vendredi, novembre 02, 2007

Illustration

Femme Libre, en commentaire au billet précédent, reconnait la grandeur d'âme de Fils Aîné. C'est vrai, je présente souvent l'aspect dur, audacieux et rusé de mon aîné. Il n'est pas insensible pour autant et le flair et la perspicacité de Femme Libre l'ont détecté depuis un bon moment.

Je vous raconte donc une anecdote illustrant à merveille la capacité de don de soi de Fils Aîné.

C'était il y a un peu plus de deux ans et les garçons étaient en journée pédagogique. J'étais fatiguée, impatiente, intense et caractérielle (enceinte) jusqu'au cou. Je ne savais pas quoi cuisiner pour dîner et j'avais héroïquement réussi à réunir juste ce qu'il fallait pour préparer des croque-monsieurs, que je mis à cuire au moment où le téléphone sonnait.

Bien que je demeurai à côté du four, je fis lamentablement calciner le dîner. Je fus donc expéditive avec mon interlocutrice, lui reprochant bêtement de choisir mes heures de rush pour téléphoner (maintenant, j'ai la sagesse de ne plus répondre au téléphone aux heures de repas).

Je raccrochai, sortis les croque-monsieur du four et m'effondrai en larmes devant ce qu'il subsistait de ce modeste repas si péniblement préparé.

Fils Aîné, qui avait assisté à la scène, me rassura: "Maman, il sont corrects tes croque-monsieur."

"Non ils ne sont pas corrects, ils sont complètement calcinés!" lui répondis-je, découragée à l'idée de devoir trouver une alternative.

Fils Aîné prit alors un ton réconfortant et affirma: "Ils ne sont pas calcinés maman, ils sont juste un peu dorés" et en guise de preuve, il fourra dans sa bouche un carré de pain noirci qu'il avala sans même grimacer.

Il confirma alors sa propre hypothèse: le repas était excellent et tout le monde allait donc survivre. Il appela ses frères et décréta que le repas était prêt. La question était réglée.

Pour apprécier la valeur réelle de ce geste, il faut savoir que Fils Aîné refuse catégoriquement d'ingurgiter toute crêpe, toast, grilled cheese, gaufre si elle est le moindrement dorée. Combien de fois me suis-je insurgée devant ses caprices en lui expliquant que sa crêpe était simplement dorée plutôt que calcinée comme il l'affirmait?

Que pouvais-je donc répondre à mon fils qui me servait mes propres paroles pour me démontrer sa compassion? Mieux encore, il avait fait ce qu'autrement il n'aurait jamais fait: il avait avalé quatre fois pire que ce qu'il s'était toujours refusé à avaler.

N'était-ce pas là une démonstration sans équivoque de sa capacité de don de soi?

12 commentaires:

Benoit Bordeleau a dit...

Belle preuve de don de soi, en effet :) Et personnellement, je les aime un peu calcinés, mes croque-monsieurs :P

Chocolyane a dit...

Wow... :o)

moi m'aime a dit...

Vraiment charmant!

Dr Maman a dit...

Tu as tellement dû être fier de ton fils!

La Souimi a dit...

Je trouve que ce billet est très beau. Je crois que par son attitude, ton fils t'a fait une belle démonstration d'amour.

Anonyme a dit...

Je suis moins romantique...

Je crois simplement que Fils aîné ne peut supporter la vue des larmes de sa mère.

Une faiblesse qui fera le bonheur de toutes ses futures un peu rusée.

:)

Michèle

Taïga a dit...

Il est merveilleux fils aîné... et comme il te lit parfois... son égo doit gagner en expansion!

Une femme libre a dit...

La relation entre un garçon et plus tard un homme et les larmes féminines est en effet tellement teintée d'inconfort que le mâle, jeune ou pas jeune du tout, se prêterait à des bassesses ou à des prouesses pour mettre fin le plus rapidement possible à ce torrent d'émotion qui le tourmente et titille sournoisement sa culpabilité. Michèle a raison là-dessus.

Véro a dit...

Très joli récit...

Grande-Dame a dit...

Les larmes forcent donc une certaine ouverture à l'autre par ce qu'elles nous infligent de malaise allant même jusqu'à nous faire poser des gestes exceptionnels, si je me fie à votre théorie...

Une femme libre a dit...

Oui, la sensibilité aux larmes n'enlève rien à la beauté et à la grandeur du geste. Elle prouve seulement que Fils Aîné est bien un gars! J'aurais bien beau pleurer toutes les larmes de mon corps, ça n'attendrirait pas mes filles qui elles aussi ont le talent et la capacité d'en verser au besoin et même sans besoin parfois, mais je me souviens que mon fils, lui, en était troublé (ou agacé?).

Ce Bref Réveil a dit...

Très touchante cette histoire.
Mes félicitations à votre fils.