dimanche, janvier 29, 2012

Évangélisation

Tout-Doux (12 ans) me rappelle quelquefois qu'il ne croit pas en Dieu. Il réfléchit, tente de trouver un sens à la divinité, n'y arrive pas. Il est philosophe, tente de trouver le pourquoi du comment, toujours, il est intense, mon beau Loup et il me fait peur dans ses réflexions trop poussées pour son âge.

À l'école, un élève profondément évangélisé de son âge lui a mentionné quelquefois fois qu'il
irait en enfer parce qu'il ne croyait pas en Dieu. Il rapportait l'anecdote de retour à la maison, considérant étrange "l'ami" culpabilisant lui mettant tant de pression pour lui imposer une foi qui n'était pas sienne.

Coco (10 ans) semble avoir eu contact avec cet enfant aussi.

"Maman, que me raconte Coco, Élève X, il est allé voir Frédéric à la récréation, il lui a demandé: "Hé, yo ! Tu sais c'est qui Dieu?"

-Hein?

-Tu sais c'est qui Dieu?

Frédéric était embarrassé.

-Et Jésus, tu le connais?

-Hein?

-Jésus?

-...

-Jésus, c'est ton père...

-Mon père c'est mon papa. Il s'appelle pas Jésus.

*

Perplexe je suis. L'évangélisation passe-t-elle par la cour d'école?

jeudi, janvier 26, 2012

Là où l'on mène nos enfants

Ils vieillissent, évoluent, font des choix. Leurs intérêts se peaufinent, ils consolident leurs valeurs. Souvent, ils nous étonnent par la justesse de leurs propos ou simplement leur habileté à défendre leur point de vue. Ils ont leurs combats, les défendent bec et ongles. Ces combats ne sont pas toujours les nôtres. On soupire quand ils versent dans l'excès. Parfois, on sourit tendrement.

Fils Aîné aura dix-huit ans dans huit mois. Il est au cégep, voulait devenir optométriste. Devant ses misères en maths en dépit de tous ses efforts, il a décidé de lâcher prise et de capitaliser sur ses forces. Il a pris rendez-vous avec une conseillère en orientation pour arriver à son nouvel objectif: devenir garde-forestier (et donc déménager l'an prochain à...Baie-Comeau !!!).

Devant la tangente de sa session collégiale (lui libérant du temps) et la nécessité pour lui d'obtenir son permis de conduire, il a investi ses énergies dans la recherche d'un emploi, a sollicité mon aide pour faire la tournée des commerces ciblés.

Préalablement, il avait rédigé lui-même son cv. Avant de quitter la maison, je souris en l'entendant déplier la planche à repasser. Mon fils est soigné, soucieux de sa personne.

Un fils autonome, débrouillard, courtois, responsable...Quel bonheur !

Il m'est arrivé à plusieurs reprises de vivre l'angoisse du :"Et si je n'étais plus là, comment feraient-ils? Qui leur apprendrait ceci ou cela qu'il importe pour moi de leur transmettre?" C'est donc un soulagement chaque fois que je les vois acquérir un des indispensables outils de la vie: savoir lire et écrire, connaître les conventions et convenances sociales, les règles de politesse, avoir de la persévérance, être responsable et conséquent, être et demeurer intègre même dans l'adversité, etc.

Fils Aîné a obtenu un emploi. Je suis fière de lui. Il avait participé l'été dernier à un échange linguistique du YMCA et à présent, il fait partie des étudiants travailleurs du quartier. Je sais que le commerce qui l'a embauché a fait un bon choix.

C'est un soulagement que de savoir que même si je disparaissais demain, celui-là aura acquis et intégré de belles forces et valeurs (certaines venant de moi, d'autres pas) qui lui permettront de se construire une vie bien à lui.

L'avenir professionnel de Grand-Charme

La moitié de la famille est réunie dans le bureau après le souper...

"Maman, où est-ce que je pourrais passer un test pour connaître ma concentration de spermatozoïdes?", demande tout bonnement Fils Aîné (17 ans).

L'incongruité de la question m'engourdit l'esprit.

-Pardon?

Il répète sans gêne la question.

-Tu peux toujours faire un don de sperme, tu aurais l'heure juste. Puis je lui parle d'un ami maintenant papa de qui l'on avait refusé la semence pour cause de trop faible concentration et de possible infertilité.

-Je n'ai pas 18 ans et j'ai besoin de le savoir maintenant.

Interpellé par la nature de la discussion, Grand-Charme (15 ans), jusqu'alors calme sur le divan, manifeste son intérêt: "Ça paie combien, un don de sperme?"

-Une cinquantaine de dollars.

Pris d'un enthousiasme rare, le bel ado sursaute, l'esprit plus allumé que jamais.

-CINQUANTE PIASSES !?! Moi je pensais que c'était genre 5 $... CINQUANTE PIASSES ! Est-ce qu’ils donnent des beignes en plus? Sérieux, est-ce qu'ils en donnent? On peux-tu donner plus qu'une fois? Plusieurs fois par jour? Trois-cents-soixante-jours par année?

Le cynisme de Grand-Homme se manifeste: "Tu viens de réaliser tous les milliers de dollars que tu as perdu dans la douche ces derniers mois ?"

Amusé par l’enthousiasme de son cadet, Fils Aîné intervient : « Ne t’emballe pas trop vite Grand-Charme, les cliniques de don de sperme doivent être fermées la fin de semaine ! »

L’avenir plein de promesses, Grand-Charme se lève du divan, se précipite sur la calculatrice de mon bureau, fait des calculs, évalue son rythme de vie futur.

-J’ai rencontré la conseillère en orientation de l’école la semaine passée pour en venir à la conclusion que je me dirigerais vers les techniques d’animation 3D. Une chance que je viens d’apprendre toutes les réelles opportunités qui s’offrent à moi !

Le ton de Grand-Charme est empreint d’un grand ravissement: il vient de trouver sa voie.

-De toute manière fait Fils Aîné, il doit y avoir des limites de nombre de dons venant de la même personne…

-Pourquoi? S’objecte Grand-Charme, sûr de lui. Un beau grand jeune homme comme moi…Mon profil correspond à tout ce qu’une femme peut désirer : grand, beau, élancé, beaux grands yeux bruns, chevelure abondante, parfaite santé, remarquable intelligence...

Je mets un bémol.
« La beauté n’est pas tout Grand-Charme. On prend en considération aussi ton bagage génétique. Avez-vous des tares héréditaires? Du cancer dans la famille? Un historique de maladies coronariennes? Vous savez que votre oncle a déjà voulu participer à un essai clinique pour combler un urgent besoin d’argent à 18 ans? Eh bien il a été refusé à cause de son taux de cholestérol trop élevé. C’était pourtant un beau grand jeune homme sain de corps et d’esprit… »

Grand-Homme éclate de rire : « Pauvre Grand-Charme, ton avenir est fichu : tes artères doivent être déjà bloquées avec toutes les chips que tu ingurgites ! »

Mû par une insoupçonnable volonté, Grand-Charme démontre sa bonne foi : « Je suis prêt à arrêter. Tout de suite. C’est décidé : fini les chips. Je n’en achète plus ! Pas question de compromettre mon avenir professionnel ! »

S’ensuit la question du « pourquoi donner du sang et se contenter d’un beigne gratis si on peut obtenir un alléchant montant en faisant quelque chose de, ma foi, pas si désagréable », « Combien facture-t-on au couple dont la femme se fait inséminer avec mon sperme », « Pourquoi ne pas faire un « don direct » pour éviter une surfacturation aux clients alors que je suis si misérablement payé », etc.

À travers l’inspiration démesurée de Grand-Charme, je tente d’en savoir plus sur les motivations de Fils Aîné occultées par les intenses projets d’avenir de son frère.

(Un test de fertilité... Jeune homme, tu n'a pas encore atteint ta majorité !)

Il s’explique : Ami et moi on a fait un pari sur lequel d’entre nous possède le sperme le plus riche en spermatozoïdes.

J’éclate de rire. « Un concours de sperme ! T’es ben drôle toi ! Pourquoi vous ne jouez pas tout simplement à qui pisse le plus loin? Ce serait tellement plus simple ! »

-Ou mettez preuve sur table simplement comme tous les gars normaux : lequel d’entre nous a le plus gros pénis. La question sera réglée, propose Grand-Homme.

Fils Aîné rougit. « Es-tu fou, c’est un Arabe, c’est sûr que c’est lui qui va gagner!"

*

"Dis papa, comment t'es venue l'idée de travailler "pour un meilleur avenir pour les enfants du Québec"?

-Aah, tu sais mon petit, votre oncle Fils Aîné a fait un jour un pari qui a littéralement changé mes perspectives de carrière...




Note: J'ai obtenu l'autorisation de Fils Aîné ET Grand-Charme avant de publier ce billet. ;o)

lundi, janvier 23, 2012

Les astres et le Créateur

Dimanche soir, à la dernière minute, Coco (10 ans) se rend compte qu'il a un devoir d'anglais à remettre pour le lendemain.

Je grogne.

"Zut, je vais avoir une contravention demain !" fait le fils.

Tant pis pour lui. Il est 22h et j'ai horreur que mes fils ne sachent pas dire à leur père lors de leur week-end chez lui qu'il ont des devoirs à remettre pour le lundi, me reléguant de ce fait les devoirs à la dernière minute. 

***

En rentrant dans la maison après l'école, il interrompt la discussion amorcée en sortant de l'autobus en tenant son jeune frère par les épaules, s'appliquant à lui expliquer qu'en fait, ils ne sont pas de vrais frères mais bien des demi, ce auquel Frédéric ne comprend absolument rien.

"Maman ! s'exclame-t-il, aussi heureux que soulagé après avoir franchi le seuil. Je n'ai pas eu de contravention !"

-Tant mieux !

"Je ne crois pas en Dieu, affirme-t-il d'entrée de jeu mais hier soir, je lui ai quand même demandé -juste au cas- de faire que quelque chose arrive pour que le professeur d'anglais ne puisse pas venir en classe ce matin et ça a marché !"

-Wow !

-Mon professeur est rentrée dans la classe en disait que son horoscope d'aujourd'hui lui prédisait un gros changement, puis qu'elle est arrivée à l'école et avait croisé le professeur d'anglais, qui lui avait dit que le cours serait remis à demain. C'était ça, le changement ! Et grâce à ça, je n'ai pas eu de contravention !

Dieu et les astres alignés, ça fesse.

vendredi, janvier 06, 2012

Rouler

Dans l'obscurité. Retour de la veillée du Jour de l'An. Après plus d'une heure de route, les enfants dorment dans la voiture. Sauf Fils Aîné. On a un deal: j'écoute ma musique trad québécoise et quand la musique est plate, je lui laisse mettre une toune de son CD. Il a pris soin d'apporter de la musique que j'apprécie et on chante ensemble lorsque j'ai le bonheur de connaître quelques paroles.

C'est mon tour. Rigodon. Fils Aîné embarque. Un peu. Violon, accordéon, harmonica. Il sait à quel point j'aime la musique trad.

"Tu aurais dû nous forcer à faire de la musique", me reproche-t-il.

Je suis sciée.

J'ai tellement espéré un intérêt de leur part à pratiquer un instrument, longtemps, je les ai poussés. Il y a Tout-Doux que j'avais poussé plus que les autres à cause de son "oreille" évidente. Il a pratiqué le piano durant un an et demi mais la pratique quotidienne était si ardue à intégrer à l'horaire familial que nous avons abandonné.

Jusqu'à ce que Fils Aîné réclame des cours de basse, puis des cours de chant, et qu'il soit suffisamment âgé pour pratiquer seul. À l'âge de 15 ans.

Je me souviens de Grégory Charles en entrevue qui disait qu'au début de l'adolescence, sa mère avait dû le pousser pour qu'il continue la musique alors qu'il hésitait à poursuivre ou abandonner, puis à sa prise de conscience soudaine qu'il aimait véritablement la musique, qu'en jouer lui apportait quelque chose et qu'au fond, il ne le faisait pas que pour ses parents mais que lui-même en soutirait quelque chose .

Je me suis souvent demandé où se situait la ligne entre le "JE suis le parent, tu es mon enfant, tu vas te dépasser et plonger dans la fascinante découverte qu'est la musique (ou de toute autre activité imposée par nous, tes parents), parce que J'AI la certitude que cela peut t'aider à te construire et la position qui veut que l'enfant puisse avoir la liberté de choisir par lui-même, aller vers les intérêts qui l'animent de son propre chef.

Cependant, pour avoir connu avec Grand-Charme l'évidence qu'il était né pour le théâtre, pour l'improvisation alors qu'il n'avait que 9 ans et qu'il ignorait tout de cet art, pour avoir choisi de le pousser pour qu'il s'y immerge en sachant qu'il y découvrirait un univers dans lequel il trouverait assurément sa place, je sais que pousser son jeune peut parfois être salvateur. Après tout, nous, les adultes, nous les parents avons une vision beaucoup plus large que nos jeunes chéris de toutes les possibilités qui s'offrent à eux.

Que mon jeune, mon beau Fils Aîné, mon exquis premier-né viennent me dire: "Mère (comme il aime bien m'appeler), tu aurais dû nous pousser davantage" (alors que j'ai espéré, tenté de convaincre, poussé), nous apprendre l'importance de la musique", me remue.

J'ai voulu, pensé respecter leur choix, leur volonté. Aux dires de Fils Aîné, du haut de ses 17 ans, leur laisser libre-choix était une mauvaise option., avec son recul de -he-heum- jeune adulte.

Moi qui ai toujours craint agir en IMPOSANT plutôt qu'en amenant à CHOISIR judicieusement....

Qui réfléchit, en ce moment?

mardi, janvier 03, 2012

Le plus

Ces derniers mois, à force de demandes précises de ma descendance me sauta au visage un constat : ils ont tous besoin de se distinguer en étant "le plus" quelque chose.

Chaque fois, la demande vient quand ils sont seuls avec moi, par exemple lors d'un trajet en voiture où j'ai la latitude nécessaire pour répondre en toute sincérité.

Connaissant fort bien leurs forces, ils capitalisent là-dessus pour obtenir la réponse ce qu'ils désirent ou espèrent.

"Maman, c'est qui le plus original de tous tes enfants?" me demande Grand-Charme, se sachant largement en tête. "Et le plus drôle?"

"Maman, c'est qui le plus coquin de TOUS tes enfants?" me demande régulièrement Frédéric en se tortillant de plaisir alors que je le borde.

"Maman, d'entre TOUS tes enfants, il y en a sans doute un que tu trouves plus intelligent que les autres, hmmm...?", plein d'attentes ou d'espoir, lance Fils Aîné. "Et si tu devais nommer le plus discipliné et le plus ordonné, on sait aussi qui tu nommerais..."

Je souris.

"Maman, si tu devais nommer celui de tes enfants qui est le plus sensible aux autres, ce serait qui?", demande Tout-Doux, sûr de l'emporter... "Et celui qui t'aide le plus avec tes savons, c'est qui, maman?"

Ils s'installent parfois à table à plusieurs pour dessiner puis insistent pour savoir LEQUEL de tous leurs dessins est le plus ressemblant avec une personne connue. L'opinion qui compte pour trancher? La mienne. 

Je m'émerveille devant l'unicité de chacun de mes enfants. Et eux ont besoin de se faire valider que même évoluant au sein d'une nombreuse fratrie, ils ont ce quelque chose d'unique, de singulier qui font d'eux des êtres irremplaçables possédant des traits dominants les distinguant des autres. Et qu'il y aura toujours de la place, de la valeur pour cette différence.

lundi, janvier 02, 2012

Capitaine Taylor

Depuis que nous avons décidé de changer de voiture, nous ne voyageons que très rarement toute la famille ensemble, véhicule cinq places oblige.

Pour les déplacements des Fêtes, nous dûmes emprunter une voiture. C'est donc divisée que la famille s'est déplacée pour la veillée du Jour de l'An et celle du premier de l'An.

-Tu devrais amener tes walkies-talkies, que je suggérai à Tout-Doux (12 ans). Comme ça, on pourra se parler d'une voiture à l'autre.

Ainsi, d'une voiture à l'autre, les enfants purent se raconter où ils en étaient dans leurs batailles contre leurs ennemis PSP, ou encore nous servir de relais à Grand-Homme et moi pour les indications/hésitations pour la route.

Après moult interventions pas toujours pertinentes (mais Ô combien amusantes) des détenteurs des walkies-talkies, pour une partie du dernier retour, Fils Aîné (mon passager) -alias colonel  Taylor- prit les choses en mains. La chose prit l'allure de communications ultra-secrètes codées entre membres d'un même clan.

Ainsi, on s'adressa à notre contact de la seconde voiture comme on le ferait à un membre inférieur de la hiérarchie martiale, on désigna la station-service comme le lieu d'approvisionnement, l'arrivée imminente à la maison comme l'arrivée au QG, l'arrêt-pipi pour Béatrice comme une nécessité capitale de larguer en toute urgence l'agent Jaune, Grand-Homme se désigna comme le général pour outrepasser les dires parfois insipides des enfants, Fils Aîné avait besoin de vérifier si le convoi #1 avait besoin de couverture, etc.

Fils Aîné à mes côtés, je conduisais, tordue de rire devant la créativité née de l'attrait du jeu même chez un adolescent presque majeur.

Conduire les six enfants dans le même véhicule n'aurait pu fournir un contexte de jeu aussi amusant.

Les déplacements de cette manière? Encore. ENCORE.

Quand le fromage ne goûte pas le fromage

Fidèle à son habitude quand elle va à la toilette seule, Béatrice ne se rhabille pas, ce qui rend quelquefois les plus vieux mal à l'aise.

Cri d'horreur.

-Bon sens ! Qu'est-ce qui se passe, Frédéric?

Plein de dégoût: "Béatrice n'a pas de culotte, elle a pris la brique de fromaze et elle la tient contre sa vulve !!"

Posée: "Ok, pas de panique, la brique de fromage est scellée."

En aparté, à celle qui réclame trois morceaux de fromage, puis change d'idée pour cinq lorsque son frère en réclame quatre, puis qui change encore d'idée pour six lorsque son frère en réclame cinq: "Béatrice, tu vas d'abord aller remettre tes vêtements. Après, tu auras du fromage."

Elle s'exécute, je tiens parole.

Quelques  minutes plus tard, le visage tordu de dédain, Frédéric: "Maman, ze vais pas tout manzer mon fromaze, ze trouve qu'il goûte vraiment trop la vulve."

Maudite affaire. Tsé, quand ça goûte pas ce que ça devrait...