samedi, août 11, 2007

Parce que je me soucie

J'ai vécu une dure épreuve avec la mort de mon fils. La mort de Thomas est une amputation qui me définira jusqu'à la fin de mes jours.

D'autres parents vivent d'autres drames avec leurs enfants: sentiment d'impuissance face aux choix de leur progéniture (drogue, violence, attitude de victime, mensonge, fugue, etc), maladie (accompagner son enfant dans la souffrance de la maladie, quelle impuissance!), handicaps permanents, conflits non réglés qui les privent du bonheur qu'apportent des enfants, troubles de comportements graves, etc.

Chacun apprend à vivre avec son drame personnel. Se soucier des autres sollicite beaucoup de nous-même quand on aime. Peut-on aimer plus démesurément, plus inconditionnellement que son enfant?

Je pense énormément à la petite Cédrika, disparue depuis le 31 juillet dernier. Je pense aussi à ses parents, assurément fous d'inquiétude. Quand on apprend que son enfant est mort, c'est la fin de notre monde, puis on essaie de se reconstruire. Quand on ne sait pas OÙ est notre enfant et que l'on ne peut qu'envisager, c'est d'un tout autre ordre.

Cette disparition me rentre dedans. Quand il arrive quelque chose à un enfant, ça nous sollicite tous profondément. Quand on est parent, on pense illico : "Et si c'était le mien?"

En route pour Québec hier, nous nous sommes arrêtés pour dîner à Trois-Rivières. Partout, sur les poteaux, les portes des commerces, des affiches de Cédrika. L'inquiétude pour cette petite mobilise la communauté, tous les commerçants se font un devoir de coopérer.

Aux nouvelles ces derniers jours, des centaines de bénévoles ont contribué à des battues à Trois-Rivières à la recherche d'indices permettant de trouver la petite Cédrika. Ce genre de geste me remue les tripes: pleins de gens venus de partout, certains qui ont pris congé pour venir donner un coup de main à la police et la famille car ils ne peuvent se résigner à ne rien faire.

La solidarité est un sentiment (doublement quand il est appuyé par des gestes) qui me rend fière d'être humaine, de faire partie de la race.

Comme beaucoup de mes pairs, j'angoisse à l'idée de ce qu'il est advenu de cette petite fille. La police enquête toujours dans sa ville de disparition, mais il est tellement facile d'envisager qu'elle n'y soit plus depuis longtemps!

J'ai fait le calcul: au Québec, nous sommes sept millions et demi d'individus. Si on prend juste la tranche des 15-65 ans, ça fait presque cinq millions d'individus potentiellement capables de donner un coup de main. Si on prenait juste 10% de tous ces gens, ça ferait tout de même près de 500 000 personnes qui seraient en mesure de fouiller dans leur quartier les boisés avoisinants, les berges, les terrains vagues.

Ça me désole énormément que la plupart de ces gens soient du potentiel inutilisé qui ne font que se désoler dans leur salon, impuissants et probablement persuadés qu'ils ne peuvent rien faire.

Si un de mes enfants disparaissait, j'apprécierais que la population se mobilise pour m'aider à le retrouver, même à plus de 100 km de chez moi. Je me dirais que l'union fait la force et j'aurais envie de croire que de cette façon, on aurait plus de chances d'arriver à un résultat.

C'est pour cette raison que cet après-midi, même si je me sentais un brin ridicule, j'ai pris une heure pour aller explorer l'immense champs aux herbes hyper hautes de mon quartier en ayant l'impression de faire quelque chose de possiblement utile. Il faut nécessairement que cette petite Cédrika soit quelque part. Et si ce quelque part était accessible aux résidents d'un quartier -le vôtre?

Je vous ai déjà prévenu que j'étais une idéaliste.

Note: en cherchant un format de photo correct de Cédrika sur le web, je suis tombée sur des forums de discussions où des gens spéculent sur l'issue de cette histoire. J'ai même lu une ÉPAISSE (vous me verrez rarement considérer quelqu'un de ce qualificatif) qui déplorait le fait que "le père de Cédrika n'ait même pas l'air triste à la télévision, que si ELLE, ça lui arrivait, elle aurait indéniablement les yeux bouffis".

Vraiment, c'est le genre de jugement gratuit qui me rend hors de moi. Cette femme qui préfère se désoler et porter des jugements sur des forums de discussion n'a visiblement jamais connu d'état de choc, ignore tout des grandes douleurs qui nous aspirent à l'intérieur de nous-même. Quand on vit une terrible épreuve comme celle-ci, me semble que la dernière affaire dont on ait besoin, c'est des jugements stupides et handicapés comme celui-là. J'ai envie de gifler quelqu'un moi là....

8 commentaires:

Gooba a dit...

Le mot épaisse convient parfaitement. Non, mais faut être sans-coeur pour porter un tel jugement!!

Anonyme a dit...

Epaisse vrai, elle! C'est comme le maire Gendron, sur son blog, qui a posté cela en date du 3 aout: (heu.. je ne le traite pas d'épais j'ai juste une divergence d'opinion face à lui... hihi)

"Par ailleurs, Trois-Rivières est en émoi sur à la disparition d'une fillette de 9 ans qui se promenait seule à vélo sans supervision parentale. Elle a disparue. Une question que personne n'ose poser : Où étaient les parents ? Comment se fait-il qu'on laisse une enfant de 9 ans seule à vélo dans les rues de Trois-Rivières ? 9 ans... Ah, certains vont dire qu'on est pré-Ado à cet âge ! Négligence parentale ou négligence de nos valeurs en tant que société ? Comment se fait-il aussi qu'aucune alerte Amber n'aie été déclenchée par la police locale ?"

Ayoye! J'en revenais pas. Ben oui tsé, taxer les parents d'incompétent tant qu'a faire? Y'aurais du appeler la DPJ tant qu'a être parti? Elle revenait peut-etre juste de chez son amie et s'en retournait à la maison?

Grande-Dame a dit...

Angharad, bienvenue!

Je suis d'accord avec vous, assez décevant un commentaire du genre. A-t-il été écrit uniquement pour la sacro-sainte provocation dont il apprécie tant s'affubler?

Comme si nous devions attacher nos enfants! La plupart des parents autorisent leurs enfants à des déplacements pour lesquels ils estiment leur marmaille suffisamment matures en ne manquant pas de leur rappeler quelques consignes de sécurité.

Hélas, la maturité n'immunise pas contre d'éventuels accidents à vélo, les prédateurs sexuels, les p'tits maudits baveux. Ce sont des choses extrêmement malheureuses, mais qui arrivent.

N'est-ce pas pas de petites permissions qu'on étire au fil de notre confiance en eux que les enfants finissent par prendre de l'autonomie, de la confiance, de la solidité?

Il y a trente ans (selon une étude publiée il y a un an dans l'Actualité), les enfants avaient la permission de se déplacer seul NEUF fois plus loin que les enfants d'aujourd'hui. Les parents que nous sommes sont donc nettement plus restrictifs.

Des pervers détraqués qui guettent patiemment LA faille dans la surveillance des parents, ça existe, malheureusement.

Que Monsieur L'Infaillible Gendron démontre que jamais les permissions qu'il accorde à ses enfants ne permettraient qu'un malade ne s'en prenne à eux.

Pfff.

La Souimi a dit...

C'est épais vrai...
J'arrive de la région de Portneuf. J'y ai vu le beau visage de la petite Cédrika partout. Même en affiche géante sur l'autoroute proche de Trois-Rivières. Même dans l'église de Champlain, village de mes ancêtres, alors que la petite ornait le mur de l'entrée. Je pense que tout le monde pense à elle.
Souvent, les silences sont puissants. Les gens parlent en silence. Et bien plus que par les mots...On va juste espérer...

Pascalou a dit...

Je crois que tu es visité un forum (docti) que je fréquente depuis la venue au monde de ma petite dernière.

Je fût aussi choquée de lire ce genre de commentaire. Un manque total de respect. Il n'y a personne qui réagit de la même façon face aux épreuves. Moi je me range du même côté qu'une autre sur le forum... il doit être fort pour Cédrika, mais aussi pour son autre enfant.

J'espère du plus fort de mon coeur que cette "histoire" aura une bonne fin, même si chaque seconde qui passe nous fait penser le contraire.

Méli a dit...

On est tous bouleversés par cette histoire, car c'est vrai qu'on se dit tous et si c'était la mienne... On se sent bien impuissants...

Le maire Gendron, ce type de personnes qui se pensent plus fins que tout le monde et qui manque du plus élémentaire respect pour les autres, me font pitié, c'est triste qu'on leur accorde autant de notoriété, je les boycotte, jamais je n'écoute ce genre de fendant à la radio... Si je l'ai vu quelque fois à la télé, ce fut bien accidentel et n'a fait que renforcer chez moi le désir de m'en tenir le plus loin possible...

Anonyme a dit...

Cette femme doit être de celle qui joue à qui a le plus de drame et de peine dans sa vie...que veut tu, y en a des comme ça qui dans leur effort d'être reconnu vont jusqu'à se comparer dans le malheur !!!


Tu as une idée géniale, faudrait que les médias te lisent et nous aide à organiser une battu provinciale GÉANTE!! Ca se ferait sans peine, on est sur le même fuseau horaire, tous un soir chacun dans notre bout de quartier !..

Taïga a dit...

Ce qui est grave c'est que personne ne connait son voisin ou ne s'en soucie. Qui pourrait dire que son voisin a eu des aller-venues bizares. Qu'il serait arrivé chez lui avec un enfant qui ne serait pas le sien.
Tout le monde se fout de tout le monde et c'est là le drame.
Heureusement il y a des gens encore capable d'humanité et qui se rende sur place pour chercher, qui écrive ou qui font circuler l'information.