement.

Je le retrouve enfin en sortant de la salle de réveil un peu plus tard et je suis si heureuse que j'ai envie de pleurer. D'accord, ce n'était qu'un doigt, on peut très bien survivre sans un doigt...mais je suis mère et je préserverais toutes leurs intégrités (physique, émotive, psychologique...) si je le pouvais.

Je songe aux parents d'enfants malades et je suis empreinte de compassion. Il y a des endroits tellement plus agréables où passer une journée avec ses enfants, des soucis tellement plus légers à avoir que ceux de la santé de ses mousses!

J'ai laissé Grand-Charme aux soins de son père et je suis partie une fois qu'il était bien installé dans sa chambre en fin de soirée. Sortir de l'hôpital, respirer enfin de l'air frais, retrouver le reste de ma famille: des besoins essentiels, aussi.

Pourquoi la culpabilité? J'éprouve de la difficulté à déléguer lorsqu'un de mes mousquetaires vit quelque chose d'ardu. Ce matin, son père le rejoint pour la journée. Ce sera mon tour ce soir. Même si j'ai besoin de m'occuper aussi des autres, de me reposer, de pleurer mon stress, j'angoisse d'être loin de mon enfant blessé et un inconfortable sentiment d'indignité m'habite. Je souffre de ne pas savoir/pouvoir être partout à la fois.

"Il est avec son père, relaaaxe!", que je me répète depuis hier soir.

Mais que voulez-vous, je suis une mère qui n'ai pas encore réussi à se défaire de son indélogeable sentiment de culpabilité.

*Pour mes lecteurs hors-Québec: Ste-Justine est un réputé hôpital pour enfants.

9 commentaires:

Dr Maman a dit...

Bravo à toi. Ton Grand-Charme est chanceux de t'avoir!

Taïga a dit...

Hourra! C'est gagné!
Va falloir que tu m'explique ça... tendon en dessous de l'ongle..
Faut croire que je suis maso..

Grande-Dame a dit...

"Vis-à-vis" l'ongle aurait été une meilleure expression...;-)

Grande-Dame a dit...

Dr. Maman, et moi je suis chanceuse d'avoir ma mère: elle m'a proposé de faire le chiffre de nuit auprès de Benjamin. :-)

La p'tite semaine a dit...

La culpabilité est un sentiment que nous partageons malheureusement toutes, nous les femme. C'est, je crois, celui le plus difficile de se départir.
Bonne convalescence à Grand-Charme!

Taïga a dit...

Tu veux dire qu'au lieu de descendre vers son poignet il a remonté??
(Excuse-moi j'ai sûrement été blonde dans une autre vie...Pas vite vite la fille)

Anonyme a dit...

On aurait pu se croiser, j'étais de garde toute la journée de samedi ainsi que la nuit et je n'ai pas fermé l'oeil. Mais je couvrais les étages de pédiatrie seulement, pas ceux de l'orthopédie ;)

Bon courage à Grand-Charme !

Grande-Dame a dit...

P'tite semaine, merci!

Couvée, exact. Le "comment" demeure toutefois un mystère...

Dre Papillon, je suis en mesure d'affirmer que vous avez de fort charmants collègues résidents en plastie. :-)

Méli a dit...

Bon rétablissement à ton fils... xoxo