Je manque de temps.
Entre toutes mes obligations, je travaille fort pour rentabiliser chaque minute.
Pourtant, je suis choyée.
J'ai du temps.
J'ai du temps car je suis travailleure autonome (lire que j'en ai pas plus qu'une autre mais que je le gère comme je le décide).
Je peux choisir de travailler selon ce qui me convient comme horaire.
Mes obligations, c'est moi qui me les impose.
Je suis là pour aller conduire mes minis à l'école quand on est trop à la course, je suis là pour les accueillir à la maison le midi si on manque de temps pour préparer les lunchs le matin.
Je suis là pour accueillir mes ados qui rentrent de l'école no stresssss ou mes minis qui se sont entretués sur le chemin du retour. Je peux préparer des biscuits ou des muffins si je le décide.
Si JE LE DÉCIDE.
C'est précieux ça.
Je peux aller chiller au café avec mon grand mini bébé d'amour et mon amoureux le matin si le coeur m'en dit.
Je peux planifier le souper pour 19h ou 19h30 si je le décide ainsi -ce que je fais chaque soir- parce qu'entre vous et moi, bouffer à 18h c'est ennuyeux.
J'écoutais hier soir un de mes fils et j'étais émue devant sa sensibilité, son empathie et sa compassion. Je suis choyée car j'ai du temps. Le temps de m'asseoir et d'écouter.
Bon, je suis expéditive de nature, c'est vrai. Mais j'ai la possibilité de prendre mon temps.
Et quand il arrive que je le prenne pour vrai, eh bien je suis émue. Et je braille.
Et vous savez quoi?
Je peux prendre le temps de brailler parce que j'AI DU TEMPS.
Grande Dame
Aléas familiaux d'une mère de famille nombreuse et autres réflexions éclectiques
lundi, janvier 12, 2015
mercredi, décembre 17, 2014
Si tu les avais connus plus longtemps (2 de 2)
Ou si tu les avais connus, tout simplement.
Il est vrai que d'où tu es, tu as la chance inouïe de profiter de la présence de mon petit Thomas. Qu'est-il devenu papa? A-t-il encore cette présence apaisante et ce regard intense? Si tu savais comme j'aimerais le revoir pour refaire mes provisions de lui...me gaver de sa chaleur enivrante...
Il aimait tant la musique, nul doute que tu as su le contenter avec tes airs festifs de guitare et d'accordéon. J'aurais aimé pouvoir te parler de lui mais je ne peux pas. Il n'y a pourtant pas une journée qui passe sans que son souvenir ne m'habite.
La dernière fois que tu as vu Frédéric il avait un peu plus de 2 ans. Il se "rappelle" de toi jouant au ballon avec lui (merci vidéo). J'aime qu'il ait un "souvenir" de toi et j'aurais tant aimé qu'il te connaisse plus longtemps. Tu l'aurais assurément marqué. C'est un petit garçon sensible, insécure et ouvert aux autres. Il est aussi terriblement entêté et je sais bien que cet aspect de lui t'aurait fait pester.
Tu lui aurais répété qu'il a des yeux magnifiques. Il a hérité de la verdure des yeux de son papa. Il a le "pourquoi" facile et insatiable. Aurais-tu su aller au bout de ses interminables questions? Il est vif d'esprit, curieux, logique et intelligent. Il ne le sait pas encore mais il est solide.
En lui il y a autant de colère que de douceur et de vulnérabilité et son intensité parfois me déroute. Quand on lui accord du temps, il baisse sa garde, parle et n'est alors plus arrêtable. C'est un petit garçon attachant qui a énormément à offrir. Il aime rendre service mais il est susceptible et saurait assurément gagner la médaille d'or de l'orgueil. Il faut savoir comment le prendre pour obtenir de lui ce qu'on souhaite.
Peu après ton départ je suis devenue enceinte d'une surprise...qui s'est avérée être une petite fille. Mon coeur a fondu. Tu en aurais été fou, je le sais. Elle aurait obtenu de toi tout ce qu'elle aurait pu vouloir. Désolée de te l'apprendre: tu aurais été faible avec elle, tu n'aurais pas résisté à ses grands yeux bleus et son ton impératif. Tu aurais souri, amoureux, conquis.
À la fois décidée et émotive, elle ne donne pas sa place dans la fratrie. Elle aime beaucoup ses grands frères, c'est un boss-des-bécosses efficace et exaspérante. Elle est grande et petite à la fois.
Quand elle est triste, elle se cache dans ses "spots" sombres pour pleurer en silence loin de toute attention. Elle est désorganisée mais aime organiser des spectacles. Sa tristesse, par contre, se vit loin des regards.
Pour clore notre belle grande famille, j'ai mis au monde une deuxième fille, Evelyne. Frédéric me corrigerait: PAPA a mis au monde Evelyne puisqu'elle est arrivée si vite qu'elle est née sur le divan à la maison, accueillie par les mains de son père. Je n'ai pas vraiment été impliquée, c'est papa qui a fait tout le boulot. ;) Cette enfant est arrivée sous les yeux de presque toute sa fratrie. Ne manquait que Fils Ainé, qui vit à des centaines de km d'ici.
Bébé n'a que trois mois et si tu la voyais, ton coeur fondrait aussi. Elle est adorablement chevelue, belle brunette, elle est discrète, posée, indépendante. Pas question de la trimballer toujours sur nous. Elle nous fait savoir clairement quand elle en a marre de toutes ces petites mains et cette chaleur humaine. Elle désire son espace intouché. Si petite mais déjà elle souhaite faire respecter ses besoins.
Bon il est plus de 20h, le souper est prêt. Je m'arrête ici. Continue de prendre bien soin de notre petit homme là-haut. Je t'aime mon cher papa.
PS Cette fois, c'est vraiment fini la famille. Tu peux reposer en paix.
Il est vrai que d'où tu es, tu as la chance inouïe de profiter de la présence de mon petit Thomas. Qu'est-il devenu papa? A-t-il encore cette présence apaisante et ce regard intense? Si tu savais comme j'aimerais le revoir pour refaire mes provisions de lui...me gaver de sa chaleur enivrante...
Il aimait tant la musique, nul doute que tu as su le contenter avec tes airs festifs de guitare et d'accordéon. J'aurais aimé pouvoir te parler de lui mais je ne peux pas. Il n'y a pourtant pas une journée qui passe sans que son souvenir ne m'habite.
La dernière fois que tu as vu Frédéric il avait un peu plus de 2 ans. Il se "rappelle" de toi jouant au ballon avec lui (merci vidéo). J'aime qu'il ait un "souvenir" de toi et j'aurais tant aimé qu'il te connaisse plus longtemps. Tu l'aurais assurément marqué. C'est un petit garçon sensible, insécure et ouvert aux autres. Il est aussi terriblement entêté et je sais bien que cet aspect de lui t'aurait fait pester.
Tu lui aurais répété qu'il a des yeux magnifiques. Il a hérité de la verdure des yeux de son papa. Il a le "pourquoi" facile et insatiable. Aurais-tu su aller au bout de ses interminables questions? Il est vif d'esprit, curieux, logique et intelligent. Il ne le sait pas encore mais il est solide.
En lui il y a autant de colère que de douceur et de vulnérabilité et son intensité parfois me déroute. Quand on lui accord du temps, il baisse sa garde, parle et n'est alors plus arrêtable. C'est un petit garçon attachant qui a énormément à offrir. Il aime rendre service mais il est susceptible et saurait assurément gagner la médaille d'or de l'orgueil. Il faut savoir comment le prendre pour obtenir de lui ce qu'on souhaite.
Peu après ton départ je suis devenue enceinte d'une surprise...qui s'est avérée être une petite fille. Mon coeur a fondu. Tu en aurais été fou, je le sais. Elle aurait obtenu de toi tout ce qu'elle aurait pu vouloir. Désolée de te l'apprendre: tu aurais été faible avec elle, tu n'aurais pas résisté à ses grands yeux bleus et son ton impératif. Tu aurais souri, amoureux, conquis.
À la fois décidée et émotive, elle ne donne pas sa place dans la fratrie. Elle aime beaucoup ses grands frères, c'est un boss-des-bécosses efficace et exaspérante. Elle est grande et petite à la fois.
Quand elle est triste, elle se cache dans ses "spots" sombres pour pleurer en silence loin de toute attention. Elle est désorganisée mais aime organiser des spectacles. Sa tristesse, par contre, se vit loin des regards.
Pour clore notre belle grande famille, j'ai mis au monde une deuxième fille, Evelyne. Frédéric me corrigerait: PAPA a mis au monde Evelyne puisqu'elle est arrivée si vite qu'elle est née sur le divan à la maison, accueillie par les mains de son père. Je n'ai pas vraiment été impliquée, c'est papa qui a fait tout le boulot. ;) Cette enfant est arrivée sous les yeux de presque toute sa fratrie. Ne manquait que Fils Ainé, qui vit à des centaines de km d'ici.
Bébé n'a que trois mois et si tu la voyais, ton coeur fondrait aussi. Elle est adorablement chevelue, belle brunette, elle est discrète, posée, indépendante. Pas question de la trimballer toujours sur nous. Elle nous fait savoir clairement quand elle en a marre de toutes ces petites mains et cette chaleur humaine. Elle désire son espace intouché. Si petite mais déjà elle souhaite faire respecter ses besoins.
Bon il est plus de 20h, le souper est prêt. Je m'arrête ici. Continue de prendre bien soin de notre petit homme là-haut. Je t'aime mon cher papa.
PS Cette fois, c'est vraiment fini la famille. Tu peux reposer en paix.
dimanche, octobre 05, 2014
Si tu les avais connus plus longtemps (1 de 2)
Dès le départ, tu les as admirés et aimés de tout ton coeur. En dépit de toutes tes inquiétudes. Que je manque d'argent, que je ne termine pas mes études, que je manque de caractère pour faire face à tous les impondérables de la vie....Non. Ce dernier point, chaque fois que tu as pu en douter, tu t'es rétracté et m'as souligné avec émotion comme cela te rassurait que j'aie suffisamment de force et de détermination pour faire face à l'adversité.
J'ai eu un autre enfant, papa.
Oui, un AUTRE. De ton vivant tu t'en serais inquiété. Mais plus maintenant je le sais. Tu me connais assez pour savoir que je gère. Je fais les coins ronds parfois, nécessité oblige, mais je gère. Je suis loin d'être une mère exemplaire mais je fais de mon mieux et je les aime plus que tout, du premier au dernier.
Je sais combien tu aurais été comblé aussi dans ton rôle de papi. Si tu les avais connus plus longtemps, tu aurais été totalement conquis. Je veux dire, encore plus que tu ne l'étais déjà.
Si tu l'avais connu plus longtemps, tu aurais constaté à quel point celui que tu appelais jadis "mon ti-pou" ou encore "Charlot", ton premier petit-fils est devenu un fabuleux jeune homme. Il a quitté la maison depuis plus d'un an déjà, il vit à Baie-Comeau pour étudier. Tu serais tellement fier de savoir que mes enfants étudient et qu'ils excellent à l'école ! Tu serais fier de la rigueur de Charles. Il t'impressionnerait par son intégrité, son sens de l'engagement et des responsabilités, sa maturité, sa débrouillardise et aussi...sa ravissante amoureuse que tu complimenterais sans arrêt...doublement parce qu'elle est réservée et que l'insistance de tes mots charmeurs la rendrait sans doute mal à l'aise.
Nul doute que tu discuterais d'actualité avec Fils Aîné. Tu le trouverais passionné d'environnement, d'équité, de justice sociale...et tu ne manquerais pas de lui souligner comme il te fait penser à moi au même âge. Tu serais ému en le regardant et tu lui glisserais parfois un ou deux billets de 20$ en le regardant quitter ta demeure...Juste pour le plaisir de lui faciliter la vie. Toi qui étais plutôt casanier tes dernières années, peut-être te serais-tu proposé de faire la route jusqu'à Baie-Comeau par amour, bienveillance et par simple curiosité d'aller voir "comment il est installé là-bas".
Tu te rappelles sans doute de la personnalité flamboyante de Grand-Charme. Si tu l'avais connu plus longtemps, tu aurais constaté qu'il n'a rien perdu de sa verve, loin de là. Comme toi il se démarque par son magnétisme, ses couleurs propres, sa créativité, sa vivacité d'esprit. On recherche et apprécie sa compagnie parce qu'il est sensible aux autres et qu'il nous fait rire. Je m'étonne régulièrement de constater comme il te ressemble: les mêmes mains osseuses, la même silhouette filiforme, les mêmes yeux creux, le même teint basané, des traits de personnalité communs...et même aussi ta manière de te soustraire à certaines obligations en te fiant sur les autres...on ne pouvait rien te refuser....On aimait tant demeurer dans tes bonnes grâces ! Grand-Charme est conscient de te ressembler et quand nous voyons ta famille et qu'elle lui souligne vos ressemblances, le voilà parfaitement comblé. Si tu rencontrais sa belle Péruvienne, je le sais, tu t'efforcerais d'apprendre des mots en espagnol pour l'impressionner....Pathétique charmeur, va !
Si tu as d'abord eu du mal à comprendre la nature indépendante, calme et sérieuse de Tout -Doux, tu as rapidement appris à la respecter. Tu te rappelles: après 1h15 de route, nous arrivions chez toi. Aussitôt réveillés, les enfants se précipitaient pour vous sauter dans les bras à Marianne et toi. Sauf lui. Il vous ignorait. Tu lui adressais la parole et il regardait ailleurs, imperturbable. Ça t'insultait, tu te fâchais, devenais grognon. Je te disais: "Papa, tu le sais, Tout-Doux n'a pas le même rythme que les autres. Il faut le laisser se réveiller, il "dégèlera" et il te sautera dans les bras un peu plus tard."
Tu te calmais et il allait se blottir contre toi quelques instants plus tard...quand lui l'avait décidé. Il n'avait pas encore 2 ans. Tu as appris à respecter son rythme. Son sérieux. Ce n'était pas un enfant rieur. Il est toujours aussi "intérieur", solitaire, impassible et très peu spontané. Il est bien ainsi. Toutefois, il a beaucoup changé ces deux dernières années. Il a développé de l'auto-dérision, une grande curiosité. C'est un fin observateur. Il est même habilement baveux. Il ne parle pas souvent mais il est ultra-lucide. Il nous étonne quand il se met à nous parler de tel conquérant, de ses stratégies de guerre ou de l'étendue de ses territoires géographiques. Il s'exprime bien, aide ses frères en français. Où cueille-t-il toutes ces informations? Il connait un tas de trucs qu'il garde pour lui alors qu'il aurait de quoi gagner des crédits pour son excellente culture...mais se vanter n'est pas dans sa nature. Il est discret et ne se donne pas à connaitre si facilement. Une journée, c'est à peine s'il te dira bonjour et le lendemain, le voilà allumé, passionné à te raconter un phénomène scientifique qui le fascine. Il ne sera alors plus arrêtable, mieux vaut donc avoir du temps à lui consacrer. Ces moments avec lui sont précieux.
C'est un grand altruiste dans l'âme même s'il trouve souvent les humains trop compliqués. Il préfère les animaux, ils sont moins de trouble. C'est depuis que nous avons notre grosse mongole (une jeune chienne angoissée disqualifiée chez Mira) que Tout-Doux a commencé à rire. C'est étonnant, je sais, mais je ne l'avais jamais entendu rire aux éclats avant d'avoir ce chien. Il avait pourtant 12 ans !
Il se propose souvent pour me faire des massages et il s'y applique vraiment. Il est d'une grande patience, une qualité que ni toi ni moi ne possédons. Il est conscient de l'ampleur de mes maux de dos et me fait beaucoup de bien. C'est une âme généreuse qui donne sans compter. Je lui dis qu'il pourrait facilement travailler en relation d'aide plus tard vu son calme rassurant, sa véritable écoute, son empathie, sa compréhension naturelle de l'humain, sa capacité à lire entre les lignes. Ça ne l'intéresse pas. Il aura 15 ans dans quelques jours. Je suis confiante, il me rend si fière, il trouvera sa voie.
Coco avait tout juste 6 ans quand tu nous as quittés. Il garde bien peu de souvenirs de toi. Et toi, qu'as-tu gardé de lui? Jamais tu n'oublieras sa naissance, je le sais. Tu étais si fier de l'accueillir avec nous !
Il a maintenant 13 ans. Je l'admire pour son exquise intégrité. Ce beau garçon est fidèle à lui-même, authentique sous toutes ses coutures: dans ses colères (de mieux en mieux dosées, bravo), dans ses élans de bonne humeur, dans sa générosité. Pour écoeurer ses frères aussi. Il a de l'humour, une adorable subtilité et un ravissant vocabulaire. Il est délicat, fiable et diplomate. Il n'aime pas faire de la peine aux autres et comme ses frères, il fait preuve d'une belle gratitude quand on lui offre quelque chose. Il ne prend rien pour acquis et sait s'excuser quand il le faut. On l'amène au cinéma, on commande du resto? Il sait que c'est un spécial et il pense à remercier. J'apprécie cela, qu'il sache être reconnaissant. Tu apprécierais aussi sa politesse parce que tsé, "les jeunes de nos jours sont si impolis..."
Récemment il m'a raconté s'être senti mal à l'aise d'entendre son jeune frère quémander des cadeaux à son autre papi au téléphone (ma fille avait fait la même chose à son arrière-grand-mère quelques jours plus tôt). Les enfants vieillissent, commencent à intégrer certains "codes de civilité"...quand ce n'est pas moi qui leur explique ce qui ne se fait pas, les plus vieux s'en chargent. "On ne peut pas exiger un cadeau, voyons !!" Les petits se demandent pourquoi, essaient d'intégrer la réponse.
Si tu avais connu plus longtemps mon Coco, tu serais amusé, fier de sa droiture, de son honnêteté, de la petite lueur d'espièglerie qui brille dans ses yeux bleus. Son esprit est vite comme l'éclair, tu aimerais sa répartie. Même quand il est posé et détaché, on voit bien que son cerveau n'est jamais éteint. Ses yeux parlent, ses silences aussi. Il a le "move". Il devrait danser, je le lui répète, il bouge tellement bien ! Il refuse net, ne reconnait pas son talent. La jeune fille qui gagnera son coeur sera choyée...j'ai déjà hâte de la rencontrer car si elle gagne son estime c'est qu'elle aussi sera une demoiselle exceptionnelle...
(à suivre...)
J'ai eu un autre enfant, papa.
Oui, un AUTRE. De ton vivant tu t'en serais inquiété. Mais plus maintenant je le sais. Tu me connais assez pour savoir que je gère. Je fais les coins ronds parfois, nécessité oblige, mais je gère. Je suis loin d'être une mère exemplaire mais je fais de mon mieux et je les aime plus que tout, du premier au dernier.
Je sais combien tu aurais été comblé aussi dans ton rôle de papi. Si tu les avais connus plus longtemps, tu aurais été totalement conquis. Je veux dire, encore plus que tu ne l'étais déjà.
Si tu l'avais connu plus longtemps, tu aurais constaté à quel point celui que tu appelais jadis "mon ti-pou" ou encore "Charlot", ton premier petit-fils est devenu un fabuleux jeune homme. Il a quitté la maison depuis plus d'un an déjà, il vit à Baie-Comeau pour étudier. Tu serais tellement fier de savoir que mes enfants étudient et qu'ils excellent à l'école ! Tu serais fier de la rigueur de Charles. Il t'impressionnerait par son intégrité, son sens de l'engagement et des responsabilités, sa maturité, sa débrouillardise et aussi...sa ravissante amoureuse que tu complimenterais sans arrêt...doublement parce qu'elle est réservée et que l'insistance de tes mots charmeurs la rendrait sans doute mal à l'aise.
Nul doute que tu discuterais d'actualité avec Fils Aîné. Tu le trouverais passionné d'environnement, d'équité, de justice sociale...et tu ne manquerais pas de lui souligner comme il te fait penser à moi au même âge. Tu serais ému en le regardant et tu lui glisserais parfois un ou deux billets de 20$ en le regardant quitter ta demeure...Juste pour le plaisir de lui faciliter la vie. Toi qui étais plutôt casanier tes dernières années, peut-être te serais-tu proposé de faire la route jusqu'à Baie-Comeau par amour, bienveillance et par simple curiosité d'aller voir "comment il est installé là-bas".
Tu te rappelles sans doute de la personnalité flamboyante de Grand-Charme. Si tu l'avais connu plus longtemps, tu aurais constaté qu'il n'a rien perdu de sa verve, loin de là. Comme toi il se démarque par son magnétisme, ses couleurs propres, sa créativité, sa vivacité d'esprit. On recherche et apprécie sa compagnie parce qu'il est sensible aux autres et qu'il nous fait rire. Je m'étonne régulièrement de constater comme il te ressemble: les mêmes mains osseuses, la même silhouette filiforme, les mêmes yeux creux, le même teint basané, des traits de personnalité communs...et même aussi ta manière de te soustraire à certaines obligations en te fiant sur les autres...on ne pouvait rien te refuser....On aimait tant demeurer dans tes bonnes grâces ! Grand-Charme est conscient de te ressembler et quand nous voyons ta famille et qu'elle lui souligne vos ressemblances, le voilà parfaitement comblé. Si tu rencontrais sa belle Péruvienne, je le sais, tu t'efforcerais d'apprendre des mots en espagnol pour l'impressionner....Pathétique charmeur, va !
Si tu as d'abord eu du mal à comprendre la nature indépendante, calme et sérieuse de Tout -Doux, tu as rapidement appris à la respecter. Tu te rappelles: après 1h15 de route, nous arrivions chez toi. Aussitôt réveillés, les enfants se précipitaient pour vous sauter dans les bras à Marianne et toi. Sauf lui. Il vous ignorait. Tu lui adressais la parole et il regardait ailleurs, imperturbable. Ça t'insultait, tu te fâchais, devenais grognon. Je te disais: "Papa, tu le sais, Tout-Doux n'a pas le même rythme que les autres. Il faut le laisser se réveiller, il "dégèlera" et il te sautera dans les bras un peu plus tard."
Tu te calmais et il allait se blottir contre toi quelques instants plus tard...quand lui l'avait décidé. Il n'avait pas encore 2 ans. Tu as appris à respecter son rythme. Son sérieux. Ce n'était pas un enfant rieur. Il est toujours aussi "intérieur", solitaire, impassible et très peu spontané. Il est bien ainsi. Toutefois, il a beaucoup changé ces deux dernières années. Il a développé de l'auto-dérision, une grande curiosité. C'est un fin observateur. Il est même habilement baveux. Il ne parle pas souvent mais il est ultra-lucide. Il nous étonne quand il se met à nous parler de tel conquérant, de ses stratégies de guerre ou de l'étendue de ses territoires géographiques. Il s'exprime bien, aide ses frères en français. Où cueille-t-il toutes ces informations? Il connait un tas de trucs qu'il garde pour lui alors qu'il aurait de quoi gagner des crédits pour son excellente culture...mais se vanter n'est pas dans sa nature. Il est discret et ne se donne pas à connaitre si facilement. Une journée, c'est à peine s'il te dira bonjour et le lendemain, le voilà allumé, passionné à te raconter un phénomène scientifique qui le fascine. Il ne sera alors plus arrêtable, mieux vaut donc avoir du temps à lui consacrer. Ces moments avec lui sont précieux.
C'est un grand altruiste dans l'âme même s'il trouve souvent les humains trop compliqués. Il préfère les animaux, ils sont moins de trouble. C'est depuis que nous avons notre grosse mongole (une jeune chienne angoissée disqualifiée chez Mira) que Tout-Doux a commencé à rire. C'est étonnant, je sais, mais je ne l'avais jamais entendu rire aux éclats avant d'avoir ce chien. Il avait pourtant 12 ans !
Il se propose souvent pour me faire des massages et il s'y applique vraiment. Il est d'une grande patience, une qualité que ni toi ni moi ne possédons. Il est conscient de l'ampleur de mes maux de dos et me fait beaucoup de bien. C'est une âme généreuse qui donne sans compter. Je lui dis qu'il pourrait facilement travailler en relation d'aide plus tard vu son calme rassurant, sa véritable écoute, son empathie, sa compréhension naturelle de l'humain, sa capacité à lire entre les lignes. Ça ne l'intéresse pas. Il aura 15 ans dans quelques jours. Je suis confiante, il me rend si fière, il trouvera sa voie.
Coco avait tout juste 6 ans quand tu nous as quittés. Il garde bien peu de souvenirs de toi. Et toi, qu'as-tu gardé de lui? Jamais tu n'oublieras sa naissance, je le sais. Tu étais si fier de l'accueillir avec nous !
Il a maintenant 13 ans. Je l'admire pour son exquise intégrité. Ce beau garçon est fidèle à lui-même, authentique sous toutes ses coutures: dans ses colères (de mieux en mieux dosées, bravo), dans ses élans de bonne humeur, dans sa générosité. Pour écoeurer ses frères aussi. Il a de l'humour, une adorable subtilité et un ravissant vocabulaire. Il est délicat, fiable et diplomate. Il n'aime pas faire de la peine aux autres et comme ses frères, il fait preuve d'une belle gratitude quand on lui offre quelque chose. Il ne prend rien pour acquis et sait s'excuser quand il le faut. On l'amène au cinéma, on commande du resto? Il sait que c'est un spécial et il pense à remercier. J'apprécie cela, qu'il sache être reconnaissant. Tu apprécierais aussi sa politesse parce que tsé, "les jeunes de nos jours sont si impolis..."
Récemment il m'a raconté s'être senti mal à l'aise d'entendre son jeune frère quémander des cadeaux à son autre papi au téléphone (ma fille avait fait la même chose à son arrière-grand-mère quelques jours plus tôt). Les enfants vieillissent, commencent à intégrer certains "codes de civilité"...quand ce n'est pas moi qui leur explique ce qui ne se fait pas, les plus vieux s'en chargent. "On ne peut pas exiger un cadeau, voyons !!" Les petits se demandent pourquoi, essaient d'intégrer la réponse.
Si tu avais connu plus longtemps mon Coco, tu serais amusé, fier de sa droiture, de son honnêteté, de la petite lueur d'espièglerie qui brille dans ses yeux bleus. Son esprit est vite comme l'éclair, tu aimerais sa répartie. Même quand il est posé et détaché, on voit bien que son cerveau n'est jamais éteint. Ses yeux parlent, ses silences aussi. Il a le "move". Il devrait danser, je le lui répète, il bouge tellement bien ! Il refuse net, ne reconnait pas son talent. La jeune fille qui gagnera son coeur sera choyée...j'ai déjà hâte de la rencontrer car si elle gagne son estime c'est qu'elle aussi sera une demoiselle exceptionnelle...
(à suivre...)
samedi, septembre 20, 2014
Evelyne
Je me rappelle d'une fin de soirée il y a environ 11 ans. Les enfants étaient couchés, mon amoureux et moi étions assis sur le plancher du sous-sol et c'est là que j'ai senti bouger bébé Thomas dans mon ventre pour la première fois. C'est également ce soir-là que mon amoureux a, lui aussi senti son enfant à travers ma peau.
Il s'était inquiété que cette "première fois" ait moins d'importance pour moi parce que c'était ma cinquième "première fois". J'avais tenté de le rassurer: chaque grossesse était unique et ce bébé avait autant d'importance pour moi que les autres. Non, je ne m'émerveillais pas moins de cet instant singulier parce que c'était ma 5e grossesse. J'étais émue, bouleversée d'amour pour la pépite de petit gars qui grandissait en moi.
Il avait semblé avoir du mal à concevoir que ce fut possible et il avait téléphoné à sa maman, heureux de partager cet instant avec elle qui se réjouirait de son bonheur. J'avais été attristée qu'il ait du mal à me croire, moi qui étais si entière et si sincère dans mon émotion vis à vis ces premiers mouvements si précieux pour moi !
Il y a une semaine, notre bébé 8 est arrivée dans notre vie dans des circonstances particulières. Nous avons mis plusieurs jours à nous remettre de nos émotions. Depuis, dans le visage de l'homme de ma vie, la plus grande fierté du monde. Chaque fois que ses yeux se posent sur le nouveau-né qu'il a lui-même accueilli sur le divan de notre salle à manger, une explosion d'émotion et de fierté. Je vois bien à quel point il l'aime follement, combien elle le fascine et combien il se dévouerait pour elle.
Je ne puis m'empêcher de penser à son inquiétude d'il y a onze ans que les enfants subséquents aient moins d'importance ou de valeur que le premier. Est-ce que notre petite Evelyne a moins d'importance dans son coeur parce que c'est son quatrième enfant? En a-t-elle moins pour moi parce que c'est ma huitième merveille du monde?
Je rirais insolemment au visage de celui ou celle qui oserait douter de cela.
Evelyne occupe mes journées autant que mes nuits depuis son arrivée. Je passe des heures entières à la contempler à travers tous les futiles petits accomplissements d'une journée. Pour la huitième fois de ma vie, je m'émeus devant l'amour infini et inconditionnel que l'on peut porter à son enfant que l'on ne connait pourtant pas encore simplement parce que c'est le nôtre.
Notre brunette mignonette a tout juste huit jours, nos nuit sont plutôt carencées en sommeil, notre efficacité est déficiente, notre organisation chaotique et pourtant, nous ferions pour elle tout le nécessaire pour qu'elle soit la plus heureuse des petites filles.
Il s'était inquiété que cette "première fois" ait moins d'importance pour moi parce que c'était ma cinquième "première fois". J'avais tenté de le rassurer: chaque grossesse était unique et ce bébé avait autant d'importance pour moi que les autres. Non, je ne m'émerveillais pas moins de cet instant singulier parce que c'était ma 5e grossesse. J'étais émue, bouleversée d'amour pour la pépite de petit gars qui grandissait en moi.
Il avait semblé avoir du mal à concevoir que ce fut possible et il avait téléphoné à sa maman, heureux de partager cet instant avec elle qui se réjouirait de son bonheur. J'avais été attristée qu'il ait du mal à me croire, moi qui étais si entière et si sincère dans mon émotion vis à vis ces premiers mouvements si précieux pour moi !
Il y a une semaine, notre bébé 8 est arrivée dans notre vie dans des circonstances particulières. Nous avons mis plusieurs jours à nous remettre de nos émotions. Depuis, dans le visage de l'homme de ma vie, la plus grande fierté du monde. Chaque fois que ses yeux se posent sur le nouveau-né qu'il a lui-même accueilli sur le divan de notre salle à manger, une explosion d'émotion et de fierté. Je vois bien à quel point il l'aime follement, combien elle le fascine et combien il se dévouerait pour elle.
Je ne puis m'empêcher de penser à son inquiétude d'il y a onze ans que les enfants subséquents aient moins d'importance ou de valeur que le premier. Est-ce que notre petite Evelyne a moins d'importance dans son coeur parce que c'est son quatrième enfant? En a-t-elle moins pour moi parce que c'est ma huitième merveille du monde?
Je rirais insolemment au visage de celui ou celle qui oserait douter de cela.
Evelyne occupe mes journées autant que mes nuits depuis son arrivée. Je passe des heures entières à la contempler à travers tous les futiles petits accomplissements d'une journée. Pour la huitième fois de ma vie, je m'émeus devant l'amour infini et inconditionnel que l'on peut porter à son enfant que l'on ne connait pourtant pas encore simplement parce que c'est le nôtre.
Notre brunette mignonette a tout juste huit jours, nos nuit sont plutôt carencées en sommeil, notre efficacité est déficiente, notre organisation chaotique et pourtant, nous ferions pour elle tout le nécessaire pour qu'elle soit la plus heureuse des petites filles.
vendredi, juillet 18, 2014
La mère du St-Hubert
Nous sommes casaniers. Ou paresseux. Ou bedon gratteux. Ou logistiquement limités. Reste que quand on sort au resto, plus souvent qu'autrement, on le fait quelquefois quand les grands sont chez leur père.
Il y a quelques mois (ouf oui, je pense à cette mère depuis tout ce temps), nous prenions notre repas tranquillos dans un St-Hubert avec les deux plus jeunes. À côté de nous, une femme seule et ses trois petites filles. Quatre ans, 2 ans et demi et 10 mois. Genre.
L'heure de partir. La femme commence à habiller ses filles. Celle du milieu a besoin d'aller à la toilette. Posée, la mère se lève, somme la "grande" de surveiller le bébé pendant qu'elle amène la "milieu" aux toilettes. J'observe, amusée et impressionnée.
Après un moment, le bébé commence à rechigner. La mère ouvre la porte des toilettes tout près, fait des coucous à son bébé fille puis retourne aux fesses de fillette du milieu. Bébé chiâle again, maman ressort pour faire des coucous.
Je souris.
Je l'ai trouvée hot.
Dire qu'il fut un temps où je fus aussi hot.
C'est intense avoir de jeunes enfants. Plusieurs jeunes enfants en même temps.
On a les bras pleins, on développe nos trucs, on fait de notre mieux.
Aujourd'hui c'est facile, les grands sont devenus des aidants naturels pour la jeune fratrie.
Eux aussi sont hot.
Je suis sortie de là impressionnée.
Autant d'elle que de moi, en me rappelant qu'il y eut une époque où j'avais autant d'énergie que de patience avec ma belle marmaille.
Il y a quelques mois (ouf oui, je pense à cette mère depuis tout ce temps), nous prenions notre repas tranquillos dans un St-Hubert avec les deux plus jeunes. À côté de nous, une femme seule et ses trois petites filles. Quatre ans, 2 ans et demi et 10 mois. Genre.
L'heure de partir. La femme commence à habiller ses filles. Celle du milieu a besoin d'aller à la toilette. Posée, la mère se lève, somme la "grande" de surveiller le bébé pendant qu'elle amène la "milieu" aux toilettes. J'observe, amusée et impressionnée.
Après un moment, le bébé commence à rechigner. La mère ouvre la porte des toilettes tout près, fait des coucous à son bébé fille puis retourne aux fesses de fillette du milieu. Bébé chiâle again, maman ressort pour faire des coucous.
Je souris.
Je l'ai trouvée hot.
Dire qu'il fut un temps où je fus aussi hot.
C'est intense avoir de jeunes enfants. Plusieurs jeunes enfants en même temps.
On a les bras pleins, on développe nos trucs, on fait de notre mieux.
Aujourd'hui c'est facile, les grands sont devenus des aidants naturels pour la jeune fratrie.
Eux aussi sont hot.
Je suis sortie de là impressionnée.
Autant d'elle que de moi, en me rappelant qu'il y eut une époque où j'avais autant d'énergie que de patience avec ma belle marmaille.
samedi, mars 22, 2014
Mistigri
La Vie vous réserve parfois des hiatus là où vous vous y attendiez le moins.
Voici le nôtre pour cet hiver...celui qui m'a fait sombrer dans un lourd sommeil, qui a modifié mes goûts, mon odorat et mes humeurs, qui a généré bien des réflexions pendant qu'il faisait tranquillement sa place au creux de moi.
Frédéric a proposé de l'appeler...Mistigri. Charmant non?
Eh oui, celle que l'on croyait notre dernière, notre Bébé fille, notre belle Choupette, la cerise féminine sur notre masculin sundae devra faire une petite place à BB8. :)
Voici le nôtre pour cet hiver...celui qui m'a fait sombrer dans un lourd sommeil, qui a modifié mes goûts, mon odorat et mes humeurs, qui a généré bien des réflexions pendant qu'il faisait tranquillement sa place au creux de moi.
Frédéric a proposé de l'appeler...Mistigri. Charmant non?
Eh oui, celle que l'on croyait notre dernière, notre Bébé fille, notre belle Choupette, la cerise féminine sur notre masculin sundae devra faire une petite place à BB8. :)
jeudi, mars 20, 2014
Une lettre, une femme
C'était il y a peut-être quatre ans. Mon père était décédé depuis deux ans. Sa femme m'avait remis une boîte avec des albums, des dossiers professionnels, les bottes de son uniforme de gendarme et quelques autres souvenirs qu'il gardait précieusement, lui qui n'était pas vraiment attaché à quoi que soit de matériel.
Cette boîte: un coffre aux trésors contenant des parcelles de lui. Mon père, si "socialement" généreux, si expansif, si plein d'aisance, de charme, de charisme et de volupté, était pourtant un homme secret.
Dans le coffre aux trésors, la lettre d'une femme.
Une lettre qui a changé ma vie.
Je ne connaissais pas cette femme qui avait traversé son parcours mais elle m'avait bouleversée et je devais le lui dire.
Elle se souvenait de moi et finalement j'ai réalisé que je me rappelais d'elle aussi. De ses enfants, surtout. J'avais 6 ans, mon frère 7. Sur le pas de la porte d'une maison, nous nous apprêtions à partir. Mon frère et moi étions intimidés par les deux petits garçons de 5 ou 6 ans qui se tenaient collés l'un près de l'autre sur les escaliers. Tous les quatre nous nous dévisagions, figés par notre gêne enfantine commune.
Les 27 années qui ont suivi -si-si, si longtemps- nous nous rappelions cet instant. "Tu te souviens papa des deux petits garçons dans l'entrée..." (je les appelais par leurs prénoms dont j'adorais la fluidité) Et les yeux de mon père s'illuminaient. "Oui, oui, c'est vrai, vous étiez si gênés...!" Et il souriait. Chaque fois que nous les évoquions, nous répétions inlassablement la même chose (il n'y avait rien à dire d'autre) et chaque fois un courant passait entre nous. Comme un secret (qui n'en était pas vraiment un) réactivé et qui nous liait à un moment dont nous nous rappelions l'âme avec précision. Étonnant comme on peut se rappeler l'émotion, le feeling d'un instant qui pourtant n'avait rien de significatif pour la petite fille que j'étais.
J'avais juste "oublié" le prénom de leur maman, qui est devenue ces 4 dernières années une des plus précieuses amies, confidentes et alliées de ma vie. Cette femme d'une rare authenticité fut un véritable coup de foudre pour moi.
En quelques échanges, nous eûmes l'impression de nous connaitre depuis toujours, comme deux vieilles amies liées par un "autrefois" inexplicable qui n'avait rien à voir avec notre "rencontre" furtive 29 ans plus tôt.
Ma considération fut totale, la sienne aussi. Il y avait en elle une objectivité, une sagesse, une innommable grandeur d'âme, une articulation des idées, une franchise merveilleuse livrée si authentiquement et avec un si heureux mariage de vérité crue et de doigté que celle-ci ne pouvait qu'être bien accueillie. Et le sucre béni de son humour, Ô bonheur, quel délice ! Elle savait saupoudrer là où il le fallait son auto-dérision et son cynisme tout autant que son raffinement. Elle était la professionnelle d'un dosage parfait entre sagacité, humour, élégance, générosité, délicatesse, intégrité, jugement, force de caractère et esprit.
Comme je me suis battue, souvent rageusement, pour trouver ma véritable place amoureuse et professionnelle ces dernières années ! Et elle, en retraitée qui avait connu des décennies plus tôt des batailles semblables, des doutes mais aussi des accomplissements professionnels, de me raconter combien avec du recul, la seule véritable réussite de sa vie était ses fils. On a tous besoin de se prouver notre valeur ailleurs qu'auprès de ses enfants mais au final, pour elle, sa maternité et l'éducation de ses fils l'emportait sur l'échelle des accomplissements. Elle était lucide pourtant, pas de ces mères aveuglées par la simple filiation qui idéalisent leurs enfants, les élèvent coûte que coûte au-dessus de tout et les érigent en Intouchables.
Non. Elle était fière mais réaliste.
Les responsabilités familiales, parfois lourdes quand on s'y dissout presque entièrement, prend tout son sens quand on constate avec émotion combien nos investissements d'amour, de temps, de franchise, de dévouement et de principes ont porté fruit des années plus tard. Elle en était là.
Depuis son arrivée dans ma vie, j'ai abandonné des luttes inutiles, des quêtes vaines. J'accepte et vis pleinement ce que je possède, j'apprécie mes réussites, aussi futiles ou discrètes soient-elles même si j'ai souvent l'impression de vivre dans l'ombre des réussites et ambitions professionnelles de mon amoureux, comme si c'était tout ce qui compte dans une vie. J'accorde davantage de valeur à ce qui ne possède pas d'unité de mesure quantifiable.
Mes incertitudes, mes doutes, mes luttes parfois ridicules contre moi-même, elle a toujours su les reconnaitre et sans nécessairement le faire exprès, les désamorcer. C'est peut-être justement cette impression de sans faire exprès qui faisait d'elle une amie si exceptionnelle. Qui réussit à laisser savoir ce qu'elle pense mais qui ne brusque pas, qui n'impose pas. Et n'allez pas croire que c'est parce qu'elle n'avait pas d'opinions ou de convictions ! En belle personne authentique, on sentait bien ce qui l'animait, ce qui la faisait vibrer ou ce qui la révoltait ! Et des révoltes, elle en avait ! Elle les livrait si fougueusement qu'elle en devenait doublement et adorablement attachante.
Belle combative, pacifique belligérante, des combats, elle en a vécu aussi. Dans ses quêtes de femme, d'amoureuse éperdue qui aime, espère et attend, qui offre et donne sincèrement, dans ses blessures passées, dans sa bienveillance et sa volonté de vouloir préserver ceux qu'elle aime quitte à tout porter sur ses seules épaules d'inébranlable Reine Mère. Contre le cancer, aussi.
Elle aura lutté longtemps et en toute discrétion pour éviter d'imposer de la souffrance à tous ceux qu'elle aimait et qui redoutaient le retour de la Bête. Elle était consciente de ce que son corps portait, elle faisait les suivis qu'il fallait mais ne s'en faisait pas outre mesure. Elle avait compris qu'il faut profiter de la vie quand il le faut, se démener quand il le faut et lâcher prise quand il le faut.
Lâcher prise, elle a su le faire avec conscience, humour et élégance. Tout à fait à sa manière.
Même malade, la Reine Mère continuait d'habiter l'espace avec contenance, force et dignité. Elle savait user de dérision pour parler de sa mort imminente, elle savait maintenir un "climat d'au revoir" lucide mais sans triste grisaille.
Sa sérénité face à la mort était rassurante, apaisante.
Elle est partie tout doucement dimanche dernier entourée de ses précieux fils, de sa bru adorée et de sa grande amie et complice de toujours.
Malgré son départ, je ne puis qu'être émue, bouleversée d'amitié de ce départ empreint d'amour, d'humour et de quiétude. Je pourrais être triste bien davantage et cela viendra mais depuis 4 jours, je me sens si pleine de gratitude de l'avoir eue dans ma vie que je ne puis que me sentir choyée à puissance 10, heureuse que ses proches aient pu être auprès d'elle pour l'accompagner vers son dernier voyage. Je suis reconnaissante envers la Vie que cette amie exceptionnelle et magnifique grande âme libre ait pu partir aussi heureuse, aimante et accomplie.
Cette femme a su apaiser par la force tranquille de son amitié mes incessantes tempêtes intérieures. Elle m'a insufflé encore davantage le goût de la qualité, du dévouement maternel, du plaisir des choses simples, mon amour de l'humour. Sa personne entière m'a charmée et inspirée. Nos échanges, les interminables courriels, le bon vin et les fous rires en sa compagnie me manqueront.
Inimittable Reine Mère, merci mille fois d'avoir enrichi ma vie et tel que discuté, n'hésite jamais à passer me voir; je ne crains pas les fantômes et je tâcherai de garder des "bonbons roses" et du bon vin en stock en tout temps !
Cette boîte: un coffre aux trésors contenant des parcelles de lui. Mon père, si "socialement" généreux, si expansif, si plein d'aisance, de charme, de charisme et de volupté, était pourtant un homme secret.
Dans le coffre aux trésors, la lettre d'une femme.
Une lettre qui a changé ma vie.
Je ne connaissais pas cette femme qui avait traversé son parcours mais elle m'avait bouleversée et je devais le lui dire.
Elle se souvenait de moi et finalement j'ai réalisé que je me rappelais d'elle aussi. De ses enfants, surtout. J'avais 6 ans, mon frère 7. Sur le pas de la porte d'une maison, nous nous apprêtions à partir. Mon frère et moi étions intimidés par les deux petits garçons de 5 ou 6 ans qui se tenaient collés l'un près de l'autre sur les escaliers. Tous les quatre nous nous dévisagions, figés par notre gêne enfantine commune.
Les 27 années qui ont suivi -si-si, si longtemps- nous nous rappelions cet instant. "Tu te souviens papa des deux petits garçons dans l'entrée..." (je les appelais par leurs prénoms dont j'adorais la fluidité) Et les yeux de mon père s'illuminaient. "Oui, oui, c'est vrai, vous étiez si gênés...!" Et il souriait. Chaque fois que nous les évoquions, nous répétions inlassablement la même chose (il n'y avait rien à dire d'autre) et chaque fois un courant passait entre nous. Comme un secret (qui n'en était pas vraiment un) réactivé et qui nous liait à un moment dont nous nous rappelions l'âme avec précision. Étonnant comme on peut se rappeler l'émotion, le feeling d'un instant qui pourtant n'avait rien de significatif pour la petite fille que j'étais.
J'avais juste "oublié" le prénom de leur maman, qui est devenue ces 4 dernières années une des plus précieuses amies, confidentes et alliées de ma vie. Cette femme d'une rare authenticité fut un véritable coup de foudre pour moi.
En quelques échanges, nous eûmes l'impression de nous connaitre depuis toujours, comme deux vieilles amies liées par un "autrefois" inexplicable qui n'avait rien à voir avec notre "rencontre" furtive 29 ans plus tôt.
Ma considération fut totale, la sienne aussi. Il y avait en elle une objectivité, une sagesse, une innommable grandeur d'âme, une articulation des idées, une franchise merveilleuse livrée si authentiquement et avec un si heureux mariage de vérité crue et de doigté que celle-ci ne pouvait qu'être bien accueillie. Et le sucre béni de son humour, Ô bonheur, quel délice ! Elle savait saupoudrer là où il le fallait son auto-dérision et son cynisme tout autant que son raffinement. Elle était la professionnelle d'un dosage parfait entre sagacité, humour, élégance, générosité, délicatesse, intégrité, jugement, force de caractère et esprit.
Comme je me suis battue, souvent rageusement, pour trouver ma véritable place amoureuse et professionnelle ces dernières années ! Et elle, en retraitée qui avait connu des décennies plus tôt des batailles semblables, des doutes mais aussi des accomplissements professionnels, de me raconter combien avec du recul, la seule véritable réussite de sa vie était ses fils. On a tous besoin de se prouver notre valeur ailleurs qu'auprès de ses enfants mais au final, pour elle, sa maternité et l'éducation de ses fils l'emportait sur l'échelle des accomplissements. Elle était lucide pourtant, pas de ces mères aveuglées par la simple filiation qui idéalisent leurs enfants, les élèvent coûte que coûte au-dessus de tout et les érigent en Intouchables.
Non. Elle était fière mais réaliste.
Les responsabilités familiales, parfois lourdes quand on s'y dissout presque entièrement, prend tout son sens quand on constate avec émotion combien nos investissements d'amour, de temps, de franchise, de dévouement et de principes ont porté fruit des années plus tard. Elle en était là.
Depuis son arrivée dans ma vie, j'ai abandonné des luttes inutiles, des quêtes vaines. J'accepte et vis pleinement ce que je possède, j'apprécie mes réussites, aussi futiles ou discrètes soient-elles même si j'ai souvent l'impression de vivre dans l'ombre des réussites et ambitions professionnelles de mon amoureux, comme si c'était tout ce qui compte dans une vie. J'accorde davantage de valeur à ce qui ne possède pas d'unité de mesure quantifiable.
Mes incertitudes, mes doutes, mes luttes parfois ridicules contre moi-même, elle a toujours su les reconnaitre et sans nécessairement le faire exprès, les désamorcer. C'est peut-être justement cette impression de sans faire exprès qui faisait d'elle une amie si exceptionnelle. Qui réussit à laisser savoir ce qu'elle pense mais qui ne brusque pas, qui n'impose pas. Et n'allez pas croire que c'est parce qu'elle n'avait pas d'opinions ou de convictions ! En belle personne authentique, on sentait bien ce qui l'animait, ce qui la faisait vibrer ou ce qui la révoltait ! Et des révoltes, elle en avait ! Elle les livrait si fougueusement qu'elle en devenait doublement et adorablement attachante.
Belle combative, pacifique belligérante, des combats, elle en a vécu aussi. Dans ses quêtes de femme, d'amoureuse éperdue qui aime, espère et attend, qui offre et donne sincèrement, dans ses blessures passées, dans sa bienveillance et sa volonté de vouloir préserver ceux qu'elle aime quitte à tout porter sur ses seules épaules d'inébranlable Reine Mère. Contre le cancer, aussi.
Elle aura lutté longtemps et en toute discrétion pour éviter d'imposer de la souffrance à tous ceux qu'elle aimait et qui redoutaient le retour de la Bête. Elle était consciente de ce que son corps portait, elle faisait les suivis qu'il fallait mais ne s'en faisait pas outre mesure. Elle avait compris qu'il faut profiter de la vie quand il le faut, se démener quand il le faut et lâcher prise quand il le faut.
Lâcher prise, elle a su le faire avec conscience, humour et élégance. Tout à fait à sa manière.
Même malade, la Reine Mère continuait d'habiter l'espace avec contenance, force et dignité. Elle savait user de dérision pour parler de sa mort imminente, elle savait maintenir un "climat d'au revoir" lucide mais sans triste grisaille.
Sa sérénité face à la mort était rassurante, apaisante.
Elle est partie tout doucement dimanche dernier entourée de ses précieux fils, de sa bru adorée et de sa grande amie et complice de toujours.
Malgré son départ, je ne puis qu'être émue, bouleversée d'amitié de ce départ empreint d'amour, d'humour et de quiétude. Je pourrais être triste bien davantage et cela viendra mais depuis 4 jours, je me sens si pleine de gratitude de l'avoir eue dans ma vie que je ne puis que me sentir choyée à puissance 10, heureuse que ses proches aient pu être auprès d'elle pour l'accompagner vers son dernier voyage. Je suis reconnaissante envers la Vie que cette amie exceptionnelle et magnifique grande âme libre ait pu partir aussi heureuse, aimante et accomplie.
Cette femme a su apaiser par la force tranquille de son amitié mes incessantes tempêtes intérieures. Elle m'a insufflé encore davantage le goût de la qualité, du dévouement maternel, du plaisir des choses simples, mon amour de l'humour. Sa personne entière m'a charmée et inspirée. Nos échanges, les interminables courriels, le bon vin et les fous rires en sa compagnie me manqueront.
Inimittable Reine Mère, merci mille fois d'avoir enrichi ma vie et tel que discuté, n'hésite jamais à passer me voir; je ne crains pas les fantômes et je tâcherai de garder des "bonbons roses" et du bon vin en stock en tout temps !
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