mercredi, avril 30, 2008

La valeur d'un animal domestique

On garde un animal domestique parce que sa compagnie est agréable, parce qu'on peut tisser un lien avec lui, parce qu'il nous séduit, nous attendrit, nous est loyal, pour ses vertus thérapeutiques, parce que les enfants l'aiiiiment ou quelque autre raison.

Combien devrait valoir un animal domestique? Combien devrait-il mériter que l'on investisse pour (sur) lui? Cette question est embêtante et bien personnelle.

Il m'est arrivé deux fois de devoir me départir d'un animal à la SPCA. J'ai chaque fois goûté au discours moralisateur et culpabilisateur rappelant qu'un animal n'est pas une plante dont on se débarrasse dès qu'il nous embarrasse.

Voilà que je fais à nouveau face à cette situation. J'aime notre chat (qui était chatte il n'y a pas si longtemps), mais pas à n'importe quel prix. Pauvre lui, il bénéficie d'un amour conditionnel. Il a commencé à marquer son territoire dans notre demeure, nous contraignant à subir cette odeur infecte et insupportable au sous-sol.

Si j'investis sur lui (vaccins, castration + dégriffage des pattes avant), je devrai débourser un peu plus de 300$. Or, cela ne nous garantit malheureusement pas que notre chat cessera de nous imposer ce calvaire olfactif. C'est une chance à prendre.

J'ai beau avoir fait le choix d'avoir un animal, je ne suis pas prête à lui garantir sa place parmi nous coûte que coûte. Même s'il est adorablement beau et affectueux (!), ma vie n'est pas régie par mon amour de la nature féline à ce point.

Il faut pourtant décider rapidement si nous lancerons les dés sur cette chance qu'il se corrige de son instinct de matou car notre limite olfactive est atteinte. Et hélas pour lui, je ne suis pas de celle qui donne sans compter pour un animal et qui ne daigne pas ouvrir son portefeuille aussi grand que son coeur lorsque nécessaire.

lundi, avril 28, 2008

Maintenant je sais...

Les semaines les plus interminables de ma vie: la dernière semaine de chacune de mes grossesses, la semaine où je venais d'apprendre que j'étais enceinte de Thomas et que mon homme partait pour la Belgique, la semaine où nous avons attendu de revoir le corps de Thomas (une semaine horrible à imaginer son corps de petit garçon que j'aurais tant voulu réchauffer alors qu'il attendait le pathologiste dans un réfrigérateur à l'hôpital et que je ne pouvais rien y changer) et cette semaine à Cuba si loin de mes Amours. Je ne supporte pas ma propre impuissance dans une situation où le lâcher-prise est nécessaire.

Il fallait aller jusqu'au bout de cette semaine, je le sais bien, pour arriver à décrocher. Je sais toutefois maintenant que je ne supporte pas devoir dépendre d'un avion ou de quoi/qui que ce soit d'autre pour rentrer chez moi. J'aime avoir le choix de pouvoir partir immédiatement si c'est ce que je souhaite (ce que j'aurais fait impulsivement au bout de trois jours si cela avait été possible).

La contrainte de la distance m'a donc obligée à passer cette semaine entière loin de mes enfants. J'en suis heureuse (je peux le dire maintenant que je suis rentrée) car j'ai à présent une référence pour mesurer ma (faible) capacité à m'éloigner et à confier mes enfants à (de très dignes) d'autres.

Je sais maintenant que je serais incapable de partir en Europe DEUX semaines sans les enfants. Je sais que si nous repartions en voyage, il y a de fortes chances pour qu'ils nous y accompagnent. Je sais que je ne suis pas faite pour les "resorts" de touristes qui se font cuire sur la plage des heures durant. J'ai besoin de visiter, de me déplacer, de découvrir, de me mêler à la population locale. Je sais que je ne suis pas faite pour ne rien faire (ça je le savais déjà).

Je sais maintenant que j'ai besoin d'avoir de vrais produits laitiers dans mon alimentation. Je sais que je suis une mère désespérément freak. Je sais aussi que je vais dorénavant m'assurer qu'il n'y a pas de scorpions dans le pays que je visite si je décide de marcher pieds nus dans un champs.

J'en sais maintenant un peu plus sur moi, mes limites, mes capacités. Mes besoins, aussi. Un voyage exploratoire et salutaire, donc.

Existe-t-il...


...un bonheur supérieur à...

...celui de pouvoir nager dans la mer turquoise avec son amoureux en respirant la liberté?

...celui de se réjouir de pratiquer une autre langue quotidiennement?

...celui de rire à n'en plus pouvoir s'arrêter (et à en avaler de grosses vagues salées) en ramassant des bestioles avec ses orteils dans l'océan?

...celui de pouvoir s'envoyer aisément en l'air à toute heure du jour sans contrainte enfantine?

...celui de ne se taper aucun repas, aucun lavage, aucun ramassage, aucun "répétage" durant plusieurs jours?

...celui de prendre le temps de sentir les premiers mouvements de son tout-mini bébé?

...celui de n'avoir pas de technologie à proximité (même si c'en est parfois désespérant) en guise de divertissement durant plusieurs jours?

...celui de se faire dire par son homme qu'il ne nous a pas vue si souriante depuis fort longtemps?

...celui de rentrer chez soi le corps reposé, la tête vide et prête à affronter sereinement plusieurs "dossiers" en latence à la maison?

Bien sûr.

Il n'y a pas bonheur plus intense que celui d'arriver à l'aéroport, de hâter le pas avec une énergie maternelle inégalable pour retrouver et serrer dans ses bras tous ces petits garçons fébriles qui nous ont tant manqué (et pour lesquels on s'était imaginé mille scénarios aussi horribles que pathétiques en notre absence qui auraient pu compromettre ces bienheureuses retrouvailles).

Ils me sollicitent d'une tape sur l'avant-bras, d'un tirage de bout de robe, les "Maman!" fusent de tous côtés, je n'ai pas le temps de répondre à un que trois autres "Maman!" naissent autour, ils se coupent la parole plus que jamais pour s'informer des détails du voyage ou raconter tous les incidents que nous avons malencontreusement raté à la maison, mais je les aime et suis heureuse plus que jamais de les avoir retrouvés et de savoir maintenant qu'ils peuvent tous survivre sans moi (dire que je me croyais indispensable!).

PS. Mille mercis à Papi, Mamie, Grand-Maman et tante A-I-A-A qui ont naturellement fait en sorte qu'aucun des enfants n'ait été kidnappé, frappé par une voiture, empoisonné par un bulbe toxique, démembré par un jeu trop dangereux, étouffé par une allergie subite diagnostiquée trop tard, attaqué par un chien enragé, succombé aux blessures de l'effondrement de notre maison par le météorite qui devait s'y écraser durant notre absence ou noyé dans l'eau glacée de notre piscine.

Je sais, je suis paranoïaque. Mon homme me l'a répété maintes fois ces derniers jours lorsque je ne le faisais pas moi-même...

mardi, avril 15, 2008

Cocasse

Je gare la voiture près de la maison au moment où les classes de première année de l'école de mes enfants prennent une marche dans le quartier.

À ma vue, plusieurs enfants s'exclament: "C'est la maman de Coco! C'est son petit frère!"

Le groupe défile et arrive enfin mon fils. Tout fier, il me salue, m'embrasse, puis salue Frédéric avant de poursuivre sa route.

Un ami de Coco qui marche à ses côtés valide: "C'est ton petit frère?"

Fier, Coco approuve.

L'ami étonné s'exclame alors: "Tu m'avais dit qu'il était mort!"

Le bénévolat

Noble bénévolat. Il existe des hommages mérite aux bénévoles. C'est honorable de donner de son temps pour la jeunesse, les sports, les handicapés, les personnes âgées, les enfants malades, les comités de discussion divers. On le fait pour aider, mais aussi parce que le sentiment d'être utile est agréable. On le fait donc aussi pour se nourrir.

On remercie, applaudit, adule, vénère les gens qui donnent de leur temps si généreusement. Et c'est correct, il faut souligner les bons effets de l'engagement.

Je trouve cependant dommage que parfois, chez les personnes ayant une famille, le bénévolat se fasse au détriment de celle-ci. Une des personnes du couple se retrouve donc avec une surcharge de travail à la maison pour compenser pour le bénévole absent occupé à recevoir ailleurs moult gratifications pour son exceptionnel engagement.

Cela peut engendrer de l'amertume de vivre avec un "héros social" toujours prêt à aider les autres mais moins disponible pour les siens.

Le testament

Une bonne chose de réglée. Mon ancien testament ne réflètait plus du tout ma réalité. Il aurait été odieux de ma part de mourir (pas que j'en aie l'intention mais mieux vaut être prévenant) en laissant ma succession se démêler avec une très, très grosse merde.

Je suis allégée de savoir que si jamais il m'arrivait quoi que ce soit, un document notarié protégerait ceux qui me sont chers.

Mille possibilités


Enfin!

dimanche, avril 13, 2008

Mourir accomplie

Plus qu'une semaine avant notre départ pour Cuba. Zen? Pas du tout. Je suis coincée dans la dualité de la hâte absolue de me retrouver loin de toute responsabilité avec mon amoureux et ma hantise de partir à des milliers de kilomètres de ma marmaille pour la première fois.

Oh, ils seront entre de bienveillantes mains mes moussaillons, nul doute là-dessus, mais je suis la pire des moumounes quand il s'agit de mes enfants. Et s'il m'arrivait quoi que ce soit si loin d'eux? Et si je mourrais dévorée par un requin (bon je sais je m'énerve pour rien, j'ai même pris la peine de demander à mon homme de vérifier s'il y avait des requins dans les eaux cubaines), je mourrais en être humain inaccompli.

Et voilà que j'angoisse à l'idée de mourir en laissant cinq orphelins qui ne garderaient que très peu de souvenirs de leur mère et qui ne pourraient jamais dire: "Au moins, elle a eu le temps d'accomplir telle magnifique chose et nous conserverons cela d'elle!"

J'ai passé la soirée avec mon frère, prince d'entre tous lorsque vient la nécessité de me raisonner (et que je n'y arrive plus par moi-même) et de revaloriser mes soirées de dépréciation de fille qui n'accomplit rien de valable de sa platonique vie.

La semaine s'annonce quand même longue d'angoisses.

Soirée chaleureuse sur fond glacé

Soirée émouvante que celle d'hier au mariage de mon amie Mélanie. Je suis une incorrigible braillarde dans ces moments solonnels, celui-là d'une grande originalité.

Je souhaite tout le bonheur du monde à mon amie et son bel amoureux!

Savons marbrés au chocolat


Au séchage pour un mois ces savons chocolatés préparés avec Tout-Doux, mon préposé en chef au pesage des huiles. Inutile de dire que leur odeur est sublime!

vendredi, avril 11, 2008

Le secret

Il le porte seul, en silence. Il s'isole, se recroqueville sans dire mot, réfléchit. Je surprends des larmes couler sur son petit visage sérieux et impassible. Je le prends contre moi, le questionne. Il refuse de parler.

Je tente des détours, émets des hypothèses: culpabilité? Intimidation? Humiliation? Regrets? Solitude? Ostracisme?

Une tombe.

Il ne parle pas, m'assure que ça ne changerait rien.

Avant de partir à l'école ce matin, même scénario. Isolement, mal de ventre subit, envie de vomir. Refus net d'aller à l'école.

Il se passe quelque chose, je le sais et cela me rend malheureuse de voir qu'il refuse que je l'aide à trouver une solution. Il choisit de porter seul son fardeau.

Je m'exprime donc en paraboles, il me répond de la même manière. Quoiqu'il se passe, il doit agir parce que cela n'a pas de sens d'étirer l'angoisse aussi passivement. Ça sent à plein nez la culpabilité de quelque chose dont il a honte.

J'attends un retour d'appel de son enseignante. Peut-être pourra-t-elle m'éclairer?

Derrière ses frères, il est parti, penaud, toute la misère du monde sur ses petites épaules.

Mais que peut donc faire une mère lorsque toutes les portes vers son enfant sont fermées à double tour?

jeudi, avril 10, 2008

Identifier, puis combattre l'ennemi

Comme lors de chacun de mes moments de solitude en voiture, je pense à mon père. À sa vitalité contagieuse, mais aussi à sa souffrance intérieure silencieuse.

Depuis sa mort, je cherche un geste concret à poser pour aider un autre homme comme lui. Je pourrais certes faire un don à la société canadienne du cancer ou à la fondation du CHUS qui l'a si bien soigné mais cela n'aiderait pas vraiment une personne comme lui.

Une personne comme lui, c'est une personne dont l'ennemi premier n'était pas le cancer, mais l'abus d'alcool et de cigarette. Le cancer qui a tué mon père était dû uniquement à ces deux vices. Rien de fortuit ou de génétique.

Mon père n'aimait pas parler de ses vices. Spécifiquement de celui de l'alcool. C'est humiliant de dire ouvertement "je suis alcoolique". Nous en avons pourtant parlé plusieurs fois même si nous évitions le si terrible mot. Il en avait peut-être honte. Dans ses moments d'ouverture et de transparence, il disait que les deux seules personnes qui pouvaient l'aider étaient mon frère et moi.

Bien entendu, ce ne sont pas à deux adolescents (à l'époque), puis deux jeunes adultes à sauver leur père. Pourtant, nous avons bien tenté de l'aider et de le soutenir de différentes façons. Il marchait en titubant, pleurait de découragement, s'accrochait désespérément à nous. Le lendemain, ayant dégrisé, il ne faisait plus du tout référence à la veille où la confusion lui avait permis de dire une partie des vraies affaires. Malgré le fait que mon frère et moi sommes deux personnes de grande volonté (merci maman!), nous n'aurions jamais pu à nous seuls compenser pour la volonté de s'en sortir que notre père ne possédait pas.

Je n'ai pas encore trouvé une façon tangible de contribuer à combattre l'ennemi réel qui fut celui de mon père. J'ai pensé à la Fondation Jean Lapointe (?) mais je ne suis pas encore certaine.

Bedon rond!

Mon petit bedon prend une ampleur folle depuis quelques temps. Ma voisine trouvant mon bedon plus rond qu'aux derniers bébés a spéculé sur une petite fille. Cela me fait bien sourire puisque plusieurs de mes proches entretiennent l'espoir naturel qu'après tant de garçons, une fille viendra mettre une touche de féminité dans la fratrie. Si j'ai espéré à chacune de mes grossesses porter une petite fille, je crois en avoir fait mon deuil cette fois et un nouveau petit garçon me rendrait très heureuse.

Comme j'en suis à presque 16 semaines et que mes nausées n'ont toujours pas cessé (je dois continuer de me droguer aux Diclectin pour éviter de vomir tout ce que j'ingurgite contrairement à mes autres grossesses qui à ce stade, étaient exemptes de nausées), une collègue de Grand-Homme a fait l'équation grossesse différente=sexe différent.

Ce n'est pas la première fois que j'en parle, cela me semble tellement incongru de m'imaginer mettre au monde une fille, allaiter une fille, langer une fille, habiller une fille, coiffer des cheveux de fille. Dans notre maison, des Lego et des petites voitures traînent en permanence sur le plancher, plusieurs de mes garçons font une fixation sur Star Wars, ils se battent avec des épées improvisées. Je ne peux m'imaginer qu'une petite fille puisse venir bouleverser tant d'homogénéité. Je n'en serais pas déçue seulement, cela me demanderait une importante adaptation psychologique.

mercredi, avril 09, 2008

Comestibles?


Eh bien non, ces apparents délicieux petits poudings ne sont pas comestibles. Ce sont des savons étrangements colorés par un ingrédient que j'y ai mis (pourtant en petite quantité).

On pourrait croire à des savons aux carottes, mais ce n'est pas le cas. Vous devinez?

Qui pourrait le croire?

mardi, avril 08, 2008

Le traumatisme de la poule

En tant que parents, nous infligeons à peu près tous des "traumatismes" (mon mot peut être fort, j'admets...) à nos enfants par des actions précises souvent isolées.

Par exemple, bien que ma mère ait été une maman fort aimante, rassurante, douce et à l'écoute, je me souviens d'une colère qui a marqué mon enfance (les colères des personnes trop douces sont souvent impressionnantes). J'avais environ 11 ans et elle m'avait demandé de vider le lave-vaisselle. Cela faisait plusieurs fois que je lui répondais "oui-oui" sans réellement bouger de ma chambre.

Lorsque je me décidai enfin à bouger, elle était déjà en train de faire le boulot et je fus offusquée de n'avoir pas été suffisamment rapide pour accéder à sa demande.

Alors que je tentais de me justifier, elle éclata d'une colère jamais vue et saisit un petit plateau de plastique du lave-vaisselle qu'elle se mit à frapper sur le dossier d'une des chaises de la cuisine: elle en avait marre de répéter. Je me souviens avoir retenu mon souffle en voyant le plateau de plastique se fracasser au contact du bois de la chaise. Puis, une fois son ire calmée, ma mère éclata en sanglots et regarda son plateau brisé avec désolation en déclarant doucement: "Je l'aimais, ce plateau là!"

J'eus envie de la consoler mais puisqu'elle m'avait fait peur, je ne me souviens pas avoir rajouté quoi que ce soit.

Récemment, en rentrant d'un souper de Pâques dans ma belle-famille, Fils Aîné expliquait avec rancoeur qu'il n'avait jamais oublié la poule de chocolat que j'avais impitoyablement jetée par la fenêtre de la voiture.

Il raconta à qui voulait l'entendre la cruauté dont sa mère avait fait preuve à son égard. Soucieuse de voir poindre la vérité, je remis en contexte les faits: Fils Aîné avait environ trois ans et nous rentrions d'un souper de Pâques chez mes beaux-parents de l'époque où il avait reçu des tonnes de chocolat.

À peine le trajet commencé, il commença à revendiquer le droit de manger son chocolat. La crise s'intensifia et devint insupportable. Après plusieurs avertissements de cesser sa scène, j'en vins aux menaces. Je me tournai vers lui et brandis une petite poule en chocolat: "Regarde bien cette poule. Tu la veux? Je t'assure que si tu continues à hurler comme ça, je la jette par la fenêtre et tu n'y goûteras jamais".

J'étais évidemment certaine que la menace étoufferait tout désir de récidive. Ce fut encore pire. Fils Aîné hurla de plus bel, insulté par mon geste. Fâchée (et déstabilisée), je brandis à nouveau ladite poule de chocolat devant lui et lui demandai de la suivre des yeux. La volaille chocolatée s'envola par la fenêtre pour aboutir quelque part sur une entrée d'autoroute de St-Eustache.

Fils Aîné s'énerva encore un peu, après quoi je brandis une seconde petite poule, qui finit elle aussi par rejoindre l'air printanier de ce week-end sacré. À la menace de la troisième poule, il se cala dans son siège, ravala ses sanglots et demeura calme le reste du trajet.

Alors que nous causions de cette histoire, la grand-mère de Grand-Homme s'amusait des plaintes de l'adolescent blessé par la déchirure affective prématurée que je lui avais infligée. Grand-Homme proposa à mon fils une thérapie pour l'aider à surmonter le traumatisme de la poule qu'il porte encore amèrement sur son coeur.

D'ailleurs, je dois en commencer une moi-même sous peu pour me guérir de la colère de ma mère et du plateau de plastique brisé qui nuit grandement à mon épanouissement social.

Évolution

Il y a treize ans, lorsque je préparais une sauce à spaghetti, la famille avait des provisions pour sept ou huit repas.

Il y a cinq ans, j'arrivais encore à faire d'une même quantité de sauce quatre ou cinq repas.

Désormais, une sauce à spaghetti ne couvre pas plus de trois repas (à une seule portion de sauce par personne).

Avec tous mes ogres, je me suis décidée à passer aujourd'hui à la recette double (ma mijoteuse est à un millimètre de déborder).

Je n'ose imaginer la préparation des repas lorsque la majorité de ma gang sera dans l'adolescence.

Qu'on me rende mon plancher sale!


Que fait ce jeune garçon accroupi prêt de son lit?

Il semble bien inactif ainsi, mais en réalité, il proteste vivement. Voyant sa mère laver le plancher de la maison et se diriger vers sa chambre, il refuse net qu'elle y entre. La mère ne se laisse pas impressionner par la volonté du jeune homme à conserver son plancher sale.

Comment réagit-il alors? Il court chercher un linge sec dans un tiroir de la cuisine pour essuyer les traces d'eau laissées par la moppe. Accroupi et résigné, il suit la moppe et essuie le plancher au fur et à mesure en rouspétant: "Pas le plancher à Lélic! Pas dans la chambre de Lélic!". En enlevant la "couche" d'eau, il semble espérer retrouver son bon vieux plancher sale.

Savez, quand on a deux ans et qu'on est déjà attaché à ses vieilles affaires...!!

lundi, avril 07, 2008

Les Denis

Il y a quelques années, une tante du père de mes quatre grands était venue nous rendre visite de sa lointaine Abitibi. C'était la première fois que je la rencontrais. Devant la tête bouclée blonde de Tout-Doux (alors âgé de 2 ans), elle s'exclama: "Ah mon Dieu! Il ressemble à mes Denis!"

Devant mon étonnement, elle m'expliqua qu'elle avait eu un fils, Denis, décédé en bas âge. Elle connut alors l'abominable chagrin de la perte d'un enfant.

Puis, elle eut un second fils, qu'elle prénomma également Denis. Lui aussi décéda autour de l'âge d'un an.

Elle parlait de "ses Denis" en les désignant comme: "Mon premier Denis" et "mon deuxième Denis". Cela me soufflait, j'avais du mal à comprendre que l'on puisse chercher jusque dans le prénom d'un nouvel enfant la continuité de celui qu'on venait de perdre.

Quelqu'un m'a demandé il y a quelques mois si j'aurais idée de prénommer mon éventuel prochain fils "Thomas". Quelle idée! Je fus bien étonnée que l'on ait pu redouter chez moi une chose pareille...

Bonne nouvelle!

J'ai appris hier qu'André Sauvé, chroniqueur savoureux à l'émission 3600 secondes d'Extase et humoriste au style unique, allait présenter son premier one-man show cet automne. Inconditionnelle de son discours absurde, perdu et déconnecté, je ne puis que m'en réjouir.

samedi, avril 05, 2008

L'ouverture d'esprit

Mon frère et moi avons été élevés par notre mère, une femme avant-gardiste, ouverte d'esprit, libérée, grano et excentrique sur les bords. Une mère qui s'intéresse à la psychologie et la spiritualité en-dehors du catéchisme de l'époque.

À presque 16 ans (et 17 pour mon frère), nous sommes partis vivre avec notre père.

Ce fut un choc culturel de côtoyer son esprit conservateur, ses préjugés, sa fermeture d'esprit et ses idées préconçues. Nombre de fois, mon frère et moi devions expliquer certaines choses de la vie à notre père, essayer de lui faire retirer ses oeillères, le calmer dans ses ardeurs morales dépassées. Nous le faisions tendrement parce que notre orgueilleux de père, dans ses colères irrationnelles, était aussi charmant et attachant. La situation m'a souvent donné l'impression que nous étions les adultes et notre père, l'enfant.

Il entretenait des préjugés sur les Noirs mais accueillait nos amis Noirs avec chaleur et courtoisie. Ses discours racistes n'étaient jamais dirigés vers des personnes en particulier mais plutôt vers "la race", stigmate beaucoup plus facile à entretenir de façon générale que pour un être en particulier. Il connaissait un Noir très sympathique qui s'appelait Vainqueur Boncoeur et il se défendait d'être raciste parce qu'il aimait discuter avec lui. Nous nous moquions de ses préjugés non fondés et il finissait par rire de bon coeur (!) avec nous. Je crois qu'au fond, il était fier que notre mère nous ait donné l'ouverture d'esprit qu'il n'aurait pas su nous donner.

Un de nos cousins que mon père aimait bcp a adopté un petit garçon haïtien et je crois que ce fut le coup final qui l'a attendri.

Il se fâchait souvent contre l'homosexualité. Cela le révoltait profondément et encore une fois, mon frère et moi le modérions, tentions de calmer ses foudres irrationnelles. Il aimait la musique de Simon et Garfunkel (c'est l'achat d'un disque d'eux aujourd'hui qui a inspiré ce billet) et se défendait d'être homophobe sous prétexte qu'il écoutait leur musique (le sophisme parfait!).

Il y a trois ou quatre ans, mon frère amena notre père prendre une bière sur une terrasse du Vieux-Montréal. Notre père (homme très complimenteur) observait un jeune serveur. Il ne put s'empêcher d'aller le voir pour le complimenter: "Pardon monsieur, je ne suis pas homosexuel mais je tiens absolument à vous dire à quel point vous avez des yeux magnifiques", ce qui selon ses dires embarrassa le jeune homme.

Lorsqu'il revint à table, mon frère (un client régulier du serveur) expliqua à mon père que le jeune homme, lui, était gai. Notre père fut alors embarrassé du poids de son propre compliment. À travers différentes situations le confrontant à ses préjugés, je crois qu'il finit par assouplir certains de ses principes.

Il était rigide dans plusieurs aspects de sa vie et nombre de fois je me suis emportée contre le manque d'ouverture qui teintait ses réflexions (genre: je l'accusais d'être étroit d'esprit gastronomiquement parlant et il me répondait qu'il était loin d'être difficile puisqu'il aimait la viande et les patates, ce qui donnait à ses hôtes des possibilités infinies pour le recevoir. Je m'insurgeais, lui expliquais que l'ouverture n'était pas dans l'accessibilité de la bouffe qu'on ingurgite mais dans notre capacité à essayer quelque chose de nouveau. Nous nous querellions sérieusement et il réaffirmait contre tous doutes que le fait d'aimer la viande et les patates témoignait de ses larges horizons culinaires). Heureusement, il avait de l'humour et nous avons désamorcé nombre conflits dus à des erreurs de perception.

Mon homme, lorsqu'il veut me faire rire, emploie le raisonnement biaisé de mon père. C'est tellement caricatural que je ne peux m'empêcher d'éclater de rire.

(je suis heureuse d'avoir tous ces souvenirs pour me le rappeler tellement attachant dans ses excès et sa démesure!)

vendredi, avril 04, 2008

Aux semis!

J'ai reçu aujourd'hui les graines de mes semis pour cet été. Je fais de mon mieux chaque année pour les semis intérieurs mais je perds toujours plusieurs plants car je n'ai pas l'espace d'ensoleillement parfait pour y laisser ma pouponnière. Mes plants ont donc tendance à pousser en orgueil.

Au jardin cet été:

Des tomates Canabec Rouge, Montréal Tasty et Omar Libanaise, basilic et coriandre, oignons rouges, laitue Mesclun, frisée rouge, Lolla Rossa et roquette. Il faut aussi penser aux tournesols (je les aime tant!), aux pois mange-tout, aux concombres et au persil!

Comme chaque année, j'aurai eu les yeux plus grands que la panse, mon jardin débordera et ma mère devra venir me prêter main forte au temps des récoltes. Heureusement que l'espace réservé au jardin est limité car je ne suis pas une jardinière très maternelle une fois les semis sortis de terre!

jeudi, avril 03, 2008

Les sous-entendus des parents indignes

Devant les enfants, certains sujets d'adultes peuvent parfois devenir encombrants pour les chastes oreilles (autant que pour la conscience parentale).

Les adultes se voient donc dans l'obligation de trouver par dépit des chemins détournés pour parler de ce sujet qui intéresse tout le monde mais que l'on doit parfois taire en certaines circonstances. Ils développent naturellement un langage de sous-entendus leur permettant de demeurer apparemment moraux devant la gent enfantine. La plupart du temps, les enfants n'y voient que du feu et ne saisissent rien à la subtilité des propos qui suscitent une pas toujours discrète hilarité chez les parents.

Ainsi, la femme de mon cousin m'expliquait qu'un soir, alors qu'elle aidait son jeune adolescent dans sa recherche sur les différents types de nuages, elle ne put s'empêcher de taire certains commentaires à l'endroit de son mari. Le fils avait déjà noté le stratus, le cumulo-stratus, le cumulo-nimbus, etc. La mère se permit de rajouter qu'il y avait aussi le c****lingus, que les femmes appréciaient particulièrement. La mère et le père, via les devoirs de leur fils qui n'y voyaient que du feu, se firent donc la cour à la sauce météo. Romantique, n'est-ce pas?

Récemment, une amie célibataire vint souper avec ses enfants. Alors qu'elle nous racontait avec enthousiasme qu'un de ses voisins (qui porte aussi le chapeau d'insistant soupirant) avait fait faire aux enfants de la coopérative une soirée de camping d'hiver qui fut grandement appréciée de tous, l'amie fit allusion à l'équipement de camping du voisin.

Grande amateure de plein-air, cela ne put que susciter mon intérêt. Je tentai d'en savoir plus sur ledit équipement, ce qui eût pour effet de faire rougir mon amie. Comme mon aîné était présent et ne ratait pas un mot de la discussion, elle dû user d'imagination pour peaufiner la métaphore.

Ainsi, le voisin avait un équipement haut-de-gamme qui tenait au chaud, qui éloignait l'humidité (!), qui était ferme et fiable, etc. Alors que Grand-Homme, mon amie et moi redoublions d'hilarité à chacune des nouvelles métaphores trouvées, Fils Aîné se berçait à côté en réfléchissant très fort au gag qui venait sans doute de lui passer sous le nez. Parce qu'entre vous et moi, il n'y a pas de quoi se rouler par terre à causer tentes, toiles et sacs de couchage.

Ce soir, ce fut au tour de Coco de demeurer perplexe devant la perversion morale de ses parents tentant de l'aider à formuler des phrases à partir d'une liste de mots fournie pour une dictée. Grand-Homme et moi usions brillamment de verve et de verbe à double sens en nous tordant de rire alors que planté à côté des êtres indignes que nous sommes avec son cahier dans une main et son crayon dans l'autre, Coco ne voyait vraiment pas ce qui nous dilatait la rate ainsi. Lui, le sage élève, se préoccupait réellement de son devoir.

Candidement, il répétait entre nous les phrases indignes puisées à même sa liste mais dont il ne soupçonnait pas le sens et la portée suggérés par nous, ignobles parents. Évidemment, nous n'avons approuvé comme devoir final qu'uniquement des phrases chastes et morales ne comportant aucun sens figuré.

Devant la galerie des enseignantes, je sais m'improviser mère morale, quand même.

Dix-sept

C'est le nombre de jours avant mon premier voyage au bord de la mer avec mon amoureux loin des enfants (je trouve le moyen de dire snif malgré tout), du lavage, du ramassage, des sempiternelles chicanes à gérer, de la préparation des repas et de la neige. La première fois aussi que je m'éloignerai si longtemps de mon tout-petit (snif!).

Mais je scande malgré tout: J'ai hâââte!!! :)

La mort...avec désinvolture

Alors que les tout-petits (5-6-7 ans) savent faire des drames impossibles avec des banalités comme "Il a pris ma place à table!", "Il dit que je suis laid", "Il n'arrête pas de chantonner une chanson fatiguante", ils me mystifient complètement avec leur capacité de désinvolture face à une adversité beaucoup plus grande.

J'ai su hier lors de la réunion du C.É. qu'un petit garçon de la classe de Coco (6 ans) venait de perdre son papa. Cela m'a vraiment chagrinée. Lorsque je suis rentrée à la maison, fiston dormait. Ce matin, je l'ai interpelé pour en savoir plus sur ce qui s'était discuté en classe suite à ce triste décès.

Coco s'est alors assis avec désinvolture sur mon lit et m'a raconté: "C'est le papa de Simon. Il traversait la rue en face de son travail et une voiture l'a frappé." Il a haussé les épaules avec une sereine acceptation de la réalité puis a poursuivi: "Une madame est venue dans notre classe. Elle nous a demandé si nous connaissions des personnes qui sont mortes. J'ai levé ma main et j'ai dit que j'en connaissais deux: mon petit frère Thomas et mon Papi."

Il était souriant alors que j'ai les émotions à fleur de peau de penser que six ans, c'est trop jeune pour perdre son papa (je me disais récemment que 33 ans, c'était trop jeune mais six ans, c'est encore plus cruel).

Puis, je pensais aux réactions de Tout-Doux et de Coco lors de la mort de leur jeune frère. Tout-Doux avait six ans et Coco, quatre. Le matin du décès, alors que c'était le branle-bas de combat dans la maison entre l'affolement de Grand-Homme, de moi-même et de Grand-Charme, l'attente des policiers et de l'ambulance, eux, les tout-petits, demeuraient de glace. Ils m'observaient, stoïques, téléphoner froidement à la famille, ils regardaient Grand-Homme tenter de ranimer leur frère inerte sur le plancher. Ils ne réalisaient en rien l'ampleur de ce qui se passait.

Un travailleur social et un psycho-éducateur étaient venus pour faire la liaison entre la réalité funeste de la maison et la réintégration des classes. Tout-Doux avait alors déclaré avec un fond d'enthousiasme: "Moi, j'ai hâte de retourner en classe pour pouvoir dire pendant la causerie que mon frère est mort."

Les deux intervenants avaient demandé à chacun de nos enfants leur lecture des circonstances de la mort. Chacun a raconté à sa façon ce qui s'était passé ce matin-là. J'avais été impressionnée par le stoïcisme et l'apparente insouciance des plus jeunes. La mort est quelque chose de tellement intangible! Coco en avait eu pour plusieurs jours à nous demander quand nous irions chercher Thomas à l'hôpital. Je lui rappelais alors: "Il ne reviendra plus à la maison. Tu te souviens, Thomas est mort. C'est fini, il faut apprendre à vivre sans lui." Et Coco de s'en retourner comme il était venu, avec une sorte de détachement de la situation et un petit sourire mi-insouciant/mi-mal à l'aise.

À cet âge, les réactions sont insidieuses. Elles passent par la bande. Elles nous surprennent au détour. Elle nous étouffent autrement. Coco ne comprenait pas l'irréversibilité de la mort, mais comme j'en ai bavé avec l'insécurité viscérale qui a suivi!

J'ai été étonnée qu'il ne parle pas lui-même des discussions suscitées en classe autour de la mort. Il me semble que la mort nous a tellement interpelés ces deux dernières années. Peut-être qu'en dépit de leur apparent détachement, ils peuvent en avoir marre à leur façon...