vendredi, février 02, 2007

Taguée

Voilà que je croque l'invitation de Madame Une Telle à vous livrer quelques dignes coquineries (à ne pas répéter à mon psychiatre) à mon sujet.

1. Je suis obsédée par les dictionnaires. Pour contrôler l'ampleur de mes compulsions, il m'en faudrait un dans chaque pièce de la maison (ainsi que dans la voiture) car à tout moment du jour, des mots inconnus viennent se percher dans mon esprit et attendent d'être définis. Ils me torturent allègrement.

Lorsque je ne saisis pas illico de dictionnaire pour me débarrasser de ces mesquines offensives, les mots inconnus demeurent en suspension dans mon esprit, me donnant l'impression d'une ignoble inculture en matière de vocabulaire.

Esclave de mon esprit, je suis alors dans l'obligation de cesser toute activité, de me diriger vers le bureau et de chercher les mots jusque là en liberté, de tenter de les intégrer avant de retourner vaquer à mes occupations en toute quiétude.

Lorsque je n'ai pas de dictionnaire sous la main, je suis misérablement contrainte à écrire les mots inconnus sur de petits bouts de papier ou à tenter de les retenir dans une liste mentale généralement peu fiable. Lorsque je n'ai ni papier, ni crayon, ni dictionnaire, je me sens désespérément démunie. Voilà une vingtaine d'années que je subis ces agressions. Plus je vieillis, plus les mots sont recherchés.

2. Lorsqu'on m'offre quelque chose de sucré, comme du sucre à la crème, des biscuits ou du fudge, je m'impose toujours d'en prendre un nombre de morceaux établi au prorata de mon nombre d'enfant.

Cela me cause de plus en plus d'embarras en public, vous l'imaginez bien, car il me faut de plus en plus assumer de passer pour une goinfre effrontée. Je ne puis me résoudre à ne prendre que trois ou quatre bonbons en sortant des restaurants au risque de me sentir déloyale envers mes plus jeunes enfants (en dépit du fait qu' eux ne voient pas du tout passer les gâteries).

C'est aussi stupide que compulsif, un peu comme les enfants qui s'imposent de ne pas marcher sur les craques de trottoir. Croyez-bien que je me trouve complètement r-i-d-i-c-u-l-e.

3. Prononcez ce mot et je grimace à coup sûr: asticot. Les larves me donnent des frissons d'horreur épouvantables. Pourtant, je persiste à faire des recherche sur le net et à les observer lorsque j'en ai l'occasion pour bien comprendre leur cycle et mode de vie. Attraction/répulsion.

J'ai été fortement perturbée il y a deux étés par cette fameuse grenouille sous mes plants de concombre. Je soulevais le feuillage à la recherche de concombre et, me sentant intensément regardée, je cherchai l'intruse.

Je sursautai lorsque je la vis: une grenouille me fixait, les yeux vides et ne cherchant pas à se sauver. Je mis quelques secondes avant de réaliser qu'elle était morte. Ce qui me mit la larve à l'oreille? Son ventre GROUILLAIT d'asticots noirs et blancs. La masse de larves (environ une cuillère à soupe très très comble) ROULAIT dans la carcasse et les figures de couleurs changaient très rapidement.

C'est que, comme les asticots prennent la couleur de ce qu'ils ingurgitent, les asticots blancs "bousculaient" intensément les noirs afin de se nourrir de la chair de grenouille en putréfaction et les noirs, coquins affamés, s'écriaient "Holà, nous étions là avant!".

4. Il m'arrive parfois de pleurer sur la densité de l'amour que je voue à mon homme. L'amour me touche, me bouleverse. Je réfléchis souvent à son aspect philosophique. Je suis épicurienne et l'amour me chavire, me distrait, m'enivre et m'emballe. Je suis habitée entièrement par l'objet de mon amour.

Tout cela est certes magnifique, mais parfois, tant de densité amoureuse est épuisant et j'aime beaucoup mon sentiment d'indépendance.

5. Enceinte, je suis insupportable. Si je le pouvais, je me sauverais moi-même de moi. Plus j'ai d'enfants, pire est la grossesse suivante. Je me qualifie de veuve noire. L'homme à mes côtés doit être fort et flexible. Il doit 1) se doter d'un bouclier anti-venin, 2) Être disponible, solide et doux lorsque j'ai besoin de réconfort (c'est épuisant de baigner dans son propre venin pendant neuf mois) et 3) M'aimer beaucoup, BEAUCOUP.

Enceinte, je suis imprévisible, susceptible, vulnérable. Et pas juste émotive comme une femme enceinte normale, nenon, moi, je suis ÉPOUVANTABLE. Je suis chiante, je suis impatiente, je suis incohérente à puissance dix.

"Enceinte"...Juste d'y penser et j'en ai des frissons d'exaspération. Je suis un calvaire ambulant. À un point tel que je trouve mon chum suicidaire -et sadique- d'espérer un autre enfant -de moi.

Ma mère m'a déjà confié que je n'avais pas besoin de dépenser d'argent (des fortunes en ce qui me concerne) pour les tests de grossesse; qu'on pouvait palper mes hormones gratis simplement via mon ton. Acerbe. Mordant. Brrr.

Le simple fait de l'évoquer me perturbe. Enceinte et sans dictionnaire alors là, c'est ma folie assurée.

6 commentaires:

Anonyme a dit...

Oui, c'est vrai qu'elle est absolument insupportable enceinte. Je dois être présent et assez loin, flexible et solide comme le roc, faire une chose et son contraire selon les méandres complexes de ses humeurs... Je me fais chêne ET roseau pour survivre aux ouragans durant neuf mois.

Et je veux un autre enfant malgré celà ? Quand une femme pleure devant la densité de l'amour qu'elle porte à son homme, qui ne songerait pas à fonder une grande famille, à donner vie, donner la vie, à un amour si profond et bien sûr... partagé !

Toutefois, vos mots d'encouragement seront évidemment les bienvenus lorsque le projet se concrétisera !!!

Jessica a dit...

Super, je ne suis plus seule avec ma folie des dictionnaires! C'est l'enfer chercher un mot quand je révise un texte, je dois m'empêcher de regarder les autres mots, parce que si je tombe sur un mot que je ne connais pas... évidemment, je dois lire la définition! Alors, un travail de 20 minutes, se transforme en 1 heure...

Mais c'est tellement une douce folie :)

Pur bonheur a dit...

@ Grand homme : sois certain que l'on sera là pour te supporter à travers l'épreuve.
Et toi aussi Grande Dame, tu pourras compter sur nous pour tes vagues à l'âme et tes poussées hormonales.

Shônia a dit...

Tu partage le dégoût d'Isaac pour les asticot, depuis qu'il en a retrouvé un en croquant dans un chocolat de Sans-Valentin vieux de 3 ans... maintenant il me demande régulièrement, "Est-ce qu'il y a des asticot dedans maman?"!

Pis moi, je t'adore enceinte, Grand-Homme, on fera la garde partagé de ta douce si tu veux!

Anonyme a dit...

j'aime mon homme d'un amour similaire... Parfois je nous regarde et les larmes me montent aux yeux et je ris... parce que c'est...beau ;)

Joss a dit...

Que c'est bon de te retrouve ret de revenir te lire...
Tu m'as manqué!
J'aimerais bien avoir une ligne direct pour chez toi, car souvent j'écris et j'ai besoin d'un mot ou d'une expression alors je demande tout fort: "Quel mot voudrait dire tel chose...?" Avant, c'est Chum qui venait à mon secours, mais maintenant qu'il n,ets plus là, je cris souvent dans le vide de mon appart et c'est Margot qui me réponds avec un coup de museau trempé et froid...
Hi! Hi!
On se complèterait bien, non?
XXX