vendredi, janvier 15, 2010

Renoncer

Je vis parfois les renoncements que j'ai fait dans ma vie comme des déceptions de tout ce qui aurait pu être mais qui ne sera jamais. Des possibilités perdues, envolées. Quantifier tout ce qui aurait pu être me désole, m'attriste. C'est maso, un peu con quand ça devient une entrave à explorer de nouvelles possibilités là, avec le capital que l'on possède maintenant.

Renoncer à quelque chose que l'on avait d'abord à tort tenu pour acquis, envisagé sincèrement, puis espéré naïvement. Pour l'obtenir, par bonne volonté, avoir tassé plusieurs de ses principes, écrabouillé ses valeurs et raisonné son senti au prix d'une déchirure béante, d'un ineffable malaise. Sourire de désabusement en regardant derrière, en évaluant tristement la manière dont on s'est marché sur le coeur, dont on a bafoué son authenticité, dont on s'est empêtré dans d'impossibles dualités, dont on a été à l'encontre de ses besoins et de ses intérêts en y perdant au change.

Réaliser qu'on a fini par s'y perdre soi. Souhaiter pouvoir revivre ce pan de sa vie avec sa solidité intérieure actuelle pour tout corriger, mais ne pas pouvoir. Ne plus jamais pouvoir car la solidité de ses convictions d'aujourd'hui fut acquise au coût de ses quêtes (vaines), de ses luttes (épuisantes) d'hier.

Vient un moment où l'on s'arrête pour faire le point, où l'on est subitement habité par une sorte de lucidité-détachement qui nous fait voir les choses sous un autre angle, où l'on se rend compte que l'énergie investie pour obtenir quelque chose dépasse largement la valeur humaine de ce qu'on en a retiré.

On réalise alors qu'il est juste temps de passer à autre chose, de prendre une autre voie, d'aiguiller ses énergies ailleurs, là où nos aspirations -quelles qu'elles soient- sont fluides, accessibles, envisageables, garantes de plaisir, de bonheur et d'équilibre et surtout, ne nécessitent pas de renoncer à notre essence propre.

Renoncer ne représente alors plus une source de rancoeur et de déception. Renoncer devient la chose à faire pour préserver son intégrité, son amour-propre, pour s'ouvrir à de nouvelles perspectives. Il faut parfois savoir se retirer.
Ce que je fais.
(Avec élégance, c'est encore mieux).

12 commentaires:

La Mère Michèle a dit...

Renoncer, c'est faire de nouveaux choix en fonction de notre réalité actuelle. C'est très sain, quand c'est mûrement réfléchi et voulu.

ophise a dit...

On m'avait appris que... choisir c'est renoncer...
Toujours difficile.

Une vie comme une autre a dit...

Est-ce que nous devons comprendre que vous nous dites aurevoir?

Si c'est le cas, vos écrits vont beaucoup me manquer. Votre façon de nous faire partager votre réalité m'a toujours beaucoup touché.

Si ce n'est qu'un constat, je ne peux qu'être d'accord avec vous. Souvent, pour moi renoncer veut dire échouer... Je sais ce n'est pas (toujours) vrai. Mais j'avoue bien humblement que j'ai bien de la misère avec le "lâcher prise"...

Valérie Carreau a dit...

Renoncer pendant qu'il est encore temps. Partir de haut pour se souvenir de l'agréable, de la force, de l'euphorisant plaisir de rêver. Pour ne jamais atteindre l'écœurement, le cynisme. Pour regarder derrière et encore être heureux.

ClaudeL a dit...

si en effet ce renoncement, c'est un retrait de la blogosphère, je relirai donc vos billets que je n'ai pas eu le temps de lire puisque je viens à peine de vous trouver.
Merci pour tout et bonne chance.

Pur bonheur a dit...

Depuis quelques semaines je fais moi aussi ce constat. Mon bébé aura 22 ans en mai. Temps pour redéfinir mon rôle de mère après avoir tant donné durant 31 ans.
Belle réflexion Grande Dame.

Pasbiengrande a dit...

C'est curieux le hasard, je renonce aujourd'hui à mon blog. Pour de nombreuses raisons, la principale étant la volonté d'arrêter de sacrifier mon sommeil pour raconter ma vie et celle de mon bébé à ceux qui sont loin, qui ne peuvent pas participer à celle-ci. Mais voilà, au lieu depredre mon temps à courir pour raconter ma vie, j'arrête de renoncer à la vivre et j'y mords à pleines dents.
Je ne sais pas à quoi vous renoncer Grande Dame, votre livre? votre blog? mais si c'est ce dernier vous allez me manquer.

bolnuuk a dit...

un très beau billet. Je vous lis religieusement et vous adore. Vous savez tellement bien écrire. renoncer...un billet fantastique. ca ferait une très belle chanson.On peut tous y associez un événement. Vos mots tombent tellement à point. J'en avais de besoin. merci et je continuerai de vous lire si vous ne renoncez pas à écrire.

Nanou La Terre a dit...

Grande Dame,
moi j'aime bien ce paragraphe:

"Vient un moment où l'on s'arrête pour faire le point, où l'on est subitement habité par une sorte de lucidité-détachement qui nous fait voir les choses sous un autre angle, où l'on se rend compte que l'énergie investie pour obtenir quelque chose dépasse largement la valeur humaine de ce qu'on en a retiré."

Lucidité... Je pense que tu es dans une voie de changement profond. Pas mauvais. Je dirais même indispensable...

Anonyme a dit...

Renoncer à des rêves de «jeunesse» ou à des projets élaborés dans des circonstances bien précises de notre vie, peut être aussi tout simplement changer. Changer, évoluer, se transformer, mieux se connaître, apprendre ce que l'on veut vraiment... Changer de priorités pour un temps, ou pour longtemps... La vie est mouvement.

Ta réflexion est très belle et saine Grande Dame, comme toujours.

France

Une femme libre a dit...

Coudons,avez-vous poussé le renoncement jusqu'à l'abandon de votre blogue? Je m'ennuie de vous.

Grande-Dame a dit...

Oui, de nouveaux choix en fonction de nos préoccupations, de nos valeurs et notre authenticité. Le plus important: se sentir confortable avec ses décisions.

Je ne faisais pas référence à une éventuelle fermeture de blog mais merci à celles qui m'ont laissé un mot et permis du même coup de découvrir de nouveaux blogs.